« Houston, on a un problème » pourrait bien être la phrase qui résume la situation actuelle de la NASA. La Maison Blanche prévoit de réduire son budget global de 20 % pour l’année fiscale 2026, avec une diminution de près de 50 % pour ses programmes scientifiques. Ces coupes pourraient menacer des missions comme celles du télescope Nancy Grace Roman ou le programme de retour d’échantillons martiens.

La Maison-Blanche tape dans les caisses de la NASA - ©Pla2na / Shuttertstock
La Maison-Blanche tape dans les caisses de la NASA - ©Pla2na / Shuttertstock

Le couperet est tombé le 10 avril dernier. La NASA a reçu un document de « passback » (retours de l'administration sur les propositions budgétaires) du Bureau de la gestion et du budget. Ce document propose de ramener le budget total de la NASA à environ 20 milliards de dollars, contre 25 milliards en 2025. Les programmes scientifiques seraient les plus touchés, avec un financement passant de 7,3 milliards à seulement 3,9 milliards de dollars. Cette baisse compromettrait des missions déjà bien avancées et fait planer la menace de la fermeture du Goddard Space Flight Center dans le Maryland, où travaillent actuellement près de 10 000 employés.

Jared Isaacman promettait un renforcement scientifique, mais les chiffres racontent une autre histoire

Lors de son audition le 9 avril pour prendre la tête de la NASA, l'astronaute Jared Isaacman s’était engagé à faire de l’agence un moteur pour la science. « La NASA sera un véritable multiplicateur de puissance pour la science », avait-il déclaré, en promettant davantage de télescopes, sondes et rovers. Pourtant, les propositions budgétaires soumises par l’administration contredisent ces ambitions. La division astrophysique serait particulièrement affectée : son budget passerait de 1,5 milliard en 2024 à seulement 500 millions en 2026.

Cette réduction aurait des conséquences immédiates. Le télescope spatial Nancy Grace Roman, déjà assemblé et prévu pour un lancement fin 2026, pourrait ne jamais quitter le sol. Le programme de retour d’échantillons martiens, essentiel pour analyser des matériaux prélevés sur Mars, serait également annulé. Même sort pour la mission DAVINCI vers Vénus, pourtant attendue par la communauté scientifique.

Janet Petro, administratrice par intérim de la NASA, avait tenté d’écarter ces informations en les qualifiant le 7 avril de « rumeurs provenant de sources peu crédibles ». Manque de bol pour elle, des documents internes confirment que ces coupes budgétaires sont bien envisagées. Ce décalage entre les annonces officielles et les faits alimente une grande cacophonie au sein de l’agence. Si ces réductions sont adoptées, elles pourraient anéantir des années d’efforts et d’investissements dans des projets scientifiques d'envergure.

le téléscope Nancy Grace Roman pourrait rester cloué au sol à cause du budget réduit de la NASA, envisagé par la Maison-Blanche - ©NASA
le téléscope Nancy Grace Roman pourrait rester cloué au sol à cause du budget réduit de la NASA, envisagé par la Maison-Blanche - ©NASA

Les réactions politiques et scientifiques dénoncent un recul stratégique

Les propositions budgétaires ont provoqué une levée de boucliers dans les milieux scientifiques et politiques. La Planetary Society a publié un communiqué pessimiste : « Le budget proposé par la Maison Blanche – qui réduit de 47 % les dépenses scientifiques – plongerait la NASA dans une période sombre ». L’organisation avertit que ces coupes entraîneraient « l’arrêt prématuré de dizaines de vaisseaux spatiaux actifs » et mettraient fin au développement des futurs projets scientifiques.

Dara Norman, présidente de l’American Astronomical Society, partage ces inquiétudes. Elle estime que ces réductions risquent non seulement d’affaiblir la NASA mais aussi d’entraîner une perte du leadership scientifique américain sur la scène internationale. Inquiétudes par ailleurs également relayées par plusieurs figures politiques.

Le sénateur Adam Schiff a qualifié ces mesures d’« autodestruction nationale ». Selon lui, annuler le programme martien reviendrait à offrir un avantage stratégique à la Chine dans l’exploration spatiale. Pour son confrère démocrate Chris Van Hollen c'est une opposition farouche à ce projet qu’il juge « totalement insensé ». Même Elon Musk, pourtant proche du président Trump et partenaire clé via SpaceX, s'est dit inquiet, sur X.com de cette tendance baissière, mais plutôt prudent. « Je ne peux malheureusement pas participer aux discussions sur le budget de la NASA, SpaceX étant un contractant majeur de la NASA  ».

Pour l’instant, le processus n’est pas finalisé. La NASA dispose encore d’un délai pour contester les propositions avant leur soumission officielle au Congrès. Cependant, si ces réductions sont validées, elles pourraient entraîner l’abandon définitif d’initiatives prometteuses qui ont déjà coûté des milliards aux contribuables américains.

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13 mai 2019 à 16h34

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Source : Ars Technica