La plateforme espagnole DonTorrent, qui compterait des millions de visiteurs mensuels, a pu survivre tout en long de 2023 en changeant de nom de domaine presque toutes les semaines.
Depuis plusieurs années, les ayants droit et les autorités mènent une guerre sans merci contre les sites pirates avec un succès relatif. En effet, alors que le téléchargement illégal a significativement diminué durant la dernière décennie, la tendance semble repartir à la hausse depuis 2020.
Si la fragmentation de l'offre légale et une conjoncture économique défavorable peuvent expliquer cette situation, il faut également noter que les pirates paraissent de mieux en mieux organisés pour riposter aux actions menées à leur encontre.
39 nouveaux noms de domaine en 2023
Connaissez-vous par cœur l'URL d'YggTorrent ? Probablement pas, car le site pirate français, qui a émergé après la disparition de T411, change régulièrement de nom de domaine. En effet, il est fréquemment la cible de plaintes, qui conduisent au blocage de son adresse par les fournisseurs d'accès à internet, voire à son déréférencement.
Toutefois, changer de nom de domaine n'est pas très compliqué, et des plateformes comme YggTorrent et DonTorrent n'hésitent pas à le faire. Cette dernière est même devenue experte en la matière, puisqu'elle a changé 39 fois d'adresse au cours de l'année 2023.
Le site espagnol est particulièrement visé par les autorités locales, avec lesquelles il a joué au chat et à la souris à de nombreuses reprises cette année, parfois même chaque semaine. Une situation qui ne semble pas diminuer son trafic, car ses administrateurs font état de millions de visiteurs chaque mois, avec des pics observés lorsque les plateformes de streaming augmentent leurs tarifs.
Une manœuvre bien huilée, mais qui n'est pas sans risque
Pourquoi les mesures prises par les autorités ne semblent-elles pas fonctionner avec DonTorrent ? D'une part, les administrateurs de ce dernier sont réactifs : « Nous n'avons pas de noms de domaine en attente et prêts à être utilisés, nous les enregistrons le jour même où nous voyons le blocage », déclarent-ils. D'autre part, un canal officiel sur Telegram permet à plus de 80 000 abonnés d'être rapidement informés des changements d'adresse. Et, dans le pire des cas, le site dispose d'un domaine en .onion pour être accessible sur le réseau Tor.
Cependant, cette situation n'est pas sans danger pour les utilisateurs. Sans URL stable, il peut être difficile de savoir si le site sur lequel vous vous trouvez est bien celui que vous recherchez. Certains escrocs ont flairé le bon filon en créant des imitations de sites comme YggTorrent ou DonTorrent, dans le seul but de récupérer les informations bancaires de victimes mal informées. Les autorités communiquent d'ailleurs de plus en plus sur cet aspect pour décourager les internautes.
Autre problème, moins grave, lié au changement régulier d'URL : certains éditeurs d'antivirus ont tendance à bloquer les dernières adresses du site espagnol. « Ce qui est amusant, c'est qu'ils s'excusent lorsque nous nous plaignons de ces faux positifs, mais ils ne peuvent pas expliquer ce qui s'est passé », explique DonTorrent. « Ils suppriment les blocages, mais seulement si nous les informons. » Les algorithmes pourraient être en cause, selon nos confrères de TorrentFreak, en tirant la sonnette d'alarme lorsqu'ils constatent une augmentation soudaine du trafic sur un nom de domaine nouvellement créé.
Quoi qu'il en soit, si DonTorrent et YggTorrent survivent avec succès aux mesures mises en place par les autorités, d'autres plateformes ne connaissent pas le même sort, à l'instar de FileWarez qui s'est éteinte le mois dernier. Les ayants droit n'en ont pas fini avec les sites pirates, et tous les moyens seront toujours bons pour les contrer.
Source : TorrentFreak