La grenouille aurait-elle enfin réussi à se faire aussi grosse que le boeuf ? Nvidia a profité de la conférence Hot Chips pour livrer quelques informations supplémentaires sur le projet Denver, qui sera son premier processeur tout-en-un basé sur une architecture ARMv8 64 bits développé en interne. Dévoilé en début d'année à l'occasion du CES de Las Vegas, Denver doit, selon toute attente, faire ses débuts commerciaux d'ici la fin de l'année, et Nvidia ne tarit pas d'éloges quant à ce qui sera, selon lui, la première puce ARM 64 bits du marché destinée au monde Android.
Le Tegra K1, que l'on retrouve au sein de la tablette Shield ou du Chromebook 13 d'Acer, adopte pour mémoire quatre coeurs Cortex A15 (doublés d'un cinquième coeur compagnon), ainsi qu'un contrôleur graphique hérité des cartes GeForce de génération Kepler muni de 192 unités d'exécution, ce que Nvidia appelle les coeurs CUDA.
Denver conserve cette partie graphique, très efficace, mais bascule vers deux coeurs basés sur une architecture ARMv8 développée par Nvidia. Cette dernière confère à chaque coeur Denver la capacité de traiter jusqu'à sept opérations par cycle d'horloge, contre trois pour un Cortex A15. Ils sont également plus richement dotés sur le plan du cache, avec 128 Ko de cache L1 dédié aux instructions, 64 Ko de cache L1 pour les données, et 2 Mo de cache L2 partagés entre les deux coeurs (contre 32 Ko, 32 Ko et 2 Mo partagés pour le K1 en Cortex A15). De quoi garantir des performances par coeur nettement supérieures à celles de l'actuel K1, d'autant que Nvidia prévoit en outre une montée en fréquence légèrement plus élevée, jusqu'à 2,5 GHz.
Pour ce qui est des applications susceptibles de tirer parti des deux coeurs, Nvidia introduit une autre nouveauté baptisée Dynamic Code Optimization, qui consiste, en simplifiant, à recompiler en code natif les instructions les plus fréquemment envoyées par le logiciel, puis à stocker ces dernières dans une portion réservée de la mémoire système (128 Mo lui sont dédiés) de façon à pouvoir les exécuter plus rapidement. Les coeurs reposent donc sur une architecture in-order (les instructions sont exécutées dans l'ordre où elles arrivent), mais du fait de cette optimisation, leurs performances se rapprocheraient de celles obtenues avec une approche out of order (le processeur choisit dans quel ordre traiter les instructions), sans les coûts de traitement associés.
« Le Dynamic Code Optimization fonctionne avec toutes les applications ARM, sans qu'aucune modification ne soit requise au niveau des développeurs, et sans consommation énergétique supplémentaire comparée aux autres processeurs mobiles ARM », souligne encore Nvidia. Une approche prometteuse, qui rappellera sans doute aux amateurs éclairés les travaux de feu Transmeta... Sans les détailler, Nvidia affirme enfin que Denver profite de diverses optimisations liées à la régulation de la consommation électrique et des tensions de fonctionnement, à commencer par de nouveaux états électriques (c states).
Avec une consommation globale mesurée inscrite dans la lignée de Tegra K1, Nvidia affirme que Denver offrira un niveau de performances supérieur à celui des puces ARM 32 bits basées sur quatre ou huit coeurs et pourrait même rivaliser, sur certaines applications, avec les derniers processeurs Core basse consommation d'Intel. La firme donne rendez-vous dans la seconde moitié de l'année pour découvrir les premiers appareils équipés de Denver et glisse pour finir l'information selon laquelle ses ingénieurs planchent déjà au portage d'Android L sur sa nouvelle architecture.