Malgré les efforts importants fournis par les opérateurs, la technologie a du mal à s'imposer au pays du chocolat, qui doit affronter une certaine opposition.
La Suisse s'active sur le terrain de la 5G. Avec un parc qui est sur le point d'atteindre les 3 000 antennes (contre seulement 300 l'année dernière à la même époque), la confédération helvétique ne fait pas office de petit bras en Europe concernant la progression de la technologie de cinquième génération, dans un pays où la consommation de données mobiles a été multipliée par 40 en sept ans. Mais qu'en est-il de son adoption réelle ? Là, les choses sont différentes, et les raisons pour l'expliquer ne manquent pas.
Des offres déjà disponibles et une couverture qui progresse
En 2019, les trois opérateurs suisses, Swisscom, Sunrise et Salt, ont dépensé 380 millions de francs (un peu plus de 350 millions d'euros), pour pouvoir installer des antennes 5G partout dans la confédération. Le plus puissant, Swisscom, a par exemple déjà installé 745 antennes, bien actives. Mais leur utilisation reste plus secrète. Et leur sollicitation encore plus. « Nous ne communiquons pas de chiffres, mais il s'agit évidemment d'une minorité », indique le porte-parole de l'opérateur quand il s'agit de s'exprimer sur le nombre de clients qui utilisent la 5G.
Swisscom peut aujourd'hui se targuer de couvrir environ 90% de la population, grâce à des fréquences qui permettent d'atteindre des débits jusqu'à 1 Gbit/s en descendant. Avec des forfaits allant de 50 francs suisses à 200 francs suisses par mois (entre 46 et 186 euros par mois, avec un forfait 5G illimitée à 74 euros qui semble être la meilleure offre dans le pays à la neutralité légendaire).
Son concurrent, Sunrise, qui avait installé la première antenne il y a deux ans, ne propose pour l'instant qu'un forfait hybride (Suisse, Europe et US) 5G à 130 francs par mois, soit 120 euros par mois, avec du 100% illimité (4G+, 5G, appels et SMS). Sunrise couvrirait 595 villes ou lieux avec une 5G issue de la bande 3,5 GHz (la bande-cœur de la technologie), permettant d'affoler les compteurs, avec des débits pouvant atteindre les 2 Gbit/s. L'opérateur vise la couverture de 90% de la population transitant par la bande 700 MHz, parfois positionnée entre 4G et 5G par certains opérateurs européens.
Salt, l'opérateur propriété d'un certain Xavier Niel, n'a pas encore déployé son réseau 5G.
La tâche des opérateurs sérieusement compliquée en Suisse
En Suisse, les opérateurs ont à affronter plusieurs moratoires cantonaux. Motivés, comme ailleurs, par les craintes que la 5G feraient peser sur la santé des consommateurs, les moratoires perturbent l'avancement des acteurs des télécoms, notamment dans les cantons de Genève et Vaud.
Des incohérences subsistent quant au moratoire décidé il y a trois ans par les autorités genevoises et une décision suspensive prononcée en avril 2019, qui n'ont pas empêché les opérateurs de construire leur réseau 5G et couvrir, pour certains, 90% du territoire. Le canton de Genève a donc davantage serré la vis en adoptant une loi, en vigueur depuis le 4 juillet 2020, qui oblige les opérateurs à déposer une demande d'autorisation de construire, même pour les changements mineurs, y compris les changements de logiciels.
Autre frein à l'adoption massive de la 5G en Suisse : la difficulté à se procurer des smartphones compatibles avec la technologie. Les mobiles et les forfaits sont plus chers que pour ceux compatibles avec la technologie mobile précédente.
C'est une véritable bataille à laquelle se livrent d'un côté les opérateurs, tenus par une obligation juridique de couverture de la population, souscrite lors de l'achat des fréquences, et la population de l'autre, sceptique sur la 5G. Et dire que 26 500 nouvelles antennes devront être construites pour aboutir à une couverture 5G semblable à celle de la 4G.
Source : Le Matin