Vidéosurveillance contre narcotrafiquants. Le gouvernement du district fédéral de Mexico prévoit l'installation d'un parc de 8080 senseurs et caméras de surveillance au coeur de la capitale mexicaine. Telmex, leader des télécommunications en Amérique Latine et Thalès, l'expert en sécurité, sont chargés de sa mise en place dans le cadre d'un projet appelé « Ville Sûre » (Ciudad Segura) s'étalant sur 3 ans pour un budget d'environ 460 millions d'euros. Un contrat révélé, lundi 9 mars, au moment où le président français Nicolas Sarkozy se rendait sur place.
Ces caméras pourront, entre autres, « détecter les comportements anormaux » et localiser ou identifier les véhicules grâce à la lecture de leurs plaques d'immatriculation. Cette stratégie de l'État mexicain s'explique, en partie, par la montée en puissance de cartels et gangs liés à la drogue. Leur influence s'étendrait depuis le Pérou jusqu'à Vancouver, sur la côte Pacifique du Canada. La ville a d'ailleurs vécu du 3 au 5 mars dernier sept fusillades dues aux conflits pour les stocks de cocaïne. Rien que pour le début de l'année 2009, on dénombre déjà plus de mille morts par violence au Mexique. Un chiffre qui s'est élevé à 6.200 en 2008 (1653 rien que pour la ville frontalière Ciudad Juárez), soit plus du double qu'en 2007.
« La situation que vit le Mexique aujourd'hui est similaire à celle de la Colombie au début des années 1980 », explique Anthony Palacio, chef des opérations de renseignement de la DEA, l'agence antidrogue des États-Unis, à l'hebdomadaire mexicain Processo. Un contexte qui a d'ailleurs convaincu le Congrès américain, sur demande du président mexicain Felipe Calderon, de lui apporter une aide de 1,4 milliard de dollars sur trois ans dans sa lutte contre les narcotrafiquants. Reste que le marché américain serait le principal moteur de cette violence : 90 % de la cocaïne consommée aux États-Unis passe par le Mexique, et les armes volées ou achetées aux États-Unis sont impliquées dans 95 % des exécutions.
Aujourd'hui quelque 40.000 militaires sont déployés sur le territoire mexicain. Une présence relativement mal vue en raison d'exactions ponctuelles et de la forte corruption qui règne dans le pays. Le 16 février dernier, le « tsar » antidrogue du gouvernement mexicain, Noé Ramirez, a ainsi été formellement accusé d'avoir vendu, pour un montant de 450.000 dollars, des informations confidentielles au cartel de Sinaloa.
Pourtant, depuis l'arrivée du président Calderon, en décembre 2006, plus de 70 tonnes de cocaïne auraient été saisies. Tandis que pour la seule année 2008, 39.437 armes à feu auraient été confisquées, 19 laboratoires clandestins démantelés et 27.791 hectares de cannabis et de pavots détruits. Reste que cette victoire risque de laisser un gout amer aux populations s'il s'avère qu'elle permet l'instauration d'une politique ultra-sécuritaire inefficace. Les caméras de surveillance sont, en effet, souvent plus connues pour être de meilleurs outils d'identification que des outils d'intervention rapide. Un problème lorsqu'il s'agit de lutter contre les enlèvements de personne, un autre fléau au Mexique.