La volonté de l'Inde de se doter d'un vaste système de reconnaissance faciale va soulever de nombreuses questions, dans un pays qui souffre d'un défaut de législation protectrice de la vie privée.
La reconnaissance faciale fait partie des sujets les plus discutés que l'on peut rattacher à l'intelligence artificielle. La technologie fascine autant qu'elle suscite les craintes et les doutes. Son utilisation est de plus en plus répandue, et certains pays, comme la Chine, se sont déjà massivement équipés en la matière. L'Inde envisage, à son tour, de se doter de l'un des plus grands systèmes de reconnaissance faciale au monde.
L'Inde veut renforcer sa sécurité intérieure
Le gouvernement de l'Inde, dirigé par Narendra Modi, lancera le mois prochain un appel d'offres afin d'établir un système de centralisation des données de reconnaissance faciale, données qui seront obtenues grâce aux caméras de surveillance disséminées partout dans le pays. Le système mis en place sera relié à des bases de données plus vastes qui comporteront de nombreuses informations, comme les empreintes digitales des individus ou les données de chaque passeport.Reconnaissance faciale : Panasonic équipe les aéroports japonais de portails automatisés
Le but, pour les autorités indiennes, est d'aider la police locale à identifier les criminels, mais également les personnes disparues ou celles sans vie. Le pays considère qu'il manque de moyens humains (un officier pour 724 citoyens) pour garantir une sécurité suffisante.
Outre les forces de police, ce sont les entreprises du pays, frappées par une centaine d'attaques terroristes ces trois dernières décennies, qui vont en profiter. La société de conseil TechSci Research estime que le marché indien de la reconnaissance faciale atteindra les 4,3 milliards de dollars d'ici 2024, soit autant ou presque qu'en Chine.
Aucun système concret pour protéger la vie privée des citoyens
Forcément, l'utilisation massive évoquée et attendue de la reconnaissance faciale suscite l'interrogation sur place. Les défenseurs de la vie privée redoutent que l'Inde bascule dans un système similaire à celui établi en Chine. Le pays ne jouit d'aucune législation en la matière et a même fait stopper Internet dans la région du Cachemire indien.Les opposants à la reconnaissance faciale sont sceptiques et craignent que le pays utilise la technologie à des fins de surveillance et de contrôle. « Nous sommes la seule démocratie fonctionnelle à mettre en place un système, sans loi sur la protection des données ou la vie privée », regrette Apar Gupta, avocat et directeur exécutif de l'Internet Freedom Foundation, qui estime que « c'est comme une ruée vers l'or pour les entreprises qui recherchent de grandes bases de données non protégées ».
Pourtant, un projet de loi fut soumis au gouvernement de l'Inde en 2018. Mais celui-ci n'a toujours pas été approuvé, ce qui tend à renforcer le scepticisme ambiant.
Source : Bloomberg