© Netflix / Wit Studio
© Netflix / Wit Studio

Réalisé en partie grâce à une IA génératrice de contenu, ce nouvel anime Netflix se montre aussi controversé que l'outil employé pour sa création.

Présenté comme un « effort expérimental » pour avertir de la pénurie d'artistes dans l'industrie des animes et la compenser, la plateforme de streaming a donc employé des moyens qui n'ont clairement pas été du goût de tout le monde.

A Dog, a Boy and an AI

Intitulé Dog & Boy, l'anime en question est un très court-métrage de seulement 3 minutes. Si les personnages ont bien été dessinés par des artistes de chair et d'os, Netflix et le studio d'animation Wit Studio se sont servis d'une IA génératrice d'images pour les décors en fond, qui représentent une partie très importante du processus de création d'un anime.

Ce qui a frappé de nombreux spectateurs, c'est la manière selon laquelle les artistes ont été crédités à la fin du court-métrage. En effet, les décors de fond sont attribués à « IA (+ Humain) », et nous pouvons également lire des crédits à destination de rinna Co., une société d'art spécialisée dans l'intelligence artificielle, ainsi que de plusieurs chercheurs versés dans ce domaine.

Sauf que les artistes humains ont non seulement travaillé sur les personnages, mais ont également dû retoucher les décors générés par l'IA. Sans pour autant recevoir de rémunération pour ce travail supplémentaire, puisque le gros du travail n'est, aux yeux de Netflix et Wit Studio, pas de leur fait.

L'industrie de l'anime dans la tourmente

Beaucoup ont donc vu dans ce court-métrage (non sans raison) une manœuvre de la part de Netflix et Wit Studio pour faire des économies sur la main-d'œuvre humaine en faisant appel à l'intelligence artificielle. Cette situation n'a malheureusement pas attendu l'IA pour être déjà dramatique.

Selon l'association japonaise des créateurs d'animation, en 2018, les artistes travaillant sur les décors de fond touchaient 200 yens (environ 2 euros) par dessin. Pour une animation fluide demandant de nombreux dessins et des heures de travail, chaque animateur gagnerait en moyenne 1,1 million de yens (aux alentours de 10 000 euros) par an, alors que le seuil de pauvreté au Japon est estimé à 2,2 millions de yens (environ 20 000 euros) par an.

Pire encore, de nombreux studios d'animation font appel à des artistes freelances travaillant bénévolement pour produire des animes en masse et dans les temps. Mais ce dernier coup d'éclat artificiel de Netflix touche, en plus de l'aspect financier de la chose, à l'honneur des artistes de chair et d'os.

En 2016, le très connu Hayao Miyazaki, cofondateur et dirigeant du non moins célèbre Studio Ghibli, avait en effet exprimé le fond de sa pensée vis-à-vis des programmes d'animation assistés par l'IA en ce sens : « Je souhaite que jamais cette technologie ne soit incorporée à mon travail. Je la perçois comme une insulte à la vie elle-même. » Une réaction pour le moins visionnaire, au vu de la levée de boucliers des communautés d'art face à des outils tels que DALL-E ou Midjourney ces derniers mois…