Amazon, eBay et Apple (iTunes) ne participeront bientôt plus autant aux recettes fiscales du Luxembourg. Et réciproquement. À compter du 1er janvier 2015 et l'entrée en vigueur de la directive européenne 2008/8/CE, les services électroniques seront imposés dans le pays où le client est établi, et non plus là où le e-commerçant a habilement choisi de s'installer.
La conséquence pour le pays est un manque à gagner important. Le ministre des Finances s'en inquiète et prévient : « Il sera difficile de sortir cette ornière. » Le trou dans les finances publiques est estimé entre 600 millions et 1,1 milliard d'euros, soit de 5 à 9% des recettes de l'État. Cela donne une idée du nombre de sociétés liées aux services en ligne installées au Luxembourg, ainsi que l'importance de leur activité. Parmi les dernières arrivées, citons Sony et son Reader Store ou Valve et sa plateforme de jeux-vidéo Steam.
Le terme utilisé par l'exécutif pour qualifier ce changement de TVA est la « falaise du e-commerce », et le ministre déplore que le pays ne l'ait pas anticipée. « Ce qui est regrettable, c'est que l'on savait depuis 2007 que les recettes sur la TVA du e-commerce allaient disparaître », explique-t-il, cité par Itnation.lu. En vue de combler cette perte, le gouvernement grand-ducal envisage prochainement de relever sa TVA de 15 à 17%.
Fin de l'eldorado de la TVA
Avant 2003, un prestataire de services électroniques non établi dans l'Union européenne bénéficiait de « l'avantage non négligeable » de n'être redevable d'aucune TVA, explique la fiduciaire LPG. Sont concernés par ce régime : la fourniture de services en ligne comme l'hébergement de sites Internet, la maintenance de logiciels à distances ou encore la fourniture de musique et de films, comme sur iTunes, ou de jeux, comme sur Steam. Etaient exclus les biens corporels livrés de manière classique mais commandés par Internet.« Conscient de ce vide législatif, l'UE a adopté la directive 2002/38/CE, entrée en vigueur le 1er juillet 2003 au Luxembourg, qui s'applique aux prestataires de tels services, établis ou non dans l'Union Européenne », rappelle LPG. Cette mesure a deux conséquences pour ces sociétés : s'identifier à la TVA de chaque pays où elles facturent leurs services, ce qui est complexe et les expose à des taux élevés comme en Suède (25%), ou bien s'installer dans un seul pays, où la TVA est la moins forte, et l'appliquer sur toutes les prestations.
Avec un taux de TVA de 15% (et 3% pour les e-books depuis 2011), c'est la première option qui a évidemment été choisie et c'est ainsi que le Luxembourg est devenu très prisé par ces sociétés. Sociétés bientôt contraintes d'opter pour la deuxième option : appliquer le taux en vigueur dans le pays de résidence du client. Derrière cette manœuvre, l'espoir de Bruxelles est de tenter de mettre à mal le dumping fiscal.