C'est dans la nuit, vers 1 heure du matin que les sénateurs ont mis fin aux débats concernant le projet de loi DADVSI (Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information). Au cours de cette longue soirée, les membres du Sénat ont eu le temps de voter un certain nombre d'amendements, dont certains remettent en question le fameux article 7, qui traite de la question de l'interopérabilité des mesures techniques de protection (MTP, ou DRM en anglais). Les discussions doivent reprendre aujourd'hui vers 15 heures et se poursuivront peut-être dans la journée du 12 mai.
Rappel des faits
A l'issue des débats à l'Assemblée nationale, les MTP sont adoptée mais une mention stipule la nécessaire interopérabilité entre les différentes techniques employées par les éditeurs et les fabricants. Le 2 mai, le sénateur Michel Charasse dépose une liste d'amendements qui remettent en question cette interopérabilité, estimant que les dispositions prises par l'Assemblée « portent atteinte au droit de propriété, au droit des contrats, aux droits des titulaires de droit sur les mesures techniques de protection et à celui des titulaires de droits de propriété littéraire et artistique de les protéger aussi efficacement que l'état de la technique le permet ». Il reconnait toutefois que les MTP ne doivent pas être utilisées « pour fausser la concurrence et constituer des marchés captifs » (voir l'actu DADVSI : l'interopérabilité menacée ?).
Sénat : 173 voix contre 61 modifient l'article 7
Jack Ralite, sénateur de Seine-Saint-Denis, commence par suggérer le renvoi en commission de l'article 7 du projet de loi, motion finalement refusée. S'en suit, si l'on en croit le résumé de la séance paru sur le site du Sénat, une longue discussion au sujet de la nature et de l'importance de l'interopérabilité, motivée par l'examen de l'amendement 17 rectifié, présenté par Michel Thiollière. Menace-t-elle la propriété intellectuelle des éditeurs de contenu ? Revient-elle à breveter les logiciels ?
Le sous amendement 52, adopté, précise qu'un « protocole, un format, une méthode de cryptage, de brouillage ou de transformation ne constitue pas en tant que tel une mesure technique au sens du présent article », dans le but que ne soient pas intégrés dans le champ des mesures de protection les méthodes et composantes d'une mesure technique telle que le cryptage.
Présentés ensuite, les amendements qui instauraient l'obligatoire interopérabilité des MTP, définissaient le recours au Conseil de la concurrence en cas de litige et stipulaient que les « fournisseurs de mesures techniques ne peuvent exiger de contrepartie financière pour la fourniture d'informations essentielles à l'interopérabilité » que pour couvrir leurs frais d'envoi, ont été rejetés. Le traitement des litiges et l'éventuelle coercition exercée pour amener un éditeur à communiquer des informations relatives à l'interopérabilité devrait être effectué par une Autorité indépendante, bien que selon certains sénateurs, ces considérations relèvent de droit de l'Autorité de la concurrence. En revanche, la mise en place de « dispositifs matériels ou logiciels permettant la surveillance des données émises » quant à l'usage des œuvres est soumis à l'approbation de la Cnil. L'application de la décompilation aux mesures de protection des œuvres, qui relève des directives européennes, est maintenue.
Pour résumer, la protection des œuvres ne doit pas se faire au détriment de l'interopérabilité, tout comme l'interopérabilité ne doit pas se faire au détriment du droit d'auteur. L'éditeur devrait pouvoir s'abstenir de publier les informations nécessaires à l'interopérabilité dès lors que ces dernières se révèlent préjudiciables à l'efficacité de ses MTP. Il semblerait donc que l'efficacité de la MTP prime sur l'interopérabilité, quoi qu'ait pu dire à ce sujet le ministre de la Culture. Il faudra toutefois attendre l'issue des débats pour se prononcer de façon définitive sur un projet de loi éminemment complexe.
DADVSI : interopérabilité sous condition
Par Alex
Publié le 10 mai 2006 à 12h03
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