Leboncoin et six groupes médiatiques français ont décidé de traîner Google devant la justice et d'obtenir réparation pour abus de position dominante dans la publicité en ligne, avec à la clé une demande de 27 millions d'euros de dommages et intérêts.
Sur Leboncoin, seules les annonces sont petites. Le culot de la plateforme d'achat et de vente de biens d'occasion est plutôt énorme. C'est une véritable coalition de poids qui s'est créée derrière elle et qui n'a pas peur de défier Google en dénonçant ses pratiques anticoncurrentielles. Il s'agit de rééquilibrer un marché publicitaire sur lequel le moteur de recherche règne en maître absolu.
Au fil du temps, Google a créé un système qui étouffe ses concurrents dans la publicité en ligne
Le coup est bas et calculé. Google a transformé son infrastructure publicitaire en véritable machine de guerre économique en utilisant sa position centrale pour étouffer toute forme de concurrence. Dans le mécanisme des enchères publicitaires, le géant des GAFAM dispose d'un avantage déloyal : sa technologie lui permet de voir toutes les offres concurrentes avant de s'aligner précisément sur leurs prix.
L'Autorité de la concurrence l'a déjà confirmé en 2021 : Google accorde un traitement préférentiel à ses propres technologies, notamment avec son adserver DoubleClick. Le groupe américain peut ainsi observer les stratégies de ses rivaux, anticiper leurs mouvements et ajuster ses prix pour remporter systématiquement les contrats publicitaires. Grâce à ce système, Google peut capter une part disproportionnée des revenus.
Pour Leboncoin, le préjudice est clair. Avec 30,2 millions de visiteurs uniques mensuels, le site pèse sur le Web français. Mais malgré sa forte audience, il se retrouve piégé dans un écosystème où Google dicte les règles. Au premier trimestre 2024, le chiffre d'affaires publicitaire d'Adevinta (maison mère de Leboncoin) affichait déjà une baisse de 7 %, conséquence directe de ces pratiques anticoncurrentielles.
Cette bataille juridique pourrait transformer définitivement le marché de la publicité numérique
La coalition menée par Leboncoin va bien plus loin que l'action en justice. C'est un rapport de force qui s'engage contre un mastodonte considéré comme intouchable. En plus d'Adevinta, six groupes médiatiques français, Le Figaro, Prisma Media, CMA Média, SIPA-Ouest-France, Les Échos-Le Parisien et L'Équipe, ont décidé de faire front commun.
L'enjeu dépasse largement les 27 millions d'euros réclamés. Il s'agit de défendre un modèle économique où les éditeurs de contenu peuvent survivre face aux géants de la tech. Google a déjà été sanctionnée à hauteur de 220 millions d'euros en 2021, mais ces amendes semblent dérisoires face aux milliards générés par la publicité en ligne.
Selon L'Informé, les procédures s'annoncent longues : deux à trois ans sont déjà envisagés pour cette bataille judiciaire. Mais les médias français sont déterminés. Ils ne sont plus prêts à subir sans réagir, conscients que chaque décision de justice peut créer un précédent. Google tremble : les procédures s'accumulent désormais au Royaume-Uni, dans l'Union européenne et aux États-Unis. Quand l'histoire de David et Goliath n'est plus tout à fait un mythe…
Source : L'Informé (sur abonnement)