À Paris, des policiers municipaux ont verbalisé 88 cyclistes en deux heures le 5 mars 2025, dans le IXe arrondissement. Parmi les infractions sanctionnées : port d'oreillettes, feux rouges grillés, circulation sur trottoirs et excès de vitesse. La mairie annonce une intensification des contrôles dans les prochains mois.

Il ne faisait pas bon pédaler en danseuse ce mercredi 5 mars 2025, rue des Martyrs dans le IXe arrondissement parisien. Certains cyclistes imprudents ou pour lesquels la notion de respect du Code de la route n'était qu'une vague idée, ont fait les frais des onze policiers municipaux qui les attendaient tout en bas, et qui ont mené une opération d'envergure.
Pendant deux heures, ils ont distribué 88 contraventions pour diverses infractions au Code de la route. Postés aux quatre coins du carrefour près de Notre-Dame-de-Lorette, les agents ont principalement verbalisé pour ports d'oreillettes, feux rouges non respectés, circulation sur trottoirs et usage du téléphone portable au guidon. Fait notable : quatre cyclistes ont reçu une amende pour excès de vitesse, dont un utilisateur de fatbike flashé à plus de 30 km/h dans une zone limitée à 20 km/h. Les sanctions, s'élevant généralement à 90 euros, ont provoqué des réactions de mécontentement chez plusieurs cyclistes verbalisés, tandis que des piétons ont manifesté leur satisfaction. Cette opération fait partie d'un plan plus large élaboré suite au décès du cycliste Paul Varry en octobre 2024.
Vers la multiplication des contrôles coordonnés dans la capitale
Et cette « descente » est amenée à se reproduire, selon Nicolas Nordman, adjoint à la maire de Paris chargé de la sécurité, qui a confirmé à nos confrères du Parisien que ces contrôles « vont s'intensifier » dans les prochains mois. La police municipale parisienne sera dotée de 30 appareils de mesure de vitesse d'ici à la fin de l'année 2025, contre seulement 10 actuellement. L'objectif est d'équiper chacune des 17 divisions territoriales de la capitale.
Ce renforcement des contrôles résulte d'un travail préparatoire. « À la suite du décès de Paul Varry, on a mis en place avec les associations de cyclistes un groupe de travail pour établir une cartographie des carrefours les plus problématiques et les plus dangereux à Paris », explique Nicolas Nordman. Le carrefour au bas de la rue des Martyrs figure parmi ces points noirs identifiés.
Dans le IXe arrondissement, Delphine Bürkli, maire Horizons, soutient activement cette initiative. Elle affirme que des opérations similaires « se sont intensifiées » depuis janvier 2025. « Elles vont continuer à s'intensifier, surtout dans les rues pentues propices à la vitesse », précise-t-elle. La maire d'arrondissement pousse même l'idée plus loin en proposant « la création d'une équipe de policiers municipaux dédiés à la protection des usagers vulnérables : piétons et vélos ».
Les contrôles semblent répondre à une demande des riverains et des piétons. « Il y a eu des plaintes de riverains. Depuis ce matin, il y a pas mal de piétons qui nous remercient », témoigne Katia, policière municipale du IXe arrondissement présente lors de l'opération. Une septuagénaire confirme : « Je passe souvent là et, parfois, on n'a même pas le temps de les voir venir. Le pire, ce sont les livreurs avec leur grosse caisse, ils roulent vite », déplore-t-elle, toujours dans Le Parisien.

L'équilibre précaire entre mobilité douce et sécurité routière
L'essor considérable du vélo à Paris depuis la fin de la pandémie de COVID-19 a transformé la physionomie de la capitale. La mairie a encouragé ce mouvement en lançant un ambitieux plan vélo 2021-2026 prévoyant la création de 180 kilomètres de nouvelles pistes cyclables. Mais cette démocratisation rapide s'accompagne de tensions nouvelles dans le partage de l'espace public.
Et ce sont les fatbikes qui cristallisent le gros de ces difficultés. Ces vélos électriques aux pneus larges, facilement débridables, peuvent atteindre des vitesses impressionnantes. L'un d'eux a été flashé à 67 km/h rue de Rivoli. Mais la réglementation peine à suivre. « Les règles à leur sujet doivent être clarifiées », admet Nicolas Nordman, « notamment quant à la légalité de leur présence sur les pistes cyclables. Dans l'attente d'une précision de la réglementation, on verbalise la vitesse excessive, car ça, on peut la contrôler ».
Le problème technique complique la tâche des forces de l'ordre. Contrairement à Lille où la brigade de sécurité routière départementale dispose d'un « curvomètre » permettant de vérifier si les vélos électriques sont bien bridés à 25 km/h, Paris ne possède pas encore cet équipement. Les agents doivent donc se contenter de contrôler la vitesse instantanée sans pouvoir sanctionner spécifiquement les vélos non conformes.
La réaction des cyclistes verbalisés montre un manque d'acceptation des règles. « Les cyclistes ont du mal à accepter les contraventions. Ils nous disent qu'on devrait faire preuve de tolérance », rapporte Katia. Des excuses variées sont avancées : « Je ne voyais pas le feu rouge, il y avait un camion », « 90 euros pour 3 mètres sur le trottoir, c'est une blague ? », ou encore « c'est cher payé surtout quand on n'est pas informé de la réglementation officielle ».
Pourtant, la législation est claire. La Sécurité routière rappelle qu'« il est interdit de porter à l'oreille tout dispositif susceptible d'émettre un son » et que « l'usage du téléphone tenu en main est également interdit ». Les policiers constatent d'ailleurs que « bon nombre de cyclistes retirent leurs oreillettes lorsqu'ils voient des policiers, signe qu'ils sont au courant ».
Le défi pour Paris consiste maintenant à trouver l'équilibre entre promotion du vélo et respect des règles de sécurité. Une cohabitation qui passe par plus de contrôles, mais aussi par des aménagements adaptés. Nicolas Nordman précise que, sur les lieux identifiés comme dangereux, « on va soit réaliser des aménagements, comme mettre une piste cyclable ou agrandir le trottoir ou, si ces aménagements sont déjà effectués, mener des opérations de police régulières ».
Il n'en reste pas moins que le développement du réseau cyclable, que ce soient les pistes cyclables, voies vertes ou partagées, associé aux aides à l'achat de vélos électriques notamment favorisent l'essor des deux-roues sur nos routes. Et c'est mathématique, plus il y a de vélos, plus il y a de morts à vélo.
14 février 2025 à 17h46
Source : Sécurité routière, Le Parisien