Mardi 24 janvier, le Département de la Justice américain, accompagné de 8 États, a inculpé Google pour abus de position dominante. Il appelle au démantèlement des activités publicitaires de l’entreprise.
Si Google a l’habitude des poursuites judiciaires et de la régulation, il se pourrait que cette affaire soit bien différente.
Google a l’habitude des réprimandes
En Europe, la firme de Mountain View s’est déjà vu infliger trois amendes à plus de 1 milliard d’euros, dont une record à 4 milliards pour avoir « imposé des restrictions illégales aux fabricants d’appareils mobiles Android et aux opérateurs de réseaux mobiles afin de consolider la position dominante de son moteur de recherche ».
Aux États-Unis, plusieurs poursuites antitrust ont été lancées à son encontre, notamment une menée par le Département de la Justice depuis 2020 et ciblant le moteur de recherche de l’entreprise. Cette dernière est accusée d’avoir dépensé des milliards de dollars afin de faire de Search le moteur de recherche par défaut sur les navigateurs comme Safari.
Jusqu’alors néanmoins, Google parvenait à s’en sortir sans trop d’efforts, en écopant d’amendes qui, si elles paraissent conséquentes, ne sont pas vraiment préjudiciables à ses activités. Le géant américain devrait en effet enregistrer 73,8 milliards de dollars de revenus publicitaires numériques en 2023.
L’activité publicitaire de Google au cœur de la plainte
La nouvelle plainte du Département de la Justice pourrait toutefois changer la donne. Elle demande le démantèlement de l'activité de technologie publicitaire de Google en raison d'une supposée monopolisation illégale du marché de la publicité numérique. Il s’agit de l’un des très rares cas où l’entité demande le démantèlement d’une entreprise depuis le système de télécommunications Bell dans les années 80.
Le gouvernement américain s’en prend directement à la manière de faire de Google, et particulièrement aux frais imposés aux annonceurs qui lui permettent de conserver 30 centimes sur chaque dollar dépensé sur les échanges de publicité. Concrètement, les éditeurs versent 30 % de leurs revenus à Google pour chaque publicité diffusée, ce qui représente une taxe importante pour les éditeurs numériques en difficulté.
Le gouvernement affirme même avoir été lui-même victime de cette pratique, en étant surfacturé de 100 millions de dollars pour des dépenses en publicités en ligne consacrées à des agences fédérales, dont l'armée.
Cette fois, le Département de la Justice est prêt
De son côté, la firme de Mountain View assure que le Département de la Justice ne se rend pas compte de l’extrême concurrence exercée sur le marché de la publicité en ligne. « Le Département de la Justice redouble d'arguments erronés qui ralentiraient l'innovation, augmenteraient les frais publicitaires et rendraient plus difficile la croissance de milliers de petites entreprises et d'éditeurs », assure l’entreprise.
Pourtant, seules trois firmes s'empareront de la majorité des dépenses publicitaires numériques aux États-Unis cette année. Google touchera une grande partie du total, selon la société d’études eMarketer, et sera suivie de Meta et d’Amazon.
Cette fois, les arguments du Département de la Justice sont très robustes et s'appuient sur des faits préjudiciables pour Google. Il enquête en effet sur l’entreprise depuis plusieurs années déjà et a pu analyser ses pratiques de fond en comble à la suite des plaintes précédentes. L’affaire risque toutefois de s’étaler sur des années, mais si le gouvernement gagne, les répercussions sur Google risquent d’être bien plus gênantes que des amendes minimes comparées à son chiffre d’affaires colossal.
Source : The Verge