Drogue, attaques DDoS : la plus grande marketplace du Dark Web vient d'être démantelée

Clap de fin définitif pour Bohemia/Cannabia. Après une enquête concertée, la police néerlandaises vient officiellement de fermer l'une des plus vastes marketplaces du dark web.

Les autorités néerlandaises, en étroite collaboration avec des agences internationales, ont récemment réalisé une percée majeure dans la lutte contre la cybercriminalité en démantelant Bohemia/Cannabia, un marché de drogues actif sur le dark web, initialement spécialisé dans la vente de cannabis. Deux individus soupçonnés d'être les administrateurs de cette plateforme ont été arrêtés : un Britannique de 20 ans et un Irlandais de 23 ans. Cette opération a aussi permis de saisir des actifs virtuels d'une valeur estimée à 8 millions d’euros et souligne l'intensification de la coopération internationale dans la lutte contre les activités illégales en ligne.

Bohemia/Cannabia : un business lucratif sur le dark web

Bohemia/Cannabia, ouvert depuis 2021, s’était rapidement imposée comme un marché de référence sur le dark web pour les produits dérivés du cannabis. Contrairement à d’autres plateformes de vente illégale de substances, ce site se distinguait par sa spécialisation dans le cannabis, attirant ainsi une clientèle fidèle et générant en moyenne 67 000 crypto-transactions par mois. De manière plus sporadique, on y trouvait aussi de quoi mener des attaques DDoS et des exploits. Au plus haut de sa forme, en septembre 2023, le site aurait enregistré un volume de transactions estimé à 12 millions d’euros. Un succès d’ampleur qui l’a aussi placé dans le viseur des autorités.

C’est à partir de la fin de l’année 2022 que les services de police néerlandais ont commencé à surveiller de près ce marché, catalogué comme l’une des cibles prioritaires de leurs enquêtes sur le dark web. Par ailleurs, la nature même de Bohemia/Cannabia, centrée sur un seul produit, le rendait relativement plus identifiable et plus traçable par les outils de détection numérique spécialisés dans la cybercriminalité.

Ces opérations de surveillance intense ont abouti, fin 2023, à la fermeture soudaine du site, peu de temps après des rumeurs d'« exit scam », ou « arnaque de sortie », une technique utilisée par les administrateurs pour fermer leurs services en empochant les fonds restants des utilisateurs. Des rumeurs avaient alors évoqué des pannes de service intentionnellement générées par un développeur malveillant. À l’issue de l’escroquerie, les fondateurs de la plateforme se sont partagé l’argent de la caisse, ce qui a permis aux autorités de tracer les montants et d’identifier les deux individus.

Une opération internationale coordonnée gagnante

La collaboration des forces de police néerlandaises avec les autorités irlandaises, britanniques et américaines marque un exemple de coopération internationale indispensable pour contrer les organisations criminelles opérant en ligne. Dans ce cas précis, cette coordination a permis d'intervenir simultanément dans plusieurs lieux et d’arrêter rapidement les suspects principaux. Le premier, un Britannique de 20 ans arrêté en juin dernier à l’aéroport d’Amsterdam, a comparu cette semaine devant le tribunal de Rotterdam, tandis que le second, un Irlandais de 23 ans interpelé en août dernier à Dublin, est toujours en détention provisoire.

Outre les arrestations, l'opération a permis de saisir des actifs numériques, valorisés à environ 8 millions d’euros, ainsi que l’ensemble des données contenues par les serveurs web, crypto et de bases de données. D’après la police néerlandaise, la collecte et l'analyse des données financières et transactionnelles, notamment, pourraient permettre aux enquêteurs de retracer l’historique des paiements, d’identifier d’autres complices, voire de remonter la chaîne d’approvisionnement du cannabis vendu sur la plateforme.

Le démantèlement de Bohemia/Cannabia s’inscrit dans une série d’opérations ciblant des plateformes similaires sur le dark web. Au cours des dernières années, les forces de l'ordre ont mis hors service de nombreux marchés illégaux. En mars dernier, c’est Nemesis qui tombait, alors que les autorités allemandes annonçaient avoir saisi l’intégralité de l’infrastructure de la plateforme, quatre mois seulement après avoir mis un terme à une autre marketplace d’ampleur baptisée Kingdom Market.

On rappelle également qu’en septembre dernier, une enquête des médias allemands Panorama et STRG_F avaient aussi révélé que des opérations de coopération internationale avaient permis aux autorités d’infiltrer Tor de manière inédite, en vue de désanonymiser une partie du réseau.

Sources : Politie, The Record, Dark Web Informer,