Lorsqu'on se connecte sur le site de Popcorn Time, on est tout d'abord frappé par la sobriété de l'ensemble : pas de publicité et un affichage élégant et épuré qui propose de télécharger le logiciel, actuellement en bêta. Seul un bandeau jaune, situé en bas de la page, indique que « Le téléchargement de contenu sous copyright peut être illégal dans votre pays. Utilisez le logiciel à vos propres risques. » Là, on comprend que sous ses apparences de site tenu par des professionnels, Popcorn Time n'est pas aussi clair qu'il en a l'air.
Et pour cause : le système, qui se base sur le protocole BitTorrent pour streamer des films « en HD et avec sous-titres » sur les ordinateurs de ses utilisateurs, ne verse pas un centime aux ayants-droit. Le contenu est récupéré illégalement sur la Toile. Mais la démarche, simplifiée au maximum, combinée à un design qui donne confiance, fait de Popcorn Time une solution facile d'accès à ceux qui n'auraient pas les connaissances suffisantes pour pirater de manière plus complexe. Et puis, l'accès au service est gratuit.
Interrogé le 8 mars par TorrentFreak, le concepteur du programme, basé à Buenos aires en Argentine, expliquait : « J'aime le défi de la simplification. Prendre quelque chose de compliqué pour l'utilisateur de base et le rendre accessible. J'ai beaucoup d'amis qui ne comprennent pas les torrents et je voulais rendre cette technologie facile d'accès, sans effort. » Une démarche qui ne plait cependant ni aux ayants-droit, ni aux responsables des technologies impliquées.
Mega se dédouane
Actuellement, le logiciel Popcorn Time est indisponible au téléchargement. Et pour cause : initialement hébergé sur Mega, il a été supprimé, et le lien mène actuellement sur une page d'erreur. Une situation qui peut s'avérer logique puisque la plateforme, créée par Kim Dotcom, met davantage de cœur à l'ouvrage pour supprimer les fichiers jugés illégaux qu'à l'époque de Megaupload. Cependant, mardi, Kim Dotcom lui-même taclait la MPAA (association regroupant les ayants-droit de l'industrie du cinéma américain) sur Twitter.
Popcorn Time @MPAA ;-)
http://t.co/MwftkB1lnI
— Kim Dotcom (@KimDotcom) 12 Mars 2014
Le fondateur de Mega a cependant expliqué à TorrentFreak ne pas être à l'origine de cette suppression. « Je ne suis plus impliqué à ce jour dans les affaires de Mega depuis que j'ai démissionné de la direction pour travailler sur Meganet, Baboom et Internet Party » indique-t-il. « Je n'ai aucune idée de ce qu'il s'est passé. »
La MPAA, de son côté, serait actuellement en train de préparer une action en justice pour tenter d'enrayer la popularité du service. Actuellement, si Popcorn Time n'est plus disponible en téléchargement, il s'avère que le service est toujours actif pour les utilisateurs connectés ayant installé le logiciel. Une situation qui ne pourrait cependant pas durer, mais qui pourrait renaître très vite de ses cendres en cas de disparition, puisque le code source du logiciel est proposé en libre accès.
Un engagement militant ?
A travers ce type de démarche, certains n'hésitent pas à voir un message lié à une demande d'offre globale simplifiée. Un site comme Popcorn Time est trompeur, car il est facile d'accès et donne une image confiante, ce qu'une offre légale simple d'utilisation devrait fournir - à noter qu'il est esthétiquement proche du site de Netflix.
En France, une offre similaire dans son caractère illégale a récemment fait surface, avant de disparaître aussi rapidement qu'elle était apparue. Nommée Le Vidéo-Club, elle proposait aux internautes de recevoir chaque semaine, dans leur boîte mail, des liens vers des films à télécharger, stockés sur un compte Dropbox. Un service initialement gratuit, qui projetait de faire payer 1,90 euros par mois à ses quelque 1000 adhérents, pour justifier le maintien d'une « plateforme technologique viable ». Mais pas un centime n'était destiné aux ayants-droit.
Les créateurs du Video Club justifiaient leur démarche en expliquant que son succès témoignait de l'intérêt des internautes pour une licence globale. Cependant, à l'heure où l'on parle beaucoup de l'arrivée de Netflix en France et où cette agitation donne un coup de projecteur sur les offres de SVOD, une telle démarche illégale pourrait davantage lorgner du côté de l'opportunisme que de la volonté de faire bouger les ayants-droit autrement qu'en attaquant de tels services en justice.