Parmi ces propositions, le candidat à l'élection présidentielle annonce que : « Toute personne qui consultera de manière habituelle des sites qui font l'apologie du terrorisme ou qui appellent à la haine et à la violence sera punie pénalement ». Cela signifie donc qu'un internaute pourrait, si la mesure est acceptée par l'ensemble des acteurs concernés (techniques, politiques...), être accusé d'avoir une conduite contraire au bon fonctionnement de la société.
Toutefois, le chef de l'Etat ne donne aucun détail sur la mise en œuvre d'une telle mesure. Tout d'abord, il ne précise pas comment qualifier juridiquement ces sites « qui font l'apologie du terrorisme ». En effet, certaines organisations politiques (par exemple) peuvent être considérées comme terroristes par certains Etats et être acceptées par d'autres. Il ne donne pas non plus de précisions sur la fréquence de consultation de ces plateformes et parle seulement de navigation « de manière habituelle ».
Par contre, le Droit français dispose déjà d'armes juridiques pour des infractions relatives à des sites jugés contraires à l'ordre public et relevant par exemple de la pédopornographie. L'article 5 de la Loppsi 2 condamne à 3 ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende le fait de diffuser y compris par Internet des messages « à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine ou à inciter des mineurs à se livrer à des jeux les mettant physiquement en danger » lorsque ce message est susceptible d'être vu ou perçu par un mineur. Il est donc possible que le chef de l'Etat puisse demander aux élus de réfléchir à une extension du champ de la Loppsi aux sites considérés comme terroristes.
Reste la question de la manière selon laquelle tout internaute pourrait être surveillé. Là encore, le manque de précisions de la part du Président de la République peut laisser la porte ouverte à toutes les suppositions. Toutefois, l'implémentation de solutions lourdes comme le DPI (Deep Packet Inspection) pourrait être sévèrement critiqué non seulement par une partie de la classe politique mais surtout par la justice constitutionnelle et européenne.
En effet, en novembre dernier, la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) a rendu un jugement au sujet du filtrage de contenus par un FAI. Elle a considéré que cette obligation était contraire au droit communautaire lorsqu'elle imposait à l'opérateur la mise en place d'un système de surveillance généralisée de son réseau. Un FAI ou un réseau social (selon une seconde décision de la CJUE) ne peuvent donc pas filtrer de manière générale l'activité de leurs abonnés. A jurisprudence constante, la juridiction pourrait donc invalider ce type de régulation généralisée des communications en ligne.