Robotique : "Il y a une vraie révolution accélérée de la technologie"

Antoine Duvauchelle
Publié le 08 février 2011 à 18h43
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La conférence de presse de Syrobo, le syndicat français de la robotique, pour annoncer le salon Innorobo, à Lyon du 23 au 25 mars prochains, a été l'occasion de rencontrer plusieurs acteurs de l'industrie robotique naissante. Ils feront peut-être la robotique de demain - le marché pourrait atteindre 100 milliards de dollars annuels en 2020, et croient dans les usages avant de viser des prouesses de laboratoire. Voici leurs explications sur la robotique.

C'est entendu, pour Bruno Bonnell, le fondateur de la société Robopolis et président du syndicat Syrobo, « la robotique, ça a commencé. J'entends souvent dire que c'est cher, ou demander à quoi ça sert. Mais la robotique est présente déjà dans la société, et bientôt, tout sera robotique. » C'est vrai qu'à voir Nao et Jazz, les deux robots présentés respectivement par Aldebaran et Gostai, on est en droit de se demander si l'utilité n'est pas limitée. Le premier fait penser à un Nabaztag équipé de bras et de jambes, et le second reste cantonné - dans la version présentée - à une mission de téléprésence. Un écran diffuse l'image d'un correspondant éloigné, une caméra lui permet de voir, des roues de se déplacer, et un kit audio de communiquer.

Développement en informatique robotique
Alors quand on essaie d'en savoir plus, tentant l'analogie avec les kits d'électronique des débuts de l'informatique personnelle, Bruno Bonnell acquiesce. « Aujourd'hui, c'est la même chose : il est tout à fait possible de se lancer en robotique. Il existe des kits de développement pour les robots et langages que nous utilisons. J'engage même les développeurs informatiques à se lancer dans la programmation pour la robotique. Certains kits sont assez abordables, et permettent de se lancer facilement, avec les SDK et toute la documentation nécessaire. »

Après discussion avec plusieurs startups dans la robotique, cela reste plus facile à dire qu'à faire. D'abord parce qu'il y a des problèmes qui nécessitent une bonne capacité d'abstraction. Selon Antony Méchin, ingénieur chez Gostai, « le plus difficile, c'est tout ce qui est autour de l'apprentissage. Il y a une différence importante entre un robot qui est programmé pour s'asseoir ou se relever toujours de la même manière, et un autre qui va être capable de choisir la meilleure façon de faire par élimination. » Cette relation à l'environnement - et donc l'interactivité lorsque les humains font partie de l'environnement - serait donc la plus difficile à mettre en oeuvre, sur le plan du développement comme du matériel.

Parce qu'un robot, c'est quoi ? Au coeur du Jazz de Gostai, on trouve de l'Intel Core 2 Duo, qui fait tourner un système Linux avec la couche propre à Gostai par-dessus. « C'est suffisant pour la plupart des applications. Mais pour des applications très gourmandes en puissance de calcul, comme la reconnaissance faciale, par exemple, cela ne va pas être suffisamment puissant. On ne peut pas mettre de module aussi imposant dans un robot aussi petit et léger. » La parade, Gostai l'a trouvée dans le cloud : « on fait juste prendre la photographie au robot, et il l'envoie dans le cloud, où des machines plus puissantes peuvent calculer pour effectuer la reconnaissance faciale. »

Autre complication, selon Bruno Bonnell, « quand vous travaillez dans le réel, il y a plein de choses qui ne sont pas modélisables. On est donc aussi dans l'expérimental, et c'est beaucoup plus difficile que dans le logiciel. Il faut avoir cette double casquette : se confronter à de la recherche fondamentale, à des équations d'un côté, et de l'autre à des choses bêtes mais dont on se rend compte dans la réalité. Quand un robot passe de la moquette au parquet, c'est pas si simple, quand il se prend un fil dans les pattes, non plus, etc. »

Quels usages ?
La question demeure cependant : pour quoi faire ? Chacun a évidemment sa réponse au cours de la conférence de presse, mais tous s'accordent sur un point : les robots développés aujourd'hui sont conçus autour d'une utilisation.«  Quand les gens pensent à la robotique, » souligne Bruno Bonnell, « ils voient Star Wars et R2D2. Ce n'est pas ça du tout, mais on développe un robot pour un usage, un autre pour un autre usage. »

Exemple : Jazz, de la société Gostai, est disponible en plusieurs versions. Largement développé pour la téléprésence, avec sa caméra frontale ou son écran permettant d'afficher le visage de son interlocuteur, il peut aussi être utilisé pour la sécurité. Il est dépourvu de bras, car sa principale utilité, c'est de voir et de permettre de voir. On est effectivement loin de l'humanoïde à l'échelle, mais c'est une volonté, selon Antony Méchin : « On ne peut pas faire de robots trop grands pour l'instant, parce que cela peut faire un peu peur à cause de la science-fiction et de l'imaginaire qu'on a autour des robots. En le faisant plus petit, on domine le robot, et en lui donnant un visage doux, on annule complètement l'appréhension que pourrait avoir l'humain. » Aldebaran Robotics, à l'origine du robot Nao, a eu le même réflexe. « On essaie de mettre le robot à la portée des gens, » explique le fondateur de l'entreprise Bruno Maisonnier. « La forme humanoïde, c'est pour ça, c'est parce que ça rassure. » Le prochain robot d'Aldebaran, qui sera à taille humaine cette fois, sera aussi un humanoïde du nom de Romeo.

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En tous cas, on l'aura compris : l'industrie naissante de la robotique française souhaite donner le coup d'envoi à Lyon en mars prochain. Pour Bruno Bonnell, l'année 1 de la robotique, c'est maintenant. « Aujourd'hui, regarder avec un petit sourire sympathique la technologie des robots en pensant que c'est un truc de gamins, c'est aussi ridicule que les gens qui regardaient le TI994A ou le Spectrum en se disant que c'étaient des bêtises de geeks, des gadgets. Il y a une vraie révolution accélérée de la technologie. »

Antoine Duvauchelle
Par Antoine Duvauchelle

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