Le Bitcoin, un puits sans fond qui menace les ressources hydriques © Andreanicolini / Shutterstock
Le Bitcoin, un puits sans fond qui menace les ressources hydriques © Andreanicolini / Shutterstock

Si on connaît le Bitcoin sous le prisme de sa consommation monstrueuse d'électricité, on le connaît un peu moins sous celui de sa consommation en eau. Pourtant, le constat est tout aussi inquiétant.

En 2021, l'industrie du Bitcoin consommait environ 140 térawattheures d'électricité annuellement, soit plus d'un tiers de l'électricité consommée en France. Selon les estimations de l'Université de Cambridge, cette consommation serait légèrement redescendue à 129 térawattheures en mars 2023. Pour autant, c'est un secteur largement à la traîne concernant sa potentielle transition vers les énergies durables. Cette gigantesque industrie fonctionne en partie grâce aux mines de Bitcoin. Ce sont des ensembles d'ordinateurs très puissants servant à la vérification des transactions et à l'ajout des devises sur la blockchain. Une étude récente de la revue Cell Reports Sustainability (en lien dans les sources de l'article), publiée le 29 novembre, vient de révéler que ces installations sont de véritables gouffres hydriques.

Une soif insatiable

Alex de Vries, doctorant à l'Université de Vrije (Amsterdam) et auteur de l'étude, s'est penché sur l'ampleur méconnue de la consommation d'eau attribuée au Bitcoin. Il explique : « c'est difficile de me suprendre, étant donné que j'ai déjà travaillé sur le sujet mais les chiffres me paraissent toujours sidérants dès que je les examine ». Lorsque le Bitcoin a atteint son sommet en 2021, la consommation en eau atteignait, elle aussi, logiquement son pic, les mines nécessitant d'être refroidies pour fonctionner.

La consommation totale du minage représentait alors 1 600 gigalitres (un gigalitre est égal à un milliard de litres). Chaque transaction de Bitcoin consommait en moyenne 16 000 litres d'eau, soit l'équivalent d'une petite piscine. Cela représente environ 6,2 millions de fois de plus d'eau qu'un coup de carte de crédit. Plutôt affolant.

 Exemple d'une ferme à Bitcoin © Michael Ziegelmeir
Exemple d'une ferme à Bitcoin © Michael Ziegelmeir

Impacts et innovations potentielles

L'exploitation minière du Bitcoin a légèrement ralenti en 2022 en raison de la chute des cours. Ceux-ci ayant regagné du poil de la bête, il n'y a aucune chance que les consommations d'eau et d'électricité ne repartent pas à la hausse également. Selon de Vries, la consommation d'eau pourrait remonter et dépasser celle de 2021 en atteignant 2 300 gigalitres cette année à l'échelle mondiale. Pour étayer son argumentaire, il explique que certaines mines, par exemple aux États-Unis, consomment autant d'eau qu'une ville de la taille de Washington D.C.

Existe-t-il alors des alternatives pour amoindrir l'impact du minage ? Oui, même si ce n'est pas miraculeux. Des systèmes de refroidissement par immersion des ordinateurs dans un liquide non-conducteur peuvent atténuer la dépendance à l'eau. De Vries, de son côté, penche plutôt pour une suppression en bonne et due forme du processus de minage pour vérifier les transactions, comme c'est le cas pour l'Ethereum depuis l'an dernier. « Toute la consommation d'eau et d'électricité disparaîtrait du jour au lendemain. C'est tout à fait réalisable » estime de Vries.

Les problématiques qui lient les nouvelles technologies au contexte environnemental sont toujours à considérer en étudiant leurs différentes facettes. À l'instar des émissions de CO2 des voitures électriques, qui ne peut être le seul angle d'analyse pour étudier la question de leur impact environnemental. La pression sur les ressources en eau du Bitcoin est une autre dimension, qui a peut-être été trop négligée, éclipsée par la question de la consommation énergétique.

Sources : The Verge, Cell