La question de la transition vers le procédé 18A est cruciale pour Intel qui se doit de rassurer clients et investisseurs.

Le groupe américain Intel est en difficulté, ce n'est un secret pour personne. Pour ne rien arranger, la nouvelle administration Trump veut se débarrasser du Chips and Science Act mise en place par son prédécesseur Joe Biden.
Un système de subventions dont a largement profité Intel en touchant la bagatelle de 8 milliards de dollars. Alors, quand les rumeurs font état de faibles rendements sur le nœud 18A, Intel doit rassurer.
L'Intel 18A en face du N2 de TSMC
L'annulation du procédé de gravure 20A par Intel avait pour but de tout miser sur le nœud suivant dans la feuille de route du groupe américain, le 18A, lequel doit permettre au bras manufacturier – Intel Foundry – de revenir dans la course.
Si le terme n'est pas forcément très explicite, le 20A correspond à 20 angström soit 2 nm. De fait, le 18A doit permettre encore un peu plus loin dans l'infiniment petit et de coiffer au poteau l'entreprise Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC) laquelle cherche aujourd'hui à améliorer les rendements de son N2, un nœud de gravure 2 nm justement.
La finesse de gravure est aujourd'hui le nerf de la guerre, car toutes les plus grandes entreprises de conception de puces que peuvent être AMD, Apple, NVIDIA ou Qualcomm pour n'en citer que quelques-unes ont toutes besoin de nœuds toujours plus fins pour assouvir leurs besoins de puissances.

Intel reste dépendant de TSMC
Ces clients ont besoin d'être rassurés afin qu'ils passent commande d'un maximum de puces auprès des géants de la production et, à l'heure actuelle, c'est clairement TSMC qui se taille la part du lion : toutes les entreprises citées précédemment constituent des partenaires de TSMC.
Plus fort encore, si Intel est concurrent direct de TSMC via Intel Foundry, le groupe américain est actuellement incapable de se passer des services du Taïwanais pour la gravure de ses puces de dernière génération – les Lunar Lake et autres Arrow Lake – ce qui, forcément, n'incite pas à la confiance : quand on s'appelle Amazon, comment effectivement se dire qu'on va signer un colossal chèque Intel si la firme n'est pas en mesure de produire ses propres puces ?
Pour Intel, le nœud 18A revêt donc un intérêt encore un peu plus important : il doit permettre d'assurer la production – presque à 100 % en interne – des futures puces Panther Lake tout en montrant au monde que le groupe américain est maintenant revenu au premier plan. Hélas, les dernières rumeurs avancées par NotebookCheck notamment ne vont pas forcément dans le bon sens pour Intel et, surtout, pour Intel Foundry.
Nos confrères expliquent effectivement qu'Intel doit actuellement faire face à des rendements encore trop faibles sur le 18A alors que TSMC est bien plus avancé sur le 3 nm – en face duquel Intel n'a pas de nœud puisque le 20A a été annulé – et le 2 nm. De fait, alors qu'il y a un an, Intel souhaitait réduire sa dépendance à TSMC à zéro, elle est encore obligée de sous-traiter encore environ 30 % de ses galettes de silicium à son concurrent.
La retranscription d'un échange entre John Pitzer d'Intel et Joe Moore de Morgan Stanley nous apprend qu'Intel aurait mis en place une nouvelle stratégie visant à prolonger son partenariat avec TSMC : « Nous pensons qu'il est toujours bon d'avoir au moins une partie de nos wafers chez TSMC. C'est un excellent fournisseur. Cela crée une bonne concurrence entre eux et Intel Foundry », aurait donc précisé John Pitzer.
Rassurer les marchés, rassurer les futurs clients
Une décision récente qui pourrait avoir d'importantes répercussions sur la signature de contrats avec certains partenaires. C'est pourquoi, dans le même temps, Intel cherche absolument à rassurer tout le monde, à montrer que les choses se poursuivent « comme prévu » sur le 18A.
Les rumeurs de difficultés de rendements sur le 18A ne sont pas nouvelles et nous nous en faisions l'écho dès le mois de septembre dernier. Pour autant, depuis ces rumeurs, Intel n'a eu de cesse de montrer qu'elle est parfaitement dans les temps. Ainsi, au CES 2025 de Las Vegas, Michelle Johnston Holthaus – P.-D.G. par intérim – a présenté une puce Panther Lake affirmant que la production démarrerait bien avant la fin de l'année.
Plus important encore, il y a à peine quinze jours de cela, Intel a précisé que « la gravure 18A est prête » avant, tout de même, d'ajouter comme une espèce de petite ligne à un contrat : « Intel 18A est désormais prêt pour les projets clients avec des sorties de bandes débutant au premier semestre 2025 ». Intel est donc prête à recevoir des commandes autour de projets exploitant le 18A, des projets émanant de ses clients comme Amazon ou Microsoft.
Il y a quelques jours, à l'occasion de la conférence Morgan Stanley Technology, Intel a donc décidé de confirmer une fois de plus que la gamme de processeurs Panther Lake sera bien lancée avant la fin de l'année 2025, sous-entendant donc, que le nœud 18A sera fin prêt. Cela dit, il ne faut pas non plus oublier que la firme avait déjà indiqué que Panther Lake suivrait un rythme de mise en production similaire à ce qui avait été fait pour Meteor Lake et Lunar Lake.
En d'autres termes, cela veut que si production avant la fin de l'année il y a bien, il ne sera pas question d'une mise à disposition en masse. En effet, ce n'est qu'en début d'année 2025 que la production à grande échelle des nouvelles puces sera possible… preuve que le 18A ne sera pas disponible sur toutes les lignes d'Intel Foundry avant encore un petit moment. Lors de la conférence, Intel a d'ailleurs tenu à rappeler ceci :
« Nous lancerons Panther Lake au cours du second semestre de cette année. Dans le même ordre d'idées, nous avons lancé Meteor Lake au cours du second semestre 2023. Ce n'est qu'en 2024 qu'il a atteint des volumes importants. Nous avons lancé Lunar Lake au cours du second semestre de l'année dernière, et c'est cette année qu'il atteindra son volume réel. Et comme nous l'avons dit pour Panther Lake, nous l'avons lancé au second semestre de cette année, mais ce n'est pas avant l'année prochaine que le volume commencera à améliorer les marges de l'ensemble de l'entreprise ».
Il faut aussi savoir qu'avec son côté vitrine technologique, l'Intel 18A sera d'abord réservé aux puces du groupe, et donc à Panther Lake. Tout porte aujourd'hui à croire – et c'est en partie une des précisions de nos confrères de ComputerBase – que les premières puces gravées en 18A pour les clients d'Intel ne sortent pas avant 2026. Reste maintenant à voir où en sera TSMC à ce moment-là et sur quels clients Intel pourra réellement compter.
Sources : ComputerBase, NotebookCheck