Des scientifiques chinois ont utilisé une technologie basée sur l'édition génomique pour traiter un patient atteint du VIH, sans toutefois réussir à le soigner.
Si ce premier essai d'une modification génétique dans le but de guérir le VIH a été un échec, il ne semble n'avoir comporté aucun danger pour le patient.
Entre VIH et leucémie
La technologie CRISPR (Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats, à prononcer « crispeur ») est un outil relativement simple utilisé pour la modification des génomes et l'altération de séquences ADN. Elle constitue une adaptation d'un mécanisme de défense naturel, notamment envers les bactéries. L'Inserm la définit ainsi : « C'est un outil moléculaire qui permet d'invalider un gène ou de le corriger ».C'est ce qu'a tenté de faire l'équipe de l'université de Pekin, à Beijing. Leur essai a porté sur un unique patient qui, outre le HIV, a souffert d'une leucémie. Celle-ci a nécessité une greffe de moelle osseuse : les scientifiques ont donc modifié l'ADN de la moelle osseuse à greffer avant sa transplantation. Plus précisément, ils ont cherché à supprimer un gène, baptisé CCR5 et fournissant des instructions aux protéines responsables de certaines cellules immunitaires. Le VIH utilise cette protéine comme « passerelle » pour pénétrer ces cellules. Une mutation du gène CCR5 existe chez certaines personnes, qui s'avèrent alors être résistantes au virus.
Un mois après la transplantation de moelle osseuse, la leucémie du patient est en pleine rémission. Les tests ont montré que les cellules souches génétiquement modifiées sont capables de prospérer. Ces cellules ont ainsi persisté dans le corps du patient durant les 19 mois suivants. En revanche, dès que le patient a arrêté de prendre son traitement contre le VIH, celui-ci s'est de nouveau manifesté.
Sécuriser une pratique dangereuse
L'équipe a souhaité s'inspirer d'antécédents : en mars 2019, un patient semble avoir guéri du VIH après avoir reçu une transplantation présentant des cellules souches avec une mutation du gène CCR5. Ils ne sont ainsi que deux, depuis le début de l'épidémie, à être parvenus à éliminer le virus par ce biais.La méthode de la modification génomique est donc prometteuse. Mais elle est également controversée, car dangereuse. Les chercheurs chinois soulignent que leur patient ne souffre ici d'aucune modification indésirable des gènes. Pourtant, l'Inserm prévient que « dans environ 60% des cas, la méthode entraîne en effet des modifications non souhaitées du gène cible et peut, dans certaines conditions, induire des pertes de morceaux de chromosomes ». L'organisme ajoute plus loin que « seulement 40% des cellules sont correctement corrigées. Pour les 60% autres, c'est un autre mécanisme de réparation de l'ADN qui se déclenche ».
Des recherches sont donc menées, mais leur dangerosité se heurte à des obstacles éthiques. En 2018, un scientifique chinois a suscité l'émoi en affirmant, dans une vidéo, avoir modifié les gènes de bébés jumeaux dans le but de les rendre résistants au VIH. Julian Savulescu, de l'université d'Oxford en a alors dit : « Si c'est vrai, cette expérience met en danger la santé d'enfants sains en les mettant face à des risques de modification des gènes, sans réel bénéfice ».
Source : Live Science