La proposition de loi visant à lutter contre les injures commises en raison de l'appartenance à une religion a été enregistrée par l'Assemblée nationale le 6 mars 2019. Elle veut renforcer l'arsenal juridique en sanctionnant beaucoup plus lourdement, tant les plateformes que leurs utilisateurs.
La régulation des géants du numérique est en marche au sein du gouvernement et de la majorité présidentielle. Après le dépôt du projet de loi sur la taxe Gafa mercredi dernier en Conseil des ministres, c'est au tour de la proposition de loi sur les propos haineux de faire son entrée en scène. Le texte, porté par la députée LREM Laetitia Avia, constitue la suite logique d'un rapport de 70 pages remis au Premier ministre Édouard Philippe en septembre dernier. En cas d'adoption, cette loi permettra de franchir un cap contre le fléau qui sévit notamment sur les réseaux sociaux.
Les plateformes devront supprimer tout contenu illicite dans les 24 heures
Cette proposition de loi se justifie par un manquement juridique manifeste, auquel les législateurs veulent mettre fin. Elle veut donner la priorité à la régulation des messages publiés sur Internet. Car si la loi interdit officiellement toute expression antisémite, raciste ou de négation de crimes contre l'humanité, les propos et messages de haines pullulent et ne cessent de se multiplier, portés par les réseaux sociaux et les grandes plateformes.Ainsi, et en se calquant sur son pendant allemand qui applique la loi à toute plateforme de plus de 2 millions de membres, le tout premier article de la proposition de loi exige des réseaux sociaux de bloquer ou de retirer tout contenu qui enfreint la loi « dans un délai de vingt-quatre heures » suivant sa notification. Jusqu'à aujourd'hui encore, la loi sur la confiance dans l'économie numérique ne réclame qu'un retrait « prompt » du contenu, laissé à l'appréciation du juge. Un bouton de signalement commun pourrait être incorporé à l'ensemble des hébergeurs. Si la plateforme qui héberge le contenu ne respecte pas cette obligation, elle est alors soumise à une amende pouvant atteindre 37,5 millions d'euros, ce qui est 100 fois supérieur à ce que prévoit la loi actuellement (375 000 euros seulement).
Prouver son identité pour s'inscrire sur un réseau social
Le second article de la proposition de loi propose, lui, de « rendre obligatoire pour les réseaux sociaux la vérification de l'identité de leurs membres ». Ce point, salutaire en apparence, pourrait être mal vu par les partisans de la liberté et de l'anonymat sur Internet. En cas d'adoption de la loi, toute personne qui souhaite créer un compte sur Facebook, Twitter ou tout autre réseau social, devra fournir à la plateforme une pièce d'identité et signer une déclaration de responsabilité pour les propos tenus.Le troisième article, enfin, table sur un durcissement du cadre législatif. Concrètement, l'esprit de la loi ne veut pas que les propos haineux soient vus comme une opinion mais comme un véritable délit de droit commun. En conséquence, la répression sera plus importante. Actuellement, de tels propos sont régis par la loi ancestrale du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, un texte inadapté au monde du numérique. Des propos à caractère raciste pourraient d'être punis de deux ans de prison et de 70 000 euros d'amende, contre un an d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende aujourd'hui.
Partant du constat que les actes antisémites ont connu une progression de 74 % en 2018 (selon le ministère de l'Intérieur) et les actes homophobes (selon SOS Homophobie) une hausse de 4,8 % en 2017, que pensez-vous de cette proposition de loi ? La trouvez-vous plus juste et dans l'air du temps ?