L'État français a allumé la mèche du cloud français à l'automne 2012 en y injectant 150 millions d'euros, au nez et à la barbe d'acteurs existants et bien établis tels qu'OVH et Ikoula. Deux ans plus tard, le pétard mouillé a en partie explosé en vol : Orange est entré en négociations pour reprendre 100% du capital de Cloudwatt, dont il possède déjà 44,4% - aux côtés de Thalès (22,2%) et de la Caisse des Dépôts (33,3%).
Le problème de l'entreprise est d'avoir connu un retard à l'allumage. Censée s'adresser en priorité aux entreprises avec une offre d'infrastructure (IaaS) pouvant leur offrir une alternative à Amazon, Cloudwatt s'est embourbé dans une solution de stockage à la Dropbox, la Cloudwatt Box. D'après la société, il s'agissait de commercialiser quelque chose pendant que l'offre IaaS se montait. Elle ne verra le jour qu'en juillet 2014.
Pas suffisant pour atteindre les objectifs qui étaient initialement fixés. Sur le dernier exercice, Cloudwatt a tout juste franchi la barre du million d'euros de chiffre d'affaires. Lors de sa création, l'opérateur de cloud annonçait viser les 500 millions d'euros de recettes en 2017. Didier Renard, PDG depuis avril, accuse un marché du cloud français inférieur aux attentes. Il table tout de même sur 200 millions de recettes en 2020.
Vendre en indirect et compléter l'offre d'Orange
L'autre ennui de Cloudwatt est d'avoir voulu vendre ses produits en direct. Ici aussi, changement de cap. Les clients de l'entreprise seront désormais des partenaires revendeurs, afin de répondre aux demandes en intégration et accompagnement des entreprises. Une douzaine de contrats ont déjà été signés avec des sociétés comme APX, Alter Way ou bien Open Wide, spécialisées dans la sauvegarde, l'infogérance et la BI.Les données de Cloudwatt sont déjà hébergées dans le datacenter d'Orange de Val-de-Reuil, en Normandie. En reprenant toute la société, ainsi que ses 90 salariés, l'opérateur affirme vouloir « renforcer son offre de services de cloud computing pour les entreprises ». Les deux offres sont « complémentaires », estime-t-il. Alors que Cloudwatt devait devenir un champion français du cloud, il sera dilué dans une offre existante.
Tout aussi loin des objectifs, Numergy tient bon
Les événements ont pris un autre tour chez Numergy, l'offre « sœur » lancée au même moment par SFR et Bull, toujours avec le concours de l'État, via la Caisse des Dépôts, à hauteur de 33%. Les indicateurs sont plus encourageants, avec la signature de 130 contrats partenaires et un chiffre d'affaires de 6 millions d'euros en 2014, multiplié par trois en un an. Seulement, 80% des commandes proviennent en réalité des clients de SFR.Si le bilan financier est meilleur du côté de Numergy, et l'offre commerciale plus mûre, l'objectif de 400 millions d'euros de chiffre d'affaires à horizon 2017 est encore loin d'être atteint... Philippe Tavernier espère plutôt atteindre entre 100 et 200 millions d'euros, et en 2020. À cette échéance, Numergy souhaite réussir à capter 15% du marché du cloud public français. Il compte aussi sur l'Europe, avec la Cloud Team Alliance.
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