Alors que l'Assemblée s'apprête à entamer, mardi 10 mars, l'examen du projet de loi « Création et Internet », une étude commanditée par le quotidien Metro à TNS Sofres suggère que 37% des internautes français téléchargent illégalement ou consomment des contenus obtenus par cette voie. Plus d'un internaute sur trois s'adonnerait donc, directement ou indirectement, aux joies du P2P et des réseaux associés, avec une préférence marquée pour la musique, puis les films, loin devant les séries ou les jeux vidéo.
20% de pirates en France ?
Avec 17,7 millions de foyers abonnés au haut débit, la France compte aujourd'hui plus de trente millions d'internautes, parmi lesquels 37% auraient donc déjà profité de contenus téléchargés illégalement, selon cette étude réalisée sur un échantillon de mille personnes interrogées en face à face. Ramenée à l'ensemble de la population des 18 ans et plus, la proportion tombe à 26% : 73% des Français seront donc restés jusqu'ici à l'écart du piratage.
Sans surprise, c'est chez les couches les plus jeunes de la population que cette pratique est répandue. 58% des sondés de moins de 35 ans confessent ainsi avoir déjà téléchargé (47%) ou utilisés (11%) des contenus illégaux, contre 30% des plus de 35 ans. Chez les 18-24 ans, la proportion monte à 57%. Au jugé, l'amateur moyen de téléchargement apparait donc comme un homme de moins de 35 ans, actif (35%) ou non (44%). 39% des personnes interrogées reconnaissant avoir déjà téléchargé habitent en ville. 39% également sont titulaires d'un diplôme de l'enseignement supérieur.
Détail insolite : sur le plan politique, 21% des sondés qui disent télécharger ou profiter indirectement de téléchargements illégaux se revendiquent de l'UMP.
Au total, 20% des Français admettraient avoir déjà téléchargé illégalement sur Internet. La musique arrive en tête avec 18%, devant les films (13%), les séries TV (5%) et les jeux vidéo (4%). Chez les « internautes quotidiens », les usages sont sans surprise nettement plus marqués, avec 33% des répondants qui avouent télécharger de la musique, 24% des films, 11% des séries et 7% des jeux vidéo.
Une étude qui légitime l'Hadopi ?
Leitmotiv depuis le mois d'août : 450.000 films seraient téléchargés illégalement chaque jour en France. Avec cette nouvelle étude, le gouvernement dispose d'un argument supplémentaire pour justifier le projet de loi Création et Internet, visant à traiter la grande masse du piratage « de manière pédagogique et préventive », pour reprendre les mots de Franck Riester, rapporteur du texte.
Voté à une très large majorité au Sénat, le texte pourrait toutefois ne pas recueillir les suffrages de l'Assemblée nationale, dont les membres avaient déjà opposé une vive résistance aux modalités de son prédécesseur, la loi DADVSI.
La tâche du gouvernement n'aura rien d'une sinécure puisque même au sein de la majorité, la loi Hadopi soulève quelques dissensions. Afin de mettre toutes les chances de son côté, le ministère de la Culture a indiqué dimanche qu'il adresserait des courriers électroniques quotidiens à chaque parlementaire afin de lui expliquer les enjeux du texte. « Chaque lettre électronique comprendra le témoignage d'un artiste qui s'exprimera sur l'importance de la protection des droits d'auteur et le rôle de cette loi pour sauver la diversité culturelle », a indiqué la rue de Valois dans un communiqué cité par l'AFP.