VideoLAN a donné jeudi le coup d'envoi d'un projet de levée de fonds participative dédié au lecteur multimédia vedette VLC par l'intermédiaire de KickStarter. Elle ambitionne de réunir entre trente jours 40 000 livres (soit près de 50 000 euros). L'objectif affiché tient en deux propositions : développer une nouvelle interface qui colle avec les canons esthétiques définis par Microsoft au sein de l'environnement spécifique à Windows 8 et sachant donc tirer parti du tactile puis, dans un second temps, parvenir à développer une version de VLC qui soit en mesure de fonctionner sur Windows RT, la version du système dédiée aux tablettes et terminaux équipés d'un processeur ARM. Corollaire de cet objectif : l'application VLC ainsi créée devra faire son entrée sur le Store applicatif de Microsoft (le Windows Store), puisque Windows RT n'autorise que ce biais pour l'installation de nouveaux logiciels.
Aujourd'hui, le client VLC pour Windows fonctionne parfaitement sous Windows 8, mais comme toutes les applications destinées au Bureau traditionnel, il n'est pas en mesure de s'intégrer proprement à l'environnement qui sert d'écran d'accueil au système, lequel n'accepte que les logiciels spécifiquement conçus pour cette « Expérience Utilisateur » particulière. Le filtre s'opère au niveau de la soumission au Windows Store, où pour être validé, un logiciel doit respecter un certain nombre de principes esthétiques et ergonomiques définis par Microsoft (voir vidéo plus bas).
Depuis 2001, les ressources financières de VideoLAN reposent essentiellement sur les dons des utilisateurs satisfaits, mais ceux-ci ne seraient pas suffisants pour réaliser un tel projet dans un laps de temps limité. « Cette levée de fonds est lancée pour permettre aux membres expérimentés de l'équipe VideoLAN de travailler à plein temps sur ce nouveau portage. En cas de succès, elle nous permettra également de recruter des designers professionnels pour concevoir une interface utilisateur belle et claire », explique l'association sur la page dédiée au projet.
Une première donc, qu'elle dit motivée par la volonté de permettre à VLC d'atteindre « autant d'utilisateurs que possible, et de proposer une installation et un processus de mise à jour cohérents ». Felix Paul Kühne, responsable des branches OS X et iOS, évoque le recrutement de deux développeurs à plein temps, pour un projet que l'équipe ambitionne de boucler en trois mois. Ces deux développements (Windows 8 puis Windows RT) doivent offrir la même richesse fonctionnelle que l'actuel VLC, avec lecture des DVD ou des Blu-ray non protégés.
VLC et les App Store, une histoire de je t'aime moi non plus sur fond de (L)GPL
On se souviendra que VLC avait fait une brève incursion sur l'App Store d'Apple, avec une version iOS développée par Applidium, avant d'en sortir début 2011, au motif que les conditions d'utilisation de la plateforme d'Apple entraient en conflit avec la Licence publique générale GNU (dite GPL) qui protège le code des principaux composants du lecteur. Les termes de cette dernière, assimilés à un vrai copyleft, prévoient en effet notamment que tout logiciel qu'elle protège puisse être librement copié et redistribué, ce qui ne correspond pas exactement au fonctionnement de l'App Store tel que le connait l'utilisateur final.
Quelques mois plus tard, VideoLAN annonçait son intention de basculer vers une autre licence, la LGPL ou Licence publique générale limitée GNU. A l'époque, l'association indiquait par la voix de Jean-Baptiste Kempf avoir décidé ce changement afin de répondre aux évolutions du marché de la vidéo et de favoriser la diffusion de VLC comme support open source et multi-plateforme, sans mentionner spécifiquement la question des App Store.
La licence LGPL permet cependant de lier au sein d'une même application du code LGPL à des pans de code répondant à un régime différent (propriétaire par exemple), sans que l'un ne contamine l'autre. Une fois VLC passé sous LGPL, il devient donc plus facilement envisageable d'en réaliser un portage répondant à des contraintes commerciales... ou à une distribution encadrée.
Officiellement, il n'était pas question ici de préparer le terrain à l'entrée de VLC sur les App Store (la LGPL soulève d'ailleurs des problèmes assez proches de ceux posés par la GPL dans ce contexte comme le remarquent certains commentateurs, circonspects face à ce changement), mais la migration vers la LGPL a quoi qu'il en soit été bouclée, et c'est elle qui régira les développements et bibliothèques de bas niveau spécifiques à ce portage vers Windows 8 et Windows RT. Le code associé à l'interface devrait quant à lui être régi par la GPL (v2+) à moins que le Windows Store n'impose des exceptions.
En dépit de ces choix de licence, VideoLAN avertit qu'un certain nombre de risques sont à prendre à compte, à commencer par la possibilité que VLC pour Windows 8 ne puisse être accepté sur le Windows Store, en raison notamment d'appel à des interfaces (API) dont l'utilisation est prohibée par Microsoft. Le développement de la version ARM (Windows RT) posera quant à lui d'importants challenges techniques, le socle écrit en langage C de VLC ne se prêtant pas particulièrement aux outils de développement imposés par l'éditeur (Visual Studio).
Jeudi en fin d'après-midi, le projet avait recueilli environ 1 150 livres sur les 40 000 livres recherchées. Rappelons que d'après VideoLAN, VLC est installé sur plus de 100 millions d'ordinateurs à travers le monde.