Patrick Drahi, propriétaire de Altice et SFR, cherche à alléger la dette de l'opérateur en demandant à ses prêteurs de renoncer à une partie de leurs créances. La démarche est vue comme une provocation par ces derniers.
Les mondes des télécoms et des finances retiennent leur souffle alors que Patrick Drahi, le magnat des télécoms, cherche désespérément à remanier la dette gargantuesque de son empire Altice France, propriétaire de SFR, estimée à 24,3 milliards d'euros. Cette situation précaire incite l'homme d'affaires à solliciter une réduction de dette auprès des prêteurs. Sauf que le geste a été reçu avec indignation et est qualifié de « chantage » par ces derniers. Patrick Drahi se retrouve au pied du mur.
Pour Altice et sa dette astronomique, la restructuration se fait sous tension
Les signaux envoyés par Altice sont tout sauf bon en ce moment. De la fin de la période promotionnelle proposée aux clients fixes de SFR en passant par les résultats catastrophiques de l'opérateur au carré rouge, qui a encore perdu des centaines de milliers d'abonnés l'an dernier, les temps sont durs.
La semaine dernière, Altice France a aussi lancé une opération de restructuration de sa dette, dette jugée insoutenable alors que SFR subit cette hémorragie de clients depuis plus d'un an et demi. Pour assurer un avenir plus stable à l'opérateur, Altice estime nécessaire de réduire la dette à environ 16 milliards d'euros, soit une diminution de 8 milliards par rapport au niveau actuel.
Cependant, la proposition d'Altice inclut une condition qui a déclenché un tollé parmi les prêteurs : ces derniers devraient abandonner une part de leurs créances, autour de 30%. L'effort, ou plutôt l'exigence, a été perçu comme une provocation, les prêteurs se sentant pris en otage dans cette situation intenable.
Chez les créanciers de SFR, la résistance s'organise
Les créanciers, qui sont majoritairement des fonds spécialisés dans la dette risquée, ont réagi avec fermeté, voire hostilité, à la demande de Patrick Drahi. Plusieurs d'entre eux ont uni leurs forces en engageant des experts financiers et juridiques pour élaborer une stratégie de résistance. On les dit déterminés à ne pas céder aux pressions d'Altice et résolus à défendre leurs intérêts.
Cette bataille financière ne fait qu'ajouter à l'incertitude chez SFR. Alors que les dirigeants de l'opérateur prévoient une année 2024 aussi difficile que la précédente, les salariés redoutent de nouvelles conséquences et changements, surtout après l'arrivée de nouveaux membres à la direction.
Cette lutte pour la survie financière de SFR soulève des questions cruciales quant à l'avenir de l'opérateur et de son propriétaire, Patrick Drahi. Si le milliardaire a réussi par le passé à négocier des accords complexes pour surmonter des crises similaires (comme celle de Numéricable), l'issue est ici incertaine. Et ce ne sont pas les ventes des parts de La Poste Mobile (autour d'1 milliard d'euros) et de la branche Altice Média (BFMTV et RMC) (environ 1,55 milliard d'euros) qui apaiseront les créanciers.
12 décembre 2023 à 11h26
Source : Le Monde