L'e-G8 Forum, c'est donc un millier d'entrepreneurs et de personnalités de l'Internet. Avec, dans le lot, les pointures hexagonales attendues que sont Xavier Niel (Iliad), Stéphane Richard (Orange), ou Jean-Bernard Lévy (Vivendi), mais aussi et surtout quelques gros poissons venus du monde entier : Zuckerberg, de Facebook, Craig Mundie de Microsoft, Jeff Bezos d'Amazon, Jimmy Walles de Wikipedia ou même le magnat américain des médias Rupert Murdoch, et la liste est loin d'être exhaustive.
Pour accueillir un tel aréopage, outre une grande tente sise dans le jardin des Tuileries, l'e-G8 ne prévoit rien de moins qu'un chef d'Etat et trois ministres, Frédéric Mitterrand, Eric Besson et Christine Lagarde. En page d'accueil du site dédié à l'évènement, c'est Nicolas Sarkzoy qui accueille, avec une allocution vantant les louanges d'Internet tout en esquissant, en filigrane, les thématiques phare de ce forum inédit, dont les conclusions devraient être présentées lors du vrai G8, en fin de semaine.
« Dans le cadre de cette conférence exceptionnelle, dont j'ai confié l'organisation à Maurice Lévy, les acteurs d'internet et du monde numérique vont pouvoir exprimer leur vision de l'importance et de l'impact d'Internet dans la société et l'économie », explique le chef de l'Etat, avant d'inviter les participants à proposer, échanger et discuter « dans la plus pure tradition ascendante d'Internet ». Civilisé, l'Internet, cela va de soi.
Durant deux jours se succéderont conférences pleinières et ateliers de travail, censés permettre d'embrasser les grands enjeux que posent le numérique dans la société d'aujourd'hui (voir programme définitif, PDF). Quelques intitulés paraissent bien vagues (Internet et la croissance économique, Internet et la société, l'Internet du futur, Internet et l'éducation) et d'autres laissent augurer des débats plus nourris. On retiendra par exemple la table ronde dédiée à la répartition des richesses entre créateurs et distributeurs, ou celle qui interrogera la propriété intellectuelle à l'heure des échanges dématérialisés.
Beaucoup de stars, mais quelques absents ?
La composition de cette dernière, bien que prestigieuse, illustre peut-être l'une des lacunes de l'évènement : si l'on y trouve Antoine Gallimard, de la maison du même nom, Pascal Nègre (Universal Music Fance) ou le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand, aucun représentant de la communauté des internautes ou des courants de type Creative Commons n'y figure. Dès lors, est-il vraiment permis d'attendre un débat contradictoire ?
Certains en doutent, et dénoncent dans cet e-G8 un simple écran de fumée, voire une tentative de manipulation. « Les citoyens et toutes les organisations engagées en faveur des droits fondamentaux doivent envoyer un message clair aux gouvernements : les débats entre industriels invités pour amuser la galerie au “forum eG8” de mardi prochain ne suffiront pas à cacher que les vraies décisions seront prises lors du G8 qui suivra », déclare par exempleJérémie Zimmermann, porte-parole de La Quadrature du Net.
Les sceptiques verront leurs doutes quant à la finalité de l'évènement renforcés par les récentes révélations de l'hebdomadaire Marianne qui, dans son édition du 20 mai, rapporte que Nicolas Sarkozy se serait fermement opposé à l'organisation, en France, d'une rencontre dédiée à la liberté d'expression sur Internet, alors voulue par Bernard Kouchner. Un atelier baptisé « Liberté électronique et nouveaux outils pour la liberté » figure tout de même au programme du e-G8, mais ce sera tout.
Ces deux jours seront-ils suffisants pour que naissent de véritables conclusions, susceptible d'être portées au G8 quelques jours plus tard ? « Un journaliste voulait savoir ce que j'attendais du e-G8... Difficile comme question ! Je crois que la meilleure réponse serait "pas grand chose" », commentait jeudi sur Twitter le président d'un fond d'investissement spécialisé.