Désert médical : le Roannais va expérimenter la télémédecine

AO avec Relaxnews/AFP
Publié le 15 mars 2016 à 13h19
Siège incliné, écran d'ordinateur pour guider le patient ou organiser une téléconsultation, instruments de mesures pour « peser, mesurer, calculer l'indice de masse corporelle, prendre la tension, le pouls, connaitre le taux d'oxygène dans le sang », mais aussi stéthoscope, dermatoscope, rétinographe, la cabine créée par la société française H4D (Health For Development), est présentée par ses promoteurs comme « un véritable petit cabinet médical connecté ».

Installée dans les locaux d'une pharmacie mutualiste au centre-ville de Roanne (Loire), cette machine aux dimensions d'un photomaton, déjà expérimentée en Bourgogne, ambitionne de « favoriser l'accès aux soins » sur un territoire, le Roannais, considéré par les professionnels de santé et les pouvoirs publics comme en voie de désertification médicale.

Financée via des fonds européens de développement régional (Feder), l'expérimentation est pilotée par la Mutualité française, l'université Jean-Monnet de Saint-Etienne, les élus de l'agglomération, l'agence du développement économique de la Loire et la mutuelle locale Eovi Usmar Services et Soins.

D'ores et déjà, la cabine permet aux patients qui le souhaitent de recueillir certains paramètres de leur santé - poids, pouls, tension, rythme cardiaque - transmis ensuite à un généraliste qui, en fonction, décidera de l'opportunité d'une consultation.

« Ne remplace pas le médecin »

Une seconde étape de l'expérimentation, encore soumise à l'aval de l'Agence régionale de santé, permettra de prendre rendez-vous avec un généraliste en visio-conférence.

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« La cabine ne remplace pas le médecin », assure Rémi Bouvier, directeur général de la Mutualité Loire, conscient que cette technologie, qui en est encore à ses balbutiements en France, fait grincer des dents chez les médecins libéraux. « Je n'imagine pas une demi-seconde qu'une machine puisse prendre la place d'un humain mais elle peut être un support », complète Clotilde Robin, vice-présidente de l'agglomération roannaise.

Tous deux décrivent une expérimentation encadrée par un strict cahier des charges.

Entre autres avantages, ils soulignent également que la cabine est susceptible d'alléger la charge de travail des médecins qui, dans des zones en tension comme le Roannais, se plaignent des journées à rallonge.

A l'Ordre des médecins de la Loire, le projet est accueilli avec prudence mais curiosité. « Il faudra vérifier que tout ça s'inscrive dans un parcours de soins », prévient son secrétaire général, Jean-François Janowiak. « On ne fera pas de médecine sans médecin », ajoute-t-il. « Mais dans un territoire en tension, si cela peut soulager, dans le cadre d'une surveillance et bien protocolisé avec les médecins, alors ça peut avoir un intérêt. »

La manoeuvre d'une mutuelle

Mais avant de trouver ses patients, la télémédecine devra convaincre les généralistes locaux, que l'initiative fait bondir. Ceux-là même qui, il y a un an, s'étaient mobilisés en organisant une grève inédite contre la loi Touraine: une fronde baptisée le Printemps Roannais. « Nous avons découvert l'existence de cette cabine par la presse. Il n'y a pas eu de concertation. C'est inadmissible et scandaleux », déplore le docteur Bruno Pagès en fustigeant une « opération commerciale et publicitaire d'une mutuelle ».

« C'est une remise en cause de la relation médecin-patient », tonne Michel Séraille, généraliste depuis 37 ans à Roanne. « Dans notre spécialité, cette cabine ne peut apporter quoi que ce soit », relève le médecin qui y voit « une illustration de la prise de pouvoir des mutuelles sur la santé des gens ». Une crainte déjà exprimée par le Printemps roannais il y a un an.

« Les critiques disent la même chose que nous. A savoir que la cabine ne peut remplacer le médecin. Ce n'est qu'un outil utilisé par un praticien », rétorque Rémi Bouvier pour qui « mieux vaut une télémédecine que rien ».

« Je voudrais qu'on arrive à travailler avec les médecins et je les appelle à ne pas rejeter un système qui peut peut-être à terme leur venir en aide », plaide Clotilde Robin.
AO avec Relaxnews/AFP
Par AO avec Relaxnews/AFP

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