La cour d'appel de Rennes considère qu'une clause illisible insérée dans un contrat conclu entre professionnels peut constituer un motif de résiliation unilatérale. Explications.
Dans un arrêt rendu le 17 septembre, la cour d'appel de Rennes devait se prononcer sur la résiliation unilatérale d'un contrat conclu entre la société Tendriade Collet, un abattoir spécialisé dans des produits aux dates limites de consommation très courtes, et l'opérateur de télécommunications SFR, qui avait ouvert plusieurs dizaines d'abonnements pour le compte de l'entreprise. La société, qui était censée bénéficier des prestations de l'opérateur, estimait n'avoir pas été suffisamment bien informée. La cour d'appel a rappelé que toute clause opposable insérée à un contrat doit être clairement lisible.
SFR considère que son client n'a pas respecté la procédure de notification des incidents
Le début de l'affaire remonte au 18 mars 2014, date à laquelle Trendriade Collet signe un contrat avec SFR portant sur l'ouverture de 89 abonnements voix et données, après avoir été démarchée par la Société financière de distribution (SFD), qui est le distributeur des produits SFR. Mais 56 jours après la date de prise d'effet, Tendriade Collet fait contester, par huissier, le fait qu'elle est dans l'impossibilité de jouir des services de SFR. Sans réponse, elle décide alors, de son propre chef, de résilier le contrat qui l'unit à l'opérateur au carré rouge par courrier RAR adressé à l'intermédiaire, la société SFD.SFR ne l'entend pas de cette oreille et réclame, quelques semaines plus tard, plus de 56 000 euros à l'abattoir spécialisé, au titre des frais courant jusqu'au terme initial du contrat, conclu pour deux ans. L'opérateur estime que la partie adverse n'a pas respecté la procédure contractuelle de notification des incidents.
Pour la cour d'appel, une clause essentielle doit être « lisible et compréhensible »
Un premier jugement du tribunal de commerce de Rennes avait donné raison à Tendriade Collet, et condamné SFR à lui verser 8 000 euros de dommages et intérêts. Et si la cour d'appel est, sur certains points, revenue sur plusieurs arguments de la juridiction de première instance, elle a confirmé le fait que l'opérateur n'a pas respecté son obligation de conseil. Tendriade Collet n'avait en effet pas été mise au courant de l'impossibilité d'assurer une couverture mobile des locaux de l'entreprise.Mais de la décision ressort surtout la validation par la cour de la rupture unilatérale du contrat, alors que SFR affirmait que son adversaire n'avait pas respecté la procédure de notification des incidents. Les juges ont en effet relevé qu'on ne peut pas reprocher au client (Tendriade) de ne pas avoir respecté cette procédure à partir du moment où celle-ci était affichée en très petits caractères dans un contrat de 37 pages, que personne ou presque ne lit dans son intégralité.
La cour d'appel rennaise a évoqué des dispositions du code de commerce et du code de la consommation, qui impose une information « lisible et compréhensible » fournie au client, ce qui n'était pas le cas dans cette affaire. SFD et SFR ont finalement solidairement été condamnées à verser 3 000 euros de dommages et intérêts à la société Tendriade Collet, outre les frais d'appel estimés à 4 000 euros.