Auditionné par le Sénat lundi, le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, a reconnu que la France avait du retard en matière de sécurité numérique. Il appelle les sénateurs à voir plus loin que les limites éthiques éventuelles.
Christophe Castaner était auditionné, lundi 2 septembre, par la commission d'enquête du Sénat sur les questions de souveraineté numérique. En tant que garant de celle-ci, le ministre de l'Intérieur était interrogé au sujet des nouveaux défis liés à la cybercriminalité, que la France doit relever. Il s'est notamment exprimé sur l'essor de l'intelligence artificielle en posant le dossier de la reconnaissance faciale sur la table, mais aussi sur l'identité numérique et la protection des données sensibles.
La France a « tort » de craindre l'IA, selon Castaner
« On a tous en tête ''Big Brother'' ou ''Minority Report'', et du coup on est plutôt, aujourd'hui, le pied sur le frein ». Christopher Castaner a pris ces exemples pour relayer les craintes de nombreux Français et d'élus, qui perçoivent l'intelligence artificielle comme un danger pour notre société. « Je pense que nous avons tort », a poursuivi le locataire de la Place Beauvau.Pour le ministre, certains outils permettraient aux Français et au pays d'être plus efficaces dans bien des domaines, en suggérant, au passage, de les sécuriser. Christophe Castaner prend alors l'exemple des caméras piétons, qui aident la police (et désormais les pompiers) mais dont les images ne sont disponibles que sur une durée limitée et avec une accessibilité limitée, « pour préserver les libertés fondamentales de nos concitoyens ».
Le ministre milite pour l'utilisation de la reconnaissance faciale
L'ancien maire de Forcalquier a également évoqué l'attentat de la rue Victor-Hugo à Lyon le 24 mai 2019, pour justifier son intérêt pour l'intelligence artificielle. « L'événement s'est passé un vendredi à 16h30 et nous avons identifié l'auteur le dimanche en fin de soirée. Il a fallu ce temps pour qu'une trentaine d'enquêteurs regardent image par image l'ensemble du réseau », déplore-t-il.« Avec l'intelligence artificielle, logiquement, 15 minutes après, on aurait su où était allé l'auteur présumé de cet attentat », estime-t-il, suggérant ainsi d'avoir recours à la reconnaissance faciale, une technologie qui peut faire débat selon lui mais qui « peut être nécessaire à une meilleure enquête et à la protection des Français ».
Le premier flic de France, tout en reconnaissant qu'il faut mettre en place des outils de contrôle et de régulation pour garantir le meilleur usage possible de la technologique, invite les sénateurs « à ne pas avoir de pudeurs de gazelles, ni de tabous », craignant que cela les empêche d'aller plus loin.
S'inspirer de l'Estonie pour l'identité numérique
Christophe Castaner a ensuite donné son opinion quant à l'identité numérique. Là-aussi, son constat est amer puisque « nous ne sommes pas avance », indique-t-il. Comme le fait l'Estonie, pays à avoir massivement adopté la numérisation de toutes les démarches administratives, le ministre de l'Intérieur veut proposer « un parcours d'identification numérique universel pour faciliter considérablement les démarches des citoyens et appuyer la future carte d'identité numérique ».Le Varois a logiquement rebondi sur la sécurité des données, pour laquelle il assure que la France a pris toutes les dispositions nécessaires. « Nous assurons la propre maîtrise de nos centres d'exploitation informatique. Nous nous sommes dotés d'un Cloud souverain pour héberger nos propres données sensibles. Nous avons créé une direction du numérique unique au sein de notre ministère », détaille-t-il, en prenant le soin de rappeler qu'aucun système n'est infaillible et en appelant à une meilleure « hygiène cyber » pour les différentes administrations.
Source : Public Sénat