Né du rapprochement du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), le nouveau régulateur entra officiellement en service le 1er janvier 2022.
L'ARCOM, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, va devenir, dans les prochaines heures, une entité juridique active. Se refusant d'être un simple millefeuille de compétences piochées du côté de CSA et du côté de l'Hadopi, elle veut incarner une autorité d'un nouveau genre et se décrit comme « le support et le moteur d'une nouvelle politique publique en modernisant l'exercice de la régulation ». L'ARCOM bénéficiera de compétences élargies et assurera une régulation indépendante audiovisuelle et numérique. Voyons ensemble comment se dessine cette super autorité qui compte d'ores et déjà 355 collaborateurs et collaboratrices.
Comment se compose l'ARCOM, et qui va la diriger ?
La nouvelle autorité publique indépendante est dirigée par un collège de neuf membres, exactement comme le CSA. Le président de l'ARCOM, Roch-Olivier Maistre, est nommé par le chef de l'État et il est entouré de huit autres membres : trois sont désignés par le président du Sénat, trois par le président de l'Assemblée nationale, un est nommé par le vice-président du Conseil d'État, et un dernier nommé par la première présidente de la Cour de cassation. Ensemble, ils forment le collège de l'ARCOM, censé se réunir au moins chaque mercredi pour statuer sur les dossiers pour lesquels une décision de l'autorité est attendue. L'un des premiers dossiers chauds posés sur la table de l'ARCOM sera celui de la fusion entre TF1 et M6, dont certains acteurs, comme Free, ne veulent pas.
Sous ce collège, on retrouve plusieurs directions placées sous la responsabilité du directeur général et de ses adjoints, et de 16 comités territoriaux de l'audiovisuel, situés en Métropole et en Outre-mer. L'ARCOM est découpée en plusieurs directions, chacune œuvrant dans un ou plusieurs domaines : la communication ; le juridique ; l'administration et les finances des systèmes d'information ; la création ; les publics, le pluralisme et la cohésion sociale ; la télévision et la vidéo à la demande ; la radio et l'audio numérique ; les plateformes en ligne ; les études, l'économie et la prospective ; et enfin les affaires européennes et internationales.
Ces différentes directions de l'ARCOM, composées de 355 agents et dotées de 46,6 millions d'euros de budget, nous donnent d'ailleurs une première idée globale du champ d'action particulièrement large du nouveau régulateur, allant de la protection du droit d'auteur à la lutte contre le piratage, en passant par la lutte contre la désinformation et les contenus haineux, et la régulation des plateformes de SVoD.
Quelles sont les missions « historiques » de l'ARCOM ?
Le socle de compétences de l'ARCOM est assez costaud. Si l'on devait résumer la moitié d'entre elles en une phrase, on pourrait dire que l'autorité veille à « permettre l'accès à une offre audiovisuelle pluraliste, respectueuse des droits et libertés », comme elle le dit elle-même. Cela comprend notamment de veiller au pluralisme politique dans les programmes de radio et de télévision, ainsi qu'à la déontologie des programmes. Elle doit aussi aider à promouvoir une représentation de la société française et à protéger la jeunesse, en améliorant par exemple la pertinence de la signalétique.
La réception technologique des programmes fait aussi partie de ces compétences. Elle comprend le soutien du déploiement du DAB+ (la radio numérique terrestre) et la modernisation de la TNT, pour laquelle on attend des améliorations en matière de qualité de son et d'image, outre des fonctionnalités d'interactivité.
Et quelles sont ses missions numériques nouvelles ?
Ponctionnant en partie l'esprit de l'Hadopi, l'une des missions centrales de l'ARCOM sera de promouvoir les offres de contenus culturels légales. 49 % des internautes sont abonnés à un service de vidéo à la demande par abonnement, une donnée qui a gagné 27 points en trois ans. L'intérêt de l'autorité est de mieux valoriser les offres légales pour favoriser leur adoption, ce qui éloignerait alors les utilisateurs des contenus piratés.
Les services illicites (12,4 millions d'internautes les utilisent chaque mois en France), qui représentent un manque à gagner de plus d'un milliard d'euros par an pour l'audiovisuel français, seront dans le collimateur de l'ARCOM. Pensant notamment au piratage de retransmissions sportives, le régulateur travaille à déployer un nouveau mécanisme contre ces services de diffusion illégale. Il tentera aussi de rapprocher les ayants droit et les acteurs susceptibles de bloquer les services pirates, de façon à gagner du temps dans la répression.
Parmi les autres grandes missions de l'ARCOM, l'autorité aura à sa charge tout ce qui a trait au financement et à la promotion audiovisuelle et cinématographique, de même que la participation des grandes plateformes de streaming (Netflix, Disney+, Amazon Prome Vidéo et d'autres) au système de financement de la création française. Celui-ci sera suivi de près, avec des contributions attendues à hauteur de 250 à 300 millions d'euros par an.
Protéger les utilisateurs des contenus haineux : grande priorité de l'ARCOM
L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique veut participer au développement d'un Internet plus sûr. « L'ARCOM n'a pas vocation à réguler Internet », prévient l'autorité, mais « sa mission est de s'assurer que les dispositifs prévus par le législateur sont mis en œuvre et respectés par les plateformes de contenus et les réseaux sociaux », explique-t-elle. Le régulateur sera en mesure d'édicter des lignes directrices adressées directement aux opérateurs de plateformes et réseaux sociaux, notamment en matière de lutte contre la haine en ligne et contre la manipulation de l'information. Son pouvoir de sanction n'est pas négligeable non plus. L'ARCOM pourra sanctionner les entreprises qui ne respectent pas la réglementation d'une amende pouvant atteindre 20 millions d'euros ou 6 % du chiffre d'affaires mondial.
Sur le pan de l'éducation aux médias et à l'information, l'ARCOM veut protéger le jeune public, en proposant notamment aux parents et partenaires éducatifs et institutionnels, des kits pédagogiques. La lutte contre l'accès des mineurs à la pornographie (un sujet qui provoque des remous ces temps-ci, notamment à propos des sites pornographiques et de la limite d'âge) et la réglementation de l'exploitation commerciale de l'image des enfants sur les plateformes en ligne sont aussi des missions auxquelles l'autorité portera une attention toute particulière.
Internet en 2021 : que se passe-t-il en 1 minute ?
Source : ARCOM