Le profil du deuxième vol de SpaceX pour Starship. Jusqu'à quelle étape ira-t-il ? © SpaceX
Le profil du deuxième vol de SpaceX pour Starship. Jusqu'à quelle étape ira-t-il ? © SpaceX

Le calendrier s'accélère au Texas, et SpaceX n'attend désormais plus que les autorisations pour faire décoller Starship une deuxième fois cette année. Direction l'espace, et direction Hawaï, mais pour y arriver, il y a de nombreuses étapes sur lesquelles les équipes d'Elon Musk ont travaillé. Assez pour réussir ?

La communication de SpaceX se fait de plus en plus insistante : décollage de Starship dès cette semaine… si les autorisations de lancement sont délivrées par les autorités !

On devine les échanges administratifs particuliers entre le calendrier nécessairement tendu pour l'industriel, et la responsabilité de l'institution américaine qui serait défaillante si elle donnait le feu vert à une catastrophe, d'autant plus que le public viendra nombreux assister à cette deuxième tentative vers l'espace. Starship SN25 et SuperHeavy B9. La fusée la plus puissante au monde, la plus grande, la plus décriée sans doute aussi…

Direction Hawaï, pleine puissance ?

L'objectif de ce deuxième lancement sera relativement identique au premier. En effet, SuperHeavy va allumer ses 33 moteurs, avant de gagner de la vitesse et de l'altitude. À 70 kilomètres du sol environ (probablement un peu avant), Starship va allumer ses propres moteurs et s'éjecter de SuperHeavy, pour gagner encore de la vitesse et presque entrer en orbite. Presque, puisque l'objectif n'est pas un tour complet de la Terre, mais une trajectoire qui va l'amener à freiner de façon minimale au-dessus du Pacifique pour pouvoir se poser à la verticale, dans l'Océan, au large de Hawaï.

Point de récupération, ni pour l'étage principal ni pour le vaisseau réutilisable, mais des « simulations grandeur réelle » pour tester un maximum de systèmes. Starship arrivera-t-il à tenir jusqu'à retraverser l'atmosphère en descente après avoir volé au-dessus du globe ? Peut-être, mais pour SpaceX, le principal n'est pas aussi loin, même si c'est le plan de vol officiel.

Le premier exemplaire de Starship à s'envoler vers l'espace était quand même monté à plusieurs dizaines de kilomètres © SpaceX
Le premier exemplaire de Starship à s'envoler vers l'espace était quand même monté à plusieurs dizaines de kilomètres © SpaceX

Quitter le sol sans tout arracher, première étape

Le premier obstacle sera d'abord de quitter le site de lancement. En effet, on a toujours tendance à croire qu'on ne peut que progresser, mais SpaceX n'a fait décoller SuperHeavy qu'une seule fois, et on se souvient que plusieurs moteurs Raptor s'étaient éteints avant même de quitter la table de tir. Il faudra donc montrer un décollage bien droit, pour quitter la « Starbase » avec un minimum de pertes (pas plus d'un ou deux moteurs, ce serait déjà un progrès).

Une fois le lanceur parti, de nombreux observateurs, y compris des autorités, viendront inspecter les améliorations du site. Car la Starbase, depuis avril dernier, a subi de grands travaux. L'installation d'un socle de métal et d'un réseau de canalisations de refroidissement, ainsi qu'un simili-système de déluge/suppression de l'onde de choc a l'air de tenir son rôle lors des essais de mise à feu. Mais un vrai décollage, il n'y a rien de mieux pour valider le concept, ou au contraire pour voir revenir une fois de plus le ballet de bétonnières durant quatre mois pour une fois de plus renforcer le site.

Un vol nominal, pourquoi pas

Si Starship accélère correctement, on scrutera au bout de 2 minutes et 41 secondes de vol, l'allumage des moteurs Raptor du Starship et la séparation « à chaud », une nouveauté pour SpaceX. Jusqu'ici, l'entreprise a toujours séparé ses étages, et les a laissés s'éloigner quelques secondes avant que l'étage supérieur allume son moteur. Avec Starship la séquence est différente, les moteurs s'allument alors que le vaisseau est encore accroché à son booster principal : les gaz s'échappent par une structure inter-étage blindée particulière, et Starship n'est éjecté que lorsque les moteurs ont atteint un régime de poussée suffisant.

Pour de nombreux observateurs, c'est cette étape particulière qui est la plus attendue et que SpaceX doit atteindre. En effet, c'est un changement majeur, et lors du premier tir, Starship ne s'était pas séparé du SuperHeavy. Même si tout ne se passe pas parfaitement (altitude suboptimale, problèmes moteurs ou perte de contrôle ensuite), voir Starship s'éloigner de SuperHeavy sera une étape remarquée.

Et s'il vole, combien de tuiles du SN25 seront encore en place à la fin ? © SpaceX

Savoir exploser au bon moment

Et si tout se passe mal ? Ironiquement, c'est aussi un point d'amélioration important. Car en avril lors du premier vol, le lanceur avait bel et bien détecté sa trajectoire erratique et ses problèmes qui l'empêcheraient d'aller à la frontière de l'espace. Mais ses charges explosives n'avaient pas eu de véritable effet sur la structure du booster ! Cette fois, les équipes vont scruter le « scénario catastrophe ». En cas de déviation, ils espèrent bien que le duo Starship/SuperHeavy se désintègre comme prévu plutôt que sous l'action des forces aérodynamiques…

On l'aura compris, à chaque étape du vol, SpaceX aura à cœur de montrer les progrès. Si le Starship atteint et dépasse la Ligne de Karman des 100 km d'altitude avant de grimper puis de descendre au-dessus du Pacifique, peu importe véritablement l'état dans lequel il sera à l'arrivée. Ce sera un joli résultat de recherche appliquée, pour un projet fort cher jusqu'ici, mais dont la finalité se joue d'abord en orbite. Car si Starship peut accélérer jusqu'à l'orbite, alors il pourra commencer sa carrière de lanceur et transporter (progressivement) les wagons de satellites Starlink que SpaceX envoie aujourd'hui péniblement avec des dizaines de tirs de son lanceur le plus fiable, Falcon 9.

Plus que la capacité à réussir le vol, il y a celle à retenter l'aventure ! © SpaceX

Les yeux rivés sur… la suite

Surtout, si Starship dégage correctement son site de lancement et réalise quelques minutes de vol conformes à son objectif, il faudra déjà scruter la suite. On le sait, l'entreprise empile les exemplaires améliorés du Starship et de SuperHeavy autour de sa Starbase. Disposer d'un site performant et retenter l'aventure régulièrement est important voire capital pour la suite du projet.

Pour la majorité des autres industriels du spatial, évoluer avec un lanceur super-lourd après un premier échec technique (ayant détruit une partie du site de tir) et tenter un deuxième vol en 7 mois serait pratiquement impossible. Pour la firme fondée par Elon Musk, c'est presque trop long, et tout est préparé depuis des années pour un rythme bien plus élevé. Reste à savoir si les autorités seront aussi promptes, en fonction des résultats de leurs études autour du site et de ce deuxième vol à venir. Starship sera une fois de plus sous le feu des projecteurs !