Projet de loi : droit à l'oubli, mais pas seulement
Dans leur proposition de « loi visant à mieux garantir le droit à la vie privée à l'heure du numérique », les sénateurs Détraigne et Escoffier suggèrent notamment que soit prodiguée dans les établissements scolaires « une information sur les risques liés aux usages des services de communication au public en ligne ».
Pour renforcer le droit à l'oubli, c'est à dire la possibilité pour un internaute de faire disparaitre les traces de ses actes susceptibles de figurer sur les serveurs de services Web auxquels ils auraient eu recours, le projet suggère qu'un individu puisse demander à connaitre l'origine des informations que l'on détient sur lui, mais aussi que le droit « d'opposition » devienne un véritable « droit de suppression », garanti et sans frais. En parallèle, il propose de renforcer le pouvoir de sanction ainsi que les possibilités d'actions juridictionnelles de la Cnil.
La portée du texte ne s'arrête toutefois pas à ces dispositions concrètes. Le projet veut également régler la question de l'adresse IP, en lui conférant une bonne fois pour toute le statut de donnée personnelle, remis en cause par différents avis juridiques. L'intérêt, selon ses auteurs, est que l'internaute bénéficierait ainsi sans restriction des protections garanties par la loi « informatique et libertés » et par la Cnil. La question reste délicate, dans la mesure où une adresse IP identifie un accès à Internet, mais pas forcément un individu. Une décision ne serait donc pas sans répercussions sur d'autres dossiers à commencer, sans doute, par la loi Hadopi.
La proposition envisage également la question des fichiers de données personnelles conçus et utilisés par les forces de police, dont la création et la définition devrait selon les auteurs incomber de façon exclusive au pouvoir réglementaire, sans passer de façon systématique par la case parlementaire.
Une charte plutôt qu'une loi ?
Pour Nathalie Kosciusko-Morizet, il n'est pas indispensable de légiférer. La secrétaire d'Etat se dit en faveur d'une charte à laquelle adhèreraient les éditeurs de services en ligne, et imagine un dispositif de labellisation grâce auquel l'internaute saurait s'il évolue dans un espace « anonyme » ou au contraire dans une zone où des données sont susceptibles d'être recueillies à son sujet. « Chaque site déterminera dans lequel de ces espaces il voudra être labellisé », explique NKM à Libération, « Vous saurez ainsi quels types de garanties ont été demandés aux autres internautes ».
Dans un cas comme dans l'autre, cette question du droit à l'oubli reste particulièrement délicate. Il faut en effet gérer d'un côté les traces que l'internaute laisse volontairement en ligne (messages sur un forum, publications sur un réseau social, etc.), mais aussi les colossaux volumes de données que représentent les logs de connexion, les cookies et autres dispositifs d'analyse.