Décidément, le département de la Défense américaine (la DARPA) s'intéresse de très près au jeu vidéo. En mai dernier, l'organisme a déjà annoncé travailler avec des développeurs de jeu vidéo avec l'objectif de créer une IA destinée aux combats aériens.
Cette fois, l'agence va plus loin : désormais, elle entend utiliser les ondes cérébrales des gamers pour la gestion de flottes entières d'appareils terrestres et aériens.
Une IA de gamer
Le projet est dirigé par une équipe de chercheurs de l'université de Buffalo, qui a reçu de la DARPA une subvention de 316 000 dollars (environ 288 000 euros). Ils ont étudié les mouvements oculaires et les ondes cérébrales de 25 participants tandis qu'ils jouaient à un jeu vidéo. Il s'agissait ici d'un jeu de stratégie en temps réel (RTS) spécifiquement réalisé pour l'étude, et pour lequel chaque partie durait entre 5 et 10 minutes.Les informations recueillies sont désormais utilisées dans la conception d'une IA qui, à terme, devra diriger des appareils autonomes au combat. Souma Chowdhury, l'un des directeurs du projet, a expliqué à Digital Trends : « Imaginez que vous entrez dans une salle de classe où il n'y a pas d'enseignant. [ ... ] Vous pourriez apprendre en utilisant des exercices et des livres d'apprentissage, mais cela prendra beaucoup de temps. Si vous avez un maître à suivre, cela ira plus vite. Ici, nous voulons voir comment les humains jouent à ce jeu, puis utiliser [ leur comportement ] pour accélérer considérablement l'apprentissage de l'IA. Jusque-là, il aurait fallu 10 000 simulations pour apprendre. Désormais, il suffit d'exécuter environ un millier de simulations et de les compléter avec des données humaines ».
Pour ce faire, les scientifiques de l'université de Buffalo recherchent les meilleurs joueurs. Souma Chowdhury a ajouté que « Nous essayons de recruter des [ participants ] qui ont une solide expérience de jeu », précisant : « Je n'ai moi-même aucune expérience de jeu, je ne suis pas du tout un gamer. Mais beaucoup de nos étudiants aiment les jeux comme des fous ». Si Souma Chowdhury précise que six ou sept parties suffisent à réunir assez de données pour chaque participant, l'équipe continue toujours d'en collecter.
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Vers des essaims robotisés
L'objectif principal de l'étude est de parvenir à créer une intelligence dite « distribuée » (ou intelligence « en essaim »), qui vise à coordonner les actions d'un grand nombre d'appareils dirigés par ordinateur. Souma Chowdhury explique qu'« il existe de nombreuses applications différentes qui pourraient être réalisées en utilisant non pas un seul robot à un million de dollars, mais plutôt un grand nombre de robots plus simples et moins chers. Ce pourrait être des appareils terrestres, aériens ou une combinaison de ces deux aspects ».Les chercheurs entendent ainsi créer une intelligence artificielle qui soit en mesure de coordonner les actions de 250 appareils terrestres et aériens simultanément, permettant à une flotte entière de naviguer de façon autonome dans des environnements imprévisibles. Souma Chowdhury affirme que « Les humains peuvent proposer des stratégies très uniques qu'une IA ne pourra jamais apprendre. Une grande partie de la médiatisation de l'IA concerne des applications dans des environnements relativement déterminés. Mais en termes de raisonnement contextuel, en environnement réel [ et ] avec un objectif à atteindre ? C'est encore un domaine émergent ».
Source : Digital Trends