Le milliardaire Patrick Drahi vient de confier XPFibre, sa filiale détenant le réseau en fibre optique de SFR, à la banque Natixis. Le tout a été fait via une fiducie, alors que le groupe négocie pour sa dette de 24 milliards d'euros.

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Alors que Patrick Drahi tente de restructurer la colossale dette de son groupe, le patron d'Altice et SFR est à la barre d'une manœuvre financière dont il a le secret. Nos confrères de l'Informé nous apprennent que XPFibre, l'opérateur d'infrastructures filiale d'Altice France sur la fibre optique, a été placé sous la gestion fiduciaire de Natixis. Un montage plutôt astucieux, qui interroge sur la stratégie du magnat des télécoms, notamment concernant le potentiel transfert d'actifs vers le Luxembourg.

Un montage financier minutieusement orchestré par Patrick Drahi

La banque Natixis, qui appartient au groupe BPCE (Banque Populaire et Caisse d'Épargne), est devenue il y a quelques mois l'actionnaire de XPFibre, via un système de fiducie, l'équivalent français du trust anglo-saxon. Vulgairement, la fiducie consiste à confier des biens à quelqu'un pour qu'il les garde ou les gère.

Cette structure englobe les parts détenues auparavant par Altice France (50,01%) et le trio d'investisseurs composé d'Omers, et des établissements Allianz et Axa. Les droits économiques et de gouvernance restent, eux, théoriquement inchangés, comme ont pu le préciser Omers et Axa.

La réorganisation intervient en tout cas dans la foulée d'un refinancement majeur de XPFibre, survenu fin mars. La société avait levé 5,775 milliards d'euros, dont 3,45 milliards auprès de Natixis, Société Générale, Crédit Agricole, et BNP Paribas. Cela avait permis à Altice de recevoir un milliard d'euros de dividende exceptionnel. Mais l'opération a doublé l'endettement de XPFibre, justifiée par sa rentabilité croissante, avec un EBITDA attendu de 600 millions d'euros.

Plus précisément, Natixis détient maintenant XPFibre via une holding intermédiaire nommée XPFibre Groupe. Cette structure valorise le capital de XPFibre à 4,5 milliards d'euros, un montant significatif pour un actif constitué initialement par le rachat du réseau fibre de SFR en 2018 pour 3,5 milliards d'euros, puis enrichi par l'acquisition de Covage pour un milliard supplémentaire en 2019.

Une stratégie qui renforce un peu plus l'inquiétude des créanciers

Le colossal montant a sans doute de quoi choquer, surtout quand on connaît les froides relations entre Patrick Drahi et ses créanciers. Début mars, l'homme d'affaires avait demandé d'abandonner un tiers de leurs créances sur les 24 milliards d'euros de dette. En échange, il leur avait proposé une participation de 18% dans le capital du groupe. L'offre avait, sans surprise, été vivement critiquée par les créanciers, lesquels réclamaient plutôt 34% du capital.

Dans un communiqué publié le 14 novembre 2024, Altice a précisé que la participation dans XPFibre est désormais détenue par « une filiale latérale d'Altice France », qui se trouve hors du périmètre restreint du groupe. Selon Bloomberg, Patrick Drahi aurait même fait remonter vers ses holdings personnelles luxembourgeoises les 1,5 milliard d'euros récoltés en vendant BFMTV, une manœuvre qui illustre sa stratégie de mise à l'abri des actifs.

La réorganisation enclenchée par Patrick Drahi s'ajoute à d'autres mouvements stratégiques récents, car au printemps, trois actifs majeurs ont été retirés des garanties offertes aux créanciers : les data centers, les médias (BFMTV & RMC) et la participation dans XPFibre, transférés vers des filiales « non restreintes », probablement basées au Luxembourg, une terre à la fiscalité avantageuse. Ces actifs, qui pèsent environ trois milliards d'euros, se retrouvent ainsi hors de portée des créanciers, une situation qui ne fait évidemment qu'accroître les tensions avec ces derniers.