Meta a lancé ce 6 juillet 2023 une nouvelle application dans son écosystème de réseaux sociaux et de messageries : Threads. Il s'agit d'une plateforme de conversation qui se concentre sur le format texte et qui vient se positionner en concurrence directe avec Twitter.
Pourquoi Threads est-il tant attendu ?
La sortie d'un service de cette envergure par Meta, propriétaire des mastodontes que sont Facebook, Instagram, WhatsApp et Messenger, est un événement en soi. Mais c'est surtout l'inexorable déclin de Twitter sous la houlette d'Elon Musk qui génère autant d'attente autour de Threads.
En quelques mois, l'expérience proposée par Twitter a radicalement changé, et de nombreux utilisateurs n'y trouvent plus leur compte. Encore récemment, nous apprenions que TweetDeck allait devenir payant alors que la gestion catastrophique d'une fin de contrat avec Google Cloud a contraint la plateforme à limiter le nombre de tweets consultés par jour.
Par conséquent, un grand nombre d'utilisateurs de Twitter cherchent une alternative. Moins simple à comprendre et à l'usage, Mastodon a eu du mal à convaincre, et c'est donc Threads qui est considéré comme le potentiel messie. Quelques heures après son lancement, l'application comptait déjà des millions de téléchargements.
Comment installer Threads ?
Meta a déployé Threads dans une centaine de pays le 6 juillet 2023, mais pas au sein de l'Union européenne. Sous sa forme actuelle, l'application ne respecte en effet pas les directives de l'UE quant à la collecte et à l'exploitation des données. Threads est notamment étroitement imbriqué avec Instagram, depuis lequel il peut importer des contacts et informations, qui peuvent servir à des fins de publicité ciblée. L'Europe a déjà empêché WhatsApp de diffuser des publicités ciblées à partir des données récoltées par le biais des autres applications de Meta.
Il est probable que Threads devienne officiellement disponible dans l'UE dans un futur proche, mais en attendant, il faut passer par des moyens détournés pour être en mesure de l'installer sur son smartphone ou sa tablette. L'appli n'est pas disponible sur le Google Play Store ni sur l'App Store d'Apple, et le recours à un VPN n'y change rien : c'est la nature de votre compte qui importe, pas votre localisation géographique.
Comment installer Threads sur Android
Sur Android, il suffit de télécharger le fichier APK de l'application directement depuis la fiche logicielle sur Clubic. Ouvrez ensuite le fichier et lancez l'installation. Il se peut que votre système vous mette en garde de dangers de sécurité et demande à ce que vous activiez l'option « Installer les applications depuis des sources inconnues » pour poursuivre la procédure.
L'autre option est de modifier la région de son compte Google pour télécharger l'app sur le Play Store, mais nous vous le déconseillons. Cette manipulation est limitée, et vous pourriez avoir du mal à revenir à votre ancienne région. Enfin, vous pouvez aussi créer un nouveau compte en choisissant une région où Threads est disponible, mais cela représente bien des efforts par rapport au simple download d'un APK.
Comment installer Threads sur iPhone
Sur iOS, vous le savez, tout est souvent plus compliqué. Le système d'exploitation est plus fermé qu'Android, et il n'existe pas de méthode équivalente à celle des magasins tiers d'APK pour obtenir une application en dehors de l'App Store. Vous devez donc modifier votre pays ou votre région dans les Réglages d'iOS et choisir une zone dans laquelle Threads est déployé dans l'App Store, comme le Royaume-Uni ou les États-Unis. Là encore, vous pouvez aussi créer un nouveau compte avec une région où Threads est accessible sur l'App Store pour l'installer sur votre iPhone.
Quelles autorisations requiert Threads ?
Sans surprise, Meta oblige, Threads est un véritable siphon à données personnelles. Actuellement, l'application n'est même pas en conformité avec le RGPD. Pour accéder à toutes ses fonctionnalités, Threads exige d'accéder aux fichiers et contenus multimédias du smartphone, à l'appareil photo, aux contacts, à la localisation et au microphone, du classique pour un réseau social.
D'après The Independent, au-delà de ces autorisations, Threads va chercher à collecter des informations sensibles sur ses utilisateurs, relatives à leur santé, leurs achats, leur historique de recherche, ou encore des données financières. On ne change pas les bonnes vieilles habitudes chez Meta.
Les premiers pas
Pour utiliser Threads, il faut se connecter avec son compte Instagram. Si vous n'en avez pas, vous devez donc en créer un, ce qu'il est possible de faire directement depuis l'app Threads. Vous devez ensuite choisir si votre profil est public (tout le monde accède à vos contenus) ou privé (seuls les abonnés que vous avez acceptés peuvent consulter vos publications). Fort heureusement, cette option est indépendante à celle d'Instagram : vous pouvez rendre votre profil Threads public en conservant votre compte Instagram privé.
Meta nous a en revanche concocté un piège : il n'est pas possible de supprimer son compte Threads individuellement, il faut pour cela se débarrasser aussi de son compte Instagram. Nous sommes donc prisonniers de Threads dès lors que nous souhaitons conserver notre compte Instagram.
Threads vous propose de suivre les mêmes comptes que vous suivez sur Instagram, mais il n'est pas possible d'importer ses contacts d'autres réseaux sociaux comme Twitter. Dans une prochaine version, il serait possible de partager ses contacts avec Mastodon.
Les premières impressions renvoyées par Threads sont étranges. Dès la fin du paramétrage, nous sommes renvoyés vers le flux principal, déjà abondant en publications… de comptes complètement inconnus. Bien souvent, les thématiques abordées dans ces posts ne correspondaient pas à nos goûts et à nos habitudes, alors que Facebook et Instagram savent pourtant à peu près tout de nous. L'interaction entre Threads et les autres plateformes de Meta ne semble pas totalement au point pour l'instant.
Au fur et à mesure de l'utilisation de l'application, en s'abonnant à des comptes qui nous intéressent et en interagissant avec des publications qui nous correspondent, le fil commence enfin à s'approcher de ce que l'on peut en attendre, avec tout de même encore trop de bruit à notre goût. Mais cela ne fait que quelques heures que nous naviguons sur Threads, et les résultats devraient se montrer de plus en plus pertinents à l'usage.
Une interface entre Twitter et Instagram
Si l'esthétique de Threads rappelle fortement celle d'Instagram dans la police, les couleurs, les icônes et l'habillage visuel en général, le design et la disposition des éléments font beaucoup penser à Twitter. Sous chaque publication, on peut voir le nombre de J'aime et de réponses. Il est possible, sans ouvrir le thread et depuis le flux, d'aimer, de répondre, de republier (le RT de Twitter), de citer (le QRT de Twitter) et de partager un thread. Il existe une option de partage rapide d'un thread vers Twitter et vers Instagram (au choix en Story ou sur le fil), de copie du lien de la publication et de partage du lien par n'importe quelle app sociale ou de messagerie installée sur son appareil.
Une grande différence avec Twitter est que Threads propose un outil de création de threads extrêmement pratique. Meta a bien identifié l'un des grands manques de Twitter pour le combler et capitaliser dessus. Il est possible de rédiger dans une interface intuitive une série de messages les uns à la suite des autres, qui peuvent être enrichis de liens, d'images et de vidéos.
La section Activité recense les personnes qui commencent à vous suivre ainsi que les réponses et mentions dont vous faites l'objet. Un onglet Vérifié permet d'afficher seulement les contenus provenant de comptes vérifiés. Le profil d'un utilisateur permet d'accéder à ses fils de discussion, à ses réponses et à son compte Instagram.
Une application qui doit mûrir
Threads est présenté comme « l’application de conversation au format texte d’Instagram ». Elle mise donc sur une expérience avant tout textuelle, Instagram restant privilégié pour des contenus plus visuels. Les publications sont limitées à 500 caractères, contre 280 pour Twitter (25 000 pour les abonnés Twitter Blue). Il est possible de partager des liens, des images et des vidéos (la fiabilité du lecteur et la qualité des vidéos semblent supérieures à ce que propose Twitter). Threads ne paraît pas prendre en charge le format GIF pour le moment. Peut-être encore plus incongru, les Reels, le format court de vidéos sur Instagram, ne peuvent pas non plus être partagés sur Threads.
On se rend vite compte que l'application est très limitée en matière de fonctionnalités. Nous avons l'impression d'avoir affaire à une version bêta, et non à une version stable de la plateforme. Il est clair que Meta a précipité le lancement de Threads pour profiter des déconvenues vécues par Twitter.
Il n'est pas possible d'envoyer des messages privés, il n'y a pas de hashtags pour suivre un événement ou une tendance, et la barre de recherche affiche des résultats qui sont systématiquement décevants. Nous constatons aussi quelques bugs ici et là. Lorsqu'une publication cite un autre thread contenant un lien, il n'est pas possible d'ouvrir directement celui-ci, il faut d'abord cliquer sur le message original pour ensuite accéder au lien, ce qui n'est pas des plus pratiques.
Meta a déjà fait savoir que l'application allait rapidement s'améliorer. Un flux constitué uniquement de contenus des comptes que l'on suit va être introduit. Nous aurons, comme sur Twitter, le choix entre l'algorithme de recommandation et nos abonnements. L'édition de messages, la traduction de texte et le support de plusieurs comptes devraient également bientôt arriver.
Threads peut-il remplacer Twitter ?
S'il lui ressemble beaucoup, Threads ne peut pas encore prétendre à la place de Twitter. Il n'est pas facilement accessible en Europe, il lui manque de nombreuses fonctionnalités, et il n'est pas possible d'utiliser l'application sur ordinateur. Meta ne propose qu'une version web depuis laquelle on ne peut que lire les contenus, pas en publier ou interagir, ni même s'abonner à des comptes. Comme Instagram, l'expérience desktop est donc très limitée, ce qui devrait causer des soucis aux community managers des marques et médias. Meta semble vouloir faire évoluer Threads prestement, nous saurons dans quelques mois s'il a le potentiel pour vraiment s'imposer face à Twitter, dont l'avenir dépend surtout de lui-même et des lubies d'Elon Musk.
Ce qui est amusant, c'est que Twitter cherche actuellement à tuer les threads en limitant leur visibilité pour privilégier les longues publications, accessibles uniquement aux abonnés payants Twitter Blue. En nommant son application Threads et en mettant en avant cette forme de communication, Meta nous offre un joli pied de nez à Twitter. De quoi motiver Elon Musk pour son combat en cage contre Mark Zuckerberg.
- Concurrent crédible à Twitter
- Une connexion directe avec Instagram