La propulsion nucléaire pour les fusées revient sur le devant de la scène ! Pour les besoins de futures missions, en particulier vers Mars, la NASA et la DARPA s'associent pour développer et tester un moteur-fusée de nouvelle génération, qui utilisera un petit réacteur à fission. Démonstration prévue d'ici 2027 environ.
Il y a fort à parier que de nombreuses associations vont monter au créneau.
Je vais en parler à mon Père !
Le projet s'appelle DRACO, pour « Demonstration Rocket for Agile Cislunar Operations », un nom très pompeux et qui étrangement cache la nature même du moteur-fusée à l'étude entre la NASA et la DARPA, l'agence de recherche de la défense américaine. Car il s'agit bien ici de développer un moteur-fusée nucléaire, dont le principe, connu, s'appelle NTP (Nuclear Thermal Propulsion).
Techniquement, un petit réacteur à fission est utilisé pour chauffer à très haute température un ergol, générant un maximum d'énergie récupérée ensuite en poussée en éjectant les gaz à travers une tuyère, comme dans un moteur-fusée classique. Une méthode qui n'est pas si complexe sur le papier, et qui pourrait apporter à la fois puissance et rendement (jusqu'à trois fois mieux qu'un moteur-fusée « classique » !).
Toutefois, un NTP demande des études très précises, car l'architecture est différente d'un moteur classique… Et surtout, il nécessite l'accès à des petits réacteurs nucléaires à fission pour lesquels même les grands noms de l'industrie doivent passer par les instances étatiques. Avec DRACO, les deux agences américaines veulent lever ce verrou et développer à la fois un moteur et un démonstrateur.
Direction l'orbite
Avec DRACO, il ne s'agit pas que de montrer les capacités de cette technologie de rupture lors de tests au sol, même s'ils seront nécessaires. La DARPA va diriger les efforts de développement, l'aspect sécurité et la gestion des partenaires industriels, tandis que la NASA va offrir l'accès à ses infrastructures, mais aussi à ses équipes qui prépareront un premier vol de démonstration, pour l'instant prévu en 2027… On sait néanmoins que ce genre de nouvelle technologie peut vite prendre quelques années de retard, en particulier autour du nucléaire.
DRACO décollera à destination de l'orbite basse, et n'opérera qu'entre 700 et 2 000 kilomètres d'altitude environ : pas question de risquer sa descente et sa désintégration à travers l'atmosphère. La propulsion NTP elle-même ne génère pas de gaz ou d'éjections radioactifs, mais il faudra évidemment préparer le moteur aux potentielles collisions de micrométéorites ou débris spatiaux, à un risque d'échec au décollage, etc.
Des oppositions vont se faire entendre
S'il est technologiquement attrayant, en particulier dans l'optique de voyages futurs vers le lointain et pour l'aventure de l'humain vers Mars (objectif déjà annoncé pour DRACO), le moteur-fusée à fission nucléaire doit aussi compter sur un important support politique. En effet les risques associés ne manqueront pas de faire réagir les associations antinucléaires, mais aussi d'autres nations qui ne sont pas nécessairement en phase avec les États-Unis et qui ne manqueront pas de voir ce développement d'un mauvais œil.
La gestion de la fin de mission sera scrutée en particulier. Mais ce n'est pas encore à l'ordre du jour. D'ici là, NASA et DARPA vont surtout avancer de concert pour passer de la théorie à la pratique, avec l'aide des industriels américains. L'an dernier la DARPA avait sélectionné Blue Origin, General Atomics et Lockheed Martin pour des designs préliminaires, et la NASA avait de son côté des études parallèles avec BWX Technologies, General Atomics et USNT (Ultra Safe Nuclear Technologies). Les lignes bougent : l'agence américaine poursuit aussi ses efforts dans d'autres technologies, comme les prometteurs moteurs à détonation, qui ont récemment montré des progrès.
Source : NASA