Pierre Hiraclides, bonjour. Oxygem met en avant une activité d'édition de sites, mais aussi divers services relevant du conseil ou du marketing. Comment doit-on vous décrire ?
Oxygem est avant tout un groupe de médias en ligne, basé à Roubaix et à Paris. Il regroupe aujourd'hui six filiales (et environ 120 personnes) : trois sont des pôles média et trois sont des pôles de services, qui sont avant tout dédiés à nos médias même s'ils s'adressent aussi à une clientèle externe. Notre stratégie est avant tout celle du contenu : unique, authentique, à forte valeur ajoutée.
Notre développement passe aujourd'hui par la thématique de la vie pratique quotidienne. Internet regorge d'informations, et rend de façon générale le consommateur plus intelligent, mais c'est aussi un monde très vaste, avec des contenus de niveaux très différents. Nous pensons que d'ici cinq ans, les sites qui resteront seront ceux qui ont pris le parti de la qualité.
Dans ce contexte, on essaie que chacun de nos sites soit l'un des trois premiers sur sa thématique dans sa zone géographique. Aujourd'hui, nous éditons donc des marques comme Cuisine AZ, Météocity qui propose des services de géolocalisation ou, plus récemment, Passeportsanté. Tous nos contenus sont accessibles gratuitement.
Que représentent ces marques en termes d'audience et de chiffre d'affaires et quels sont vos objectifs ?
Elles nous permettent de réunir 8 millions de visiteurs uniques par mois et de cumuler près de 5 millions d'abonnés à nos newsletters. Nous avons réalisé en 2010 un chiffre d'affaires de 12,4 millions d'euros.
Nous ne communiquons pas d'objectifs chiffrés, mais on ambitionne de passer d'ici cinq ans à une dizaine de marques, toujours inscrites dans cette optique de la vie pratique, avec à chaque fois l'objectif d'être dans les trois premiers sur la thématique concernée.
Une part de votre activité provient des filiales en charge des services. L'objectif est-il d'opérer une diversification pour compléter l'activité média ?
Nous avons effectivement une activité services, avec une agence en conseil marketing, Like Interactive, qui fait du conseil en acquisition et en fidélisation d 'audience. Mindbase fait du data mining et de l'enrichissement de bases de données, ce qui permet de partir sur des campagnes d'emailling très ciblées. Odiso est notre troisième société, spécialisée dans l'hébergement de sites média et de sites e-commerce. Enfin, Mobilis Digital, qui fonctionne en mode startup, fait du conseil en stratégie mobile.
Ces sociétés viennent avant tout soutenir notre activité média, même si Like Interactive réalise 80% de son chiffre d'affaires à l'extérieur. Elles nous apportent une expertise dont on ne pourrait pas se passer : notre modèle économique fait que l'on doit avoir des audiences fidèles, qui grossissent et que l'on connait bien. L'hébergement est aussi stratégique, puisqu'il nous faut des sites capables d'absorber des pics de trafic ou d'encaisser le développement de la vidéo. Aujourd'hui, 70% du chiffre d'affaires groupe proviennent de l'activité média.
Qui dit site média dit dépendance, certes relative mais importante, vis à vis de Google. Quelle est votre approche vis à vis du référencement (SEO) ?
Nous avons développé des compétences fortes, et investi lourdement dans le domaine du SEO. Après, nous nous préoccupons avant tout de la qualité de nos contenus. Or Google cherche à mettre en avant des expériences utilisateurs. Si l'internaute est content, qu'il voit plusieurs pages et passe du temps sur nos sites, les médias grandissent et se retrouvent de mieux en mieux référencés.
Envisagez-vous d'industrialiser cette stratégie ? En dotant vos marques d'outils capables d'analyser en avance de phase ce qui sera cherché sur les moteurs, à l'image de ce que fait Melty ?
Non, nous n'utilisons pas ce genre d'outils, et ne prévoyons pas de le faire. On essaie d'élargir notre champ sémantique, d'aller vers la longue traine, et ce genre de choses, mais ce sont finalement des techniques assez traditionnelles. Notre logique de diversification n'a pas vraiment besoin de ça.
Pourriez-vous adopter un modèle de type ferme de contenus reposant sur des contenus à bas prix ou sur des contributions d'internautes ?
Aujourd'hui nous sommes plus dans l'optique de développer des parties communautaires sur nos sites, pourquoi pas autour de la vidéo par exemple. Par contre ce sont des choses qu'on envisage comme des à-côtés, ou comme une section du site lorsque la thématique s'y prête. Parmi nos concurrents, ceux qui font appel aux contributions d'internautes produisent tout de même beaucoup de contenus en direct. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles Oxygem a souhaité acquérir Passeportsanté : son contenu est reconnu en France comme étant de très bonne qualité, à caractère encyclopédique.
Quant à monter des succursales à l'étranger pour du contenu à bas coût, non, ce n'est pas dans nos plans. Je ne rejette pas la pratique, et je ne dis pas qu'on ne pourrait pas être amenés à l'envisager un jour, puisque produire des contenus de qualité coûte cher ; mais aujourd'hui nous sommes basés à Paris et à Roubaix, et l'on souhaite pour l'instant rester dans cette logique.
Après les épisodes traversés en 2009, peut-on ne monétiser une activité média et assurer la croissance d'un groupe qu'au travers de la publicité ?
Il est clair que le ralentissement des investissements a été bien réel en 2008 et 2009, mais il a tout de même été moins sensible sur Internet. Sur cette période, notre chiffre d'affaires a moins crû que sur les années précédentes, mais on l'a traversée avec sérénité.
On n'envisage pas de diversification vers des modèles de type freemium / premium. En revanche,on voit des perspectives de croissance en direction du mobile, de la vidéo qu'on pratique déjà beaucoup et des réseaux sociaux. La géolocalisation nous parait également un axe sur lequel investir. Notre stratégie tourne autour du contenu, avec une valeur ajoutée réelle, donc un modèle de revenu publicitaire via l'audience nous parait gagnant, surtout si l'on parvient à situer nos marques parmi les trois premières de leur catégorie.
C'est donc dans cette optique que s'inscrit le rachat de Passeportsante.net, annoncé fin octobre ?
Exactement. Passeportsanté est à l'origine un site à but non lucratif répondant aux exigences du label HONCode, qui vise à garantir la fiabilité et la crédibilité de l'information médicale et de santé. Il a été monté au Canada par un réseau de chercheurs et de médecins et était jusqu'ici géré par une fondation. On a passé une convention avec eux au moment du rachat, et on leur assuré que la qualité du contenu était primordiale pour nous. Ensuite, on a signé avec des médecins en France pour la production de contenus. Jusqu'ici, le site était dans une logique de prévention, qu'on espère enrichir rapidement. Début 2012, le site sera ouvert à la publicité. On ne craint pas le passage au lucratif : on sait comment bien intégrer la publicité, et l'on fera bien sûr attention aux annonceurs sélectionnés, afin de ne dénaturer ni le contenu ni l'image.