L'utilisation de Bitcoin générerait environ 22,9 mégatonnes d'émissions de CO2 par an, ce qui est comparable aux émissions (totales) de villes telles que Hambourg ou Las Vegas.
Telle est la conclusion de l'analyse la plus détaillée à ce jour sur l'empreinte carbone de la crypto-monnaie. Pour son étude, une équipe interdisciplinaire de chercheurs de l'Université technique de Munich (TUM) a analysé des données telles que les dépôts IPO (entrées en bourse) des fabricants de matériel informatique et les adresses IP de « mineurs » Bitcoin. Ces données sont néanmoins à prendre avec recul, étant donné qu'elles n'ont pas encore été confrontées à d'autres études et à des données plus récentes, puisque l'étude concerne novembre 2018.
Le bitcoin est-il un fardeau pour le climat ?
Bien que le bitcoin soit une monnaie virtuelle, la consommation d'énergie associée à son utilisation est bien réelle.Pour qu'un transfert Bitcoin soit exécuté et validé, un puzzle mathématique doit être résolu par un ordinateur arbitraire du réseau mondial Bitcoin. Le réseau, auquel tout le monde peut adhérer, récompense les personnes qui résolvent des énigmes dans Bitcoin. La capacité de calcul utilisée dans ce processus, connue sous le nom d'exploitation de Bitcoin, a rapidement augmenté ces dernières années : les statistiques montrent qu'elle a quadruplé rien qu'en 2018.
En conséquence, le boom du Bitcoin soulève une question quant au fardeau supplémentaire qu'impose la crypto-monnaie au climat, ou non. Plusieurs études ont tenté de quantifier les émissions de CO2 causées par l'exploitation minière de Bitcoin. « Ces études reposent toutefois sur un certain nombre d'approximations », explique Christian Stoll, qui mène des recherches à l'Université technique de Munich (TUM) et au Massachusetts Institute of Technology (MIT).
C'est pourquoi une équipe de chercheurs en sciences de gestion et en informatique de l'Université technique de Munich a effectué le calcul le plus détaillé de l'empreinte carbone du système Bitcoin à ce jour. Travaillant comme des détectives, ils procédèrent étape par étape pour recueillir certaines données.
L'équipe a commencé par calculer la consommation électrique du réseau, qui dépend principalement du matériel utilisé pour l'extraction Bitcoin. En 2018, les trois fabricants qui contrôlent le marché des mineurs d'ASIC ont planifié des introductions en bourse. L'équipe a utilisé les dépôts IPO obligatoires pour calculer les parts de marché des produits respectifs des sociétés. L'étude devait également déterminer si l'exploitation minière était effectuée par une personne qui exploitait un seul mineur à la maison ou dans l'une des « fermes » à grande échelle mises en place ces dernières années par des opérateurs professionnels.
68 % de la puissance de calcul située en Asie
Les chercheurs ont déterminé que la consommation annuelle d'électricité par Bitcoin, en novembre 2018, était d'environ 46 TWh. Ces derniers ont cependant voulu connaître la quantité de CO2 émise lorsque cette énergie est générée, en cherchant où étaient situés les mineurs.Les données de suivi en temps réel des pools miniers ont fourni de précieuses informations aux chercheurs : les mineurs s'associent afin d'aller plus vite et d'avoir plus de puissance de calcul. Les adresses IP ont démontré que ces derniers ont tendance à rejoindre des pools dans leur pays d'origine ou non loin. Sur la base de ces données, l'équipe a déterminé que 68 % de la puissance de calcul du réseau Bitcoin provenait des pays asiatiques (dont 48 % rien qu'au Sichuan !), 17 % en UE, 15 % en Amérique du Nord.
Les chercheurs ont comparé cette conclusion avec les résultats d'une autre méthode en localisant les adresses IP de mineurs à l'aide d'un moteur de recherche Internet. Ils ont ensuite combiné leurs résultats avec des statistiques sur l'intensité en carbone de la production d'énergie des différents pays. Conclusion de l'étude : le système Bitcoin aurait une empreinte carbone comprise entre 22 et 22,9 mégatonnes par an... ce qui est comparable à l'empreinte de villes comme Hambourg, Vienne ou Las Vegas.
Selon Christian Stoll, le système Bitcoin n'est pas le facteur le plus important qui contribue au changement climatique. Il explique néanmoins que l'empreinte est suffisamment importante pour justifier des discussions sur la possibilité de réglementer l'exploitation des cryptomonnaies dans les régions où la production d'énergie est particulièrement intensive en carbone. Il estime par ailleurs qu'afin d'améliorer l'équilibre écologique, lier davantage d'exploitations minières à des pôles de production d'énergies renouvelables pourrait être une solution.
Ces résultats sont néanmoins à prendre avec précaution. L'instabilité du marché des crypto-monnaies fait que les mesures prises en novembre 2018 ne reflètent pas forcément la consommation électrique d'aujourd'hui. Et si l'on n'est pas vraiment sûr des émissions (précises) de CO2 relatives au minage de Bitcoin, les scientifiques sont cependant sûrs d'une chose : elles sont trop élevées.
Pour aller plus loin, et lire l'étude en intégralité, c'est par ici.
Source : Technical University Of Munich