Cyril Moutran est PDG de Twazzup, une startup qui a développé une technologie de recherche en temps réel dans les flux d'information comme Twitter. Basé dans la baie de San Francisco, il nous a expliqué son idée, sa vision de l'entrepreunariat dans la Silicon Valley et de l'implantation des entrepreneurs français.
Bonjour Cyril Moutran. La recherche en temps réel sur des flux Twitter... L'idée n'a-t-elle pas été cannibalisée par Google ?
Nous n'avons pas le même but que la recherche en temps réel sur Google, même si elle intègre aussi les flux Twitter. Notre rôle est de donner une vision globale et éditorialisée d'un sujet. Prenons l'exemple de la récente crise en Iran. C'est un événement intéressant, dans le sens où aucune couverture journalistique sérieuse n'a été possible. Les principales sources d'information étaient donc les sites de micro-blogging, les blogs, les réseaux sociaux. Une recherche sur le sujet dans Google permettait effectivement d'obtenir les derniers tweets sur le sujet, mais c'est un flot en temps réel non contrôlé. Sur Twazzup, nous pouvons éditorialiser, dans le sens où notre algorithme prend en compte certains paramètres : il est ainsi possible de voir les messages les plus pertinents. Proviennent-ils d'influenceurs, de membres particulièrement actifs, de médias connus ? De même, nous pouvons faire remonter les liens les plus partagés sur un sujet donné.
Autre usage possible : le entreprises peuvent surveiller leur marque. Avec le besoin croissant de marketing, elles doivent être capables d'être vigileantes sur les médias sociaux, qu'elles souhaitent lancer un nouveau produit ou comprendre l'image de leur marque auprès du grand public. Cette partie marche très bien, même si ce n'est pas l'usage le plus fréquent que nous remarquons pour Twazzup.
Pourquoi être venus dans la Silicon Valley pour mettre sur pied ce projet ?
Pour ma part, je suis venu en 1997, car j'avais trouvé un travail chez Netscape. J'avais réalisé ma troisième année d'école aux Etats-Unis, et je suis resté dans la vallée pour Netscape. L'un de mes deux associés à suivi à peu près le même parcours, et le troisième faisait du consulting en France avant d'arriver. Nous avons trouvé dans la Silicon Valley un endroit plein d'opportunités, qui nous a permis de développer notre garage startup. Nous avons passé du temps à chercher un produit lançable autour du concept de média social, en réalisant différents essais. Nous avons d'ailleurs lancé plusieurs choses, avant d'arriver à Twazzup.
Il y a un côté plus souple ici. Des grosses entreprises n'ont pas peur de prendre des risques avec des petites. Dans la tête des entreprises importantes, il y a une réelle culture de l'innovation. Par exemple, nous travaillons avec Disney pour leur gestion de la main d'oeuvre temporaire. Alors que nous sommes une startup de trois personnes, sans financement externe pour l'instant ! Je ne dis pas que ça concerne toutes les sociétés ici, mais certaines sont très créatives.
S'il y a des opportunités, il y a aussi beaucoup de risques... Vous n'êtes pas effrayé par la concurrence de la vallée ?
Il y a beaucoup de risques, mais c'est le côté darwinien de la chose. Au départ, tout le monde est un petit poisson dans une mer dangereuse... Mais ça ne peut que nous forcer à faire mieux. Et s'il y a de la concurrence, il y a aussi beaucoup d'argent. Quand on regarde les capitaux-risqueurs ici, on voit qu'ils investissent de plus en plus dans les startups. Pourtant, aux débuts d'une entreprise, il n'y a pas forcément besoin de 3 ou 4 millions de dollars. Tout le monde s'adapte : puisque créer une entreprise coûte moins cher, les business angels investissent plus de petits tickets dans plus d'entreprises.
Dans notre écosystème particulier, il y a beaucoup d'entreprises. Autour de Twitter... C'est très populaire, mais pour autant, on voit que la croissance du site plafonne un peu aux Etats-Unis. Il manque quelque chose pour aller au pallier suivant. C'est la stratégie que nous essayons d'adopter à Twazzup. Chercher différentes approches, jusqu'à trouver le bon produit qui marche, le faire grossir, arriver à un pallier, débloquer ce pallier avec l'ingrédient qui manque, et repartir à la hausse, etc. Pour l'instant, nous sommes encore en phase de croissance douce, mais nous allons trouver cette clé.
La Silicon Valley attire les Français, et on dit aussi que la Silicon Valley aime bien les Français. Est-ce vrai ?
Il y a beaucoup de Français car le système d'éducation est très bon. Quand un ingénieur ou autre sort d'une école française, il est très bien armé. Et quand il arrive ici, il n'y a pas de problème. Pas au niveau des compétences, en tous cas. Car toute la question, c'est de parvenir à conserver sa motivation intacte, comment rester créatif, comment prendre des risques.
La question de la barrière linguistique n'est pas vraiment un problème. Il suffit de se lancer, c'est avant tout une question de communication. Et une fois lancé, il y a ici beaucoup d'opportunités pour rencontrer des gens, qu'ils soient ingénieurs, développeurs, entrepreneurs, investisseurs... Le tout est d'avoir en tête qu'il faut garder l'envie d'innover.
Je vous remercie.