La stratégie d'Amazon pour forcer le retour au bureau se retourne contre l'entreprise. Alors que le géant du e-commerce souhaitait imposer cinq jours de présence hebdomadaire dès janvier 2025, plusieurs sites américains ne disposent pas d'espaces suffisants pour accueillir tous les employés.
Le bras de fer engagé par Amazon contre ses 300 000 salariés bascule à nouveau, on dirait. En septembre, l'entreprise avait annoncé la fin brutale du télétravail et obligeait tous les employés à revenir au bureau cinq jours par semaine dès janvier 2025.
Une décision unilatérale et non négociable annoncée alors par Andy Jassy, le P.-D.G., qui insistait sur l'importance du présentiel pour « inventer et collaborer ». Mais la réalité rattrape la philosophie. Les bureaux du géant de Seattle, dimensionnés pour une organisation hybride, ne sont tout simplement pas assez grands pour accueillir l'ensemble du personnel en même temps.
Le retour en force du présentiel se heurte aux murs des open spaces chez Amazon
Les calculs ne sont pas bons, Amazon. Dans sept métropoles américaines, dont Manhattan, Dallas, Austin et Phoenix, l'entreprise reconnaît ne pas disposer d'infrastructures adaptées pour le retour massif de ses équipes. Les premiers signaux d'alerte étaient déjà visibles : cantines saturées, salles de réunion insuffisantes, bureaux partagés devenus la norme. Dos au mur, le groupe est contraint de repousser l'échéance jusqu'en mars 2025, voire au-delà pour certains sites, faute de pouvoir pousser les murs. On aurait pu s'attendre à un peu plus d'anticipation.
L'ironie de la situation n'échappe à personne : alors qu'Amazon cherchait à ramener ses troupes sur site, le marché immobilier de bureaux entre en tension. Les locaux vacants pendant la pandémie sont désormais pris d'assaut par les entreprises de la tech et mettent un coup d'arrêt aux extensions rapides des espaces de travail.
Voilà donc Amazon, obligée de revenir à l'organisation hybride qu'elle souhaitait pourtant enterrer.
Les employés voient dans cette volte-face une tentative de licenciements déguisés
Sauf que la pilule du retour obligatoire ne passe pas. Les salariés d'Amazon, habitués à une flexibilité croissante depuis la pandémie, perçoivent cette nouvelle politique comme une régression. Certains avaient organisé leur vie personnelle autour du télétravail, et avaient même déménagé loin des bureaux. D'autres y voient une stratégie managériale pour le moins contestable : forcer le retour au bureau pour pousser naturellement vers la sortie les employés réfractaires, et éviter ainsi le versement d'indemnités de licenciement.
Et ce ne sont pas les déclarations de Matt Garman, directeur d'Amazon Web Services, qui auront apaisé les tensions et ramené le troupeau docile vers la bergerie. « Si certaines personnes ne travaillent pas bien dans cet environnement et ne veulent pas le faire, ce n'est pas grave, il existe d'autres entreprises », avait-il affirmé, publiquement.
Autant dire que ces quelques mois de répit représentent une forme de préavis pour celles et ceux qui ont tout organisé autour du télétravail.
06 novembre 2024 à 10h22