En marge de la publication des chiffres du marché de la musique en France pour le premier trimestre de l'année, le Syndicat national des éditeurs phonographiques (SNEP) a appelé de ses voeux l'examen rapide de la future loi issue des conclusions de la mission Olivennes, remises au chef de l'Etat en novembre dernier. Avec un chiffre d'affaires global en baisse de 17,8%, le marché de gros de la musique souffre toujours de l'érosion de ventes de musique sur supports physiques, qui perdent 23,2% sur un an.
Le numérique, pourtant en hausse de 61% sur un an, n'endigue en rien le phénomène, constate le SNEP. La téléphonie mobile a généré 9,9 millions d'euros sur le trimestre, contre 6,9 millions d'euros pour les services de vente sur Internet. Le streaming, incarné par les offres d'abonnement illimité, fait quant à lui ses premiers pas, avec des revenus estimés à 600.000 euros. Le piratage est sans surprise toujours considéré comme une entrave au développement du marché du numérique.
« Il faut que la loi Hadopi soit installée avant la fin d'année, ou le début d'année 2009 », a martelé mardi Hervé Rony, directeur général du SNEP. En conséquence, le représentant des maisons de disque souhaite que le Parlement se penche au plus vite sur la question, de façon à ce que l'éventuelle adoption d'un texte de loi soit suivi de son examen dans le cadre des débats sur la loi de Finances établissant le budget 2009. « Il ne faut pas envoyer 100 ou 500 messages, mais des dizaines de milliers de messages, et pour cela, il faut que l'autorité indépendante ait des moyens », ajoute-t-il.
Riposte graduée...
D'où l'intérêt, selon le SNEP, d'un examen des plus rapides par le Parlement. Officiellement soutenu par le président Sarkozy, le projet de loi Hadopi risque de cristalliser certaines tensions politiques, d'autant que certaines dispositions du futur texte, telle que la suspension de l'abonnement à Internet de celui qui télécharge en cas de récidive, fait déjà l'objet d'attaques, portées au niveau européen par les députés Michel Rocard et Guy Bono.
Rappelons que la future loi - en admettant qu'elle respecte les décisions issues des accords de l'Elysée en novembre dernier prévoit la création d'une autorité indépendant, l'Hadopi, dont le plus haut cercle sera composé de magistrats ayant la capacité d'instruire une mesure telle que la suspension de l'abonnement à Internet. Selon le principe de riposte graduée, les internautes convaincus d'échanges illégaux de fichiers devraient recevoir divers messages d'avertissement envoyés par cette autorité avant de voir leur abonnement à Internet suspendu pendant un mois. En cas de récidive, une suspension pouvant aller jusqu'à un an, avec impossibilité d'ouvrir une autre ligne, serait prévue.
... et filtrage des réseaux ?
Suite aux accords de novembre, les fournisseurs d'accès à Internet se sont engagés à tester des méthodes de filtrage des réseaux, dans le but de déterminer comment, concrètement, juguler les échanges illégaux sur les réseaux P2P. Un accord non suivi de faits si l'on en croit le SNEP. Accompagné d'autres ayants droit, lui conduirait des tests auprès de différentes sociétés privées.
En matière de filtrage, deux voies sont ouvertes : la première consiste à couper purement et simplement le trafic issu ou en direction des réseaux peer-to-peer, ce qui présente l'inconvénient d'interdire les usages légaux de cette technologie. Avec la seconde, il s'agit de comparer la signature numérique des fichiers échangés de façon à détecter, puis bloquer, ceux qui correspondent à des oeuvres soumises au droit d'auteur. Confidentiels, les résultats seraient encourageants, assure le syndicat, même si le simple fait de chiffrer les données rendrait le travail de décryptage, puis de comparaison des signatures, d'une lourdeur extrême, impliquant des investissements de grande ampleur.
« L'idée n'est certainement pas de mettre un flic derrière chaque internaute, mais de montrer que le téléchargement illégal est devenu un jeu risqué », résume Lony. En espérant que la loi Hadopi soit votée et porte ses fruits, maisons de disque et ayants droit estiment qu'il est probable de voir repartir à la hausse la courbe des ventes de musique. « Il est indispensable que les fournisseurs d'accès commencent à considérer les contenus comme une véritable valeur ajoutée à leur offre », ajoute Christophe Lameignère, président du SNEP.