Dans sa version initiale, votée par le Parlement européen puis rejetée par le conseil de l'Union, l'amendement 138 prévoyait qu'aucune restriction à une liberté fondamentale ne puisse être prononcée sans l'accord d'une autorité judiciaire. Une composante préjudiciable au projet de loi Création et Internet, puisque ce dernier propose la mise en place d'une autorité administrative, l'Hadopi, capable de prononcer une suspension de l'abonnement à Internet alors qu'elle ne relève pas du pouvoir judiciaire.
Le compromis du 29 avril énonce maintenant qu'une suspension interférant avec la liberté d'utilisation des moyens de communication électronique ne peut être prononcée que par un « tribunal indépendant et impartial établi par la loi et agissant dans le respect du procès équitable en conformité avec l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ».
Pour Alain Lipietz, député Vert qui rapporte cette décision, ce choix est une avancée dans la mesure où il aurait suffi au gouvernement français de changer l'autorité administrative en autorité judiciaire pour se mettre en conformité avec cette disposition du paquet Télécoms. « Je rappelle qu'en France les commissaires de police par exemple sont "officiers de police judiciaire", ce qui a permis au gouvernement français de prétendre que l'amendement 138 n'empêchait pas l'adoption de la loi Hadopi : il suffisait de proclamer l'Hadopi "autorité judiciaire" ! », explique-t-il.
Guy Bono se félicite également de cette décision, qui a selon lui « l'avantage de constituer une base juridique contraignante qui permettra par la suite de lancer une procédure d'infraction contre le gouvernement français pour non respect du droit communautaire si le projet de loi Hadopi est adopté en l'état ».
Il faudra maintenant attendre que le Parlement européen s'empare du sujet en session plénière, la semaine prochaine, date à laquelle l'Assemblée nationale conclura ses discussions sur la loi Création et Internet.