Souvenez-vous, en 2016 était commercialisé DOOM, un reboot imaginé par id Software et pensé pour faire oublier un troisième épisode - sorti lui en 2004 - pas si mauvais que ça, mais tellement en décalage avec le reste de la série qu'il avait largement déçu. À l'époque, à peu près personne n'aurait misé un kopeck sur ce nouvel opus si ce n'est Bethesda. L'éditeur n'aura pas eu à regretter son pari, car non seulement id Software est parvenu à mettre au point un jeu techniquement très abouti, mais le gameplay était cette fois largement au niveau. Les critiques ont d'ailleurs salué ce retour aux sources plein de vigueur et les joueurs ne se sont pas fait prier pour lui assurer un beau succès commercial : plus de 500 000 copies PC vendues en moins de 15 jours ! Forcément, après un tel succès, on en redemande et - dommage pour id Software - on risque d'être encore plus exigeants.
« Badass demons, big effing guns, and moving really fast »
Enfer et DOOMnation
En juillet 2015 alors qu'il était aux commandes de DOOM (2016), Marty Stratton expliquait que la recette du solo de la franchise c'est « badass demons, big effing guns, and moving really fast ». Ce que l'on peut schématiquement traduire par « des démons bien méchants, des putains de gros flingues et des mouvements très rapides ». Une recette que le bougre a appliquée à la lettre sur « son » opus et que son compère de l'époque - Hugo Martin - a décidé de réutiliser pour cette nouvelle suite. Alors c'est vrai, on aime bien forcer le trait et ce n'est pas tout à fait exact : il y a un vrai petit scénario dans cette campagne, mais vous avouerez qu'on ne joue pas à un DOOM pour qu'on nous raconte de belles histoires... On veut buter du monstre, du joufflu, du costaud, du pas beau.Pour faire simple, sachez que nous incarnons un nommé Slayer dont l'objectif est de terrasser une espèce de conseil des enfers. Des types pas sympas emmenés par une certaine Khan Maykr qui semble vouloir asservir l'humanité sans que l'on sache finalement très bien pourquoi. Sans doute un mélange d'ego surdimensionné, de père violent et de goûter mal digéré. Le fait est que ce cadre scénaristique permet de caler un peu les choses et que, pour ceux que ça intéresse, id Software a tout de même fait quelques efforts. Ainsi, la mise en scène est intéressante et de multiples cinématiques sont là pour faire progresser le scénario. Notons au passage que la VF est très réussie et que de multiples éléments de lore sont disséminés dans les niveaux : voilà qui ravira du même coup les complétistes et les amateurs de contexte.
Voilà, nous avons planté le cadre, maintenant venons-en au cœur du jeu : son gameplay. En premier lieu, il convient de souligner qu'id Software n'avait pas dans l'idée de faire table rase du passé, bien au contraire. Le studio s'est ainsi attaché à conserver tout ce qui avait fait le succès du précédent opus et il aurait eu tort de ne pas procéder ainsi. Tout le sel du jeu repose donc sur l'utilisation la plus efficace possible de ces fameux glory kills qui ont tant fait pour la réputation du jeu de 2016. Pour les néophytes, rappelons qu'il s'agit d'achever un monstre blessé en exécutant un mouvement particulièrement gore, genre on lui arrache un bras pour lui enfoncer dans l'orbite gauche ou alors on lui fait joyeusement rentrer la tête dans la cage thoracique.
« Savoureuses » sur le plan esthétique, ces morts violentes n'ont pas pour seul objectif d'assouvir nos pulsions les plus bestiales. En réalité, elles font partie d'un tout qui vise à pousser le joueur à « penser » ses actions une fois lâché dans un niveau. Ainsi, une fois réalisé, le glory kill permet d'obtenir des petits bonus pour remonter notre vie. De la même manière, il est possible d'employer une tronçonneuse - si on a assez de carburant - pour finir un monstre et récupérer cette fois des munitions. Enfin, l'utilisation du cracheur ardent - c'est le sympathique nom du lance-flammes fixé à l'épaule du Slayer - permet de flamber des ennemis qui lâcheront cette fois des bonus d'armure. Pour le joueur, toute l'astuce est ainsi d'alterner entre ces différents bonus pour ne jamais être à court de bastos, pour remonter son armure ou pour éviter de mourir, tout simplement.
Là où les choses deviennent particulièrement fourbes, c'est que les niveaux DOOM Eternal sont évidemment conçus pour que tout fonctionne au plus juste... enfin au moins dans les niveaux de difficulté les plus élevés. Bien sûr, si vous optez pour le plus simple - bleusaille - le jeu est plus indulgent, car il en faut pour tous les goûts et tous les talents. La difficulté monte progressivement au fur et à mesure de la campagne, mais on sent très tôt qu'il faudra nécessairement penser sa progression et ne pas (trop) foncer tête baissée sur les premières créatures venues. Enchaîner ici un glory kill, là un coup de tronçonneuse et là, enfin, un petit barbecue doit permettre de se sortir des affrontements les plus costauds en un seul morceau et avec encore des munitions pour la suite des réjouissances.
« Se calmer les neurones pour penser la suite de notre aventure »
Acheter DOOM Eternal
Démons et merveilles
Bien sûr, DOOM Eternal ne nous balance pas bille en tête dans la mêlée et même si le rythme de l'aventure est bien speed, on débute malgré tout par une espèce de didacticiel. Oubliez d'entrée ce bon vieux pistolet, il ne fait plus partie de l'arsenal. Dommage. En revanche, les amateurs de grosses pétoires n'auront pas à le regretter, car on débute d'entrée avec le fusil à pompe et les habitués de DOOM 2016 ne seront pas dépaysés : il est toujours aussi percutant, toujours aussi jouissif. Ce premier niveau dans une espèce d'église à la forte influence gothique est bien sûr l'occasion de faire les rappels d'usage sur les glory kills donc, mais aussi sur les modules qui permettent d'affiner le comportement de chaque arme ainsi que les bonus que l'on peut leur appliquer après avoir bien « nettoyé » une zone, un niveau.Plus intéressant et plus novateur surtout, dès la fin de ce didacticiel, Slayer rejoint son vaisseau... c'est que le bougre aime voyager. N'ayez pas peur, id Software n'a pas dans l'idée de transformer DOOM Eternal en une espèce de Mass Effect et notre légionnaire en un Sheperd mal dégrossi. Non, le but de ce vaisseau est plutôt de se calmer les neurones pour penser la suite de notre aventure. Il sert évidemment à lancer la mission suivante, mais permet également de mettre au point notre build. Le mot est peut-être un peu fort, mais DOOM Eternal propose malgré tout pas mal de petites choses assez sympathiques 1/ pour faire progresser Slayer et 2/ pour ajuster ses compétences, ses armes à nos petites habitudes de fans de FPS.
Nous avons déjà évoqué les modules pour les différentes armes et la possibilité de renforcer encore les spécificités de chaque pétoire, mais les choses vont plus loin et c'est Slayer lui-même qui peut être modifié. On peut ainsi compter sur la présence de runes pour s'attribuer un certain nombre de passifs qui seront autant d'atouts pendant les combats. Attention, s'il est possible d'en débloquer pas mal, seuls trois passifs peuvent être actifs à la fois. Il existe aussi les cristaux sentinelles que l'on applique pour obtenir des bonus de santé, d'armure ou de munitions. Le petit truc en plus c'est que certaines combinaisons permettent de débloquer des bonus inhérents comme par exemple celui de recharger plus rapidement le cracheur ardent ou de faire lâcher davantage d'éclats d'amure aux démons.
Comme vous pouvez le constater, même si DOOM Eternal reste un FPS bien nerveux, il n'est pas si bas de plafond que cela. En réalité, notre entreprise de démolition des démons se pense, se réfléchit afin d'adapter le style de Slayer à notre propre style de joueur : est-ce que vous préférez un héros capable d'encaisser d'importants dégâts et soucieux de son armure ou viserez-vous plutôt la mobilité en boostant par exemple la portée des glory kills, en augmentant la distance de captation des butins. En réalité, les options sont réellement très nombreuses et il n'est évidemment pas question de tester toutes les possibilités au travers d'un seul run du jeu. Pas sûr que beaucoup de joueurs relancent la campagne après l'avoir bouclée, mais sur le principe, le potentiel de rejouabilité est clairement au rendez-vous.
Puisque nous parlons de la campagne, il est d'ailleurs intéressant de souligner que les développeurs ont pris un malin plaisir à cacher des bonus, à placer des « secrets » un peu partout dans les niveaux... en gros à donner envie aux complétistes de se faire plaisir. Ils seront bien sûr récompensés par quantités d'éléments de lore - de multiples codex que l'on peut lire et relire - mais aussi de vrais bonus pour les armes et l'équipement dans son ensemble. À ce sujet, chaque niveau se termine bien sûr par le petit résumé de vos prouesses. L'idée est ici de se gargariser d'avoir atteint le 100%, mais aussi de repérer les éléments de progression qui nous sont passés sous le nez et, qui sait, peut-être nous donner envie de « recommencer le niveau » plutôt que de « passer au niveau suivant » ?
« Le double saut et la ruée semblent plus indispensables encore qu'il y a quatre ans »
La DOOM-DOOM : balle magique ou balle perdue ?
Autre remarque qu'il est important de faire afin de dissocier un peu DOOM Eternal de son ancêtre d'il y a quatre ans, les niveaux sont ici plus variés dans leur dessin. Souvenez-vous, en 2016, on ne visitait pour ainsi dire que l'UAC et Mars. Là, merci le gros vaisseau spatial, les choses sont bien plus diversifiées. Tout un système de portails de téléportation permet au Slayer de se promener dans de multiples lieux et si on redécouvre avec bonheur les étendues rouge-soufre de Mars, on peut aussi arpenter des paysages terrestres plus verdoyants, des boyaux pas très réjouissants ou les décors de Phobos dont on vous laisse la surprise. Vous pourrez en avoir un aperçu au travers de nos captures ou en regardant quelques vidéos, mais l'un dans l'autre, nous apprécions vraiment cette direction artistique peut-être pas toujours très inspirée - disons surtout que c'est variable - mais qui se tient et a l'avantage d'offrir quelque chose de moins monotone.Les adeptes du fast-FPS seront eux ravis de voir qu'id Software est allé un peu plus loin encore dans la verticalité de ses niveaux. Pour les claustrophobes adeptes du mal par le mal, il y a toujours quelques couloirs bien étroits, mais dans la majorité des cas, DOOM Eternal fait la part belle aux espaces ouverts, sur de multiples niveaux, et insiste pour que le joueur soit toujours en mouvement, toujours prêt à bondir. Pour lui faire plaisir, il est bien sûr toujours question de certains mouvements spéciaux comme le double saut ou la ruée, mais leur utilisation semble encore plus indispensable pour se sortir vivant des pièges tendus par les level-designers. Moins à notre goût, soulignons aussi la présence de multiples perches pour se projeter toujours plus loin ou de petits boosts comme ceux permettant de recharger la ruée en « cours de route ».
Pourquoi « moins à notre goût » ? Tout simplement parce que cela peut parfois donner à DOOM Eternal des petits côtés jeu de plateformes pas toujours d'un grand intérêt. Remarquez c'est vraiment une question de point de vue, car certains apprécieront au contraire ces petites pauses plateforme qui invitent ici le joueur à escalader des parois rocheuses, là à jouer les trapézistes. Au final, on peut largement passer une bonne vingtaine d'heures sur cette campagne solo qui profite de temps à autre de niveaux bonus où on exerce encore un peu plus son skill, mais qui se signale surtout par sa bande-son survitaminée avec - c'était une évidence - Mick Gordon une fois encore à la baguette.
Nous aurons évidemment l'occasion de compléter ce test avec le mode multijoueur - le Battlemode - qui n'était pas encore disponible au moment où nous écrivons ces lignes. Gageons qu'il ne devrait cependant pas décevoir avec son système de jeu asymétrique et la nervosité promise par le gameplay en solo. Pour conclure et faire un peu les rabat-joie, terminons sur un petit moins bien tout de même. En effet et alors que nous estimons à 15 - 20 heures la durée de la campagne (en fonction de votre skill et de vos envies), il faut souligner un coup de moins bien sur la seconde moitié ou plutôt le second tiers avant une fin bien musclée. Rien de dramatique, mais on sent que les créateurs commençaient à manquer d'idée pour renouveler les niveaux, les créatures et les boss.
Du sang, des larmes, la victoire : retour sur le mode multi
Au moment de publier le test de DOOM Eternal, il ne nous était pas possible d'évoquer le cas du mode multijoueur, tout juste disponible. Nous avons pris le temps de l'essayer plus en profondeur et sommes maintenant en mesure 1/ de vous en présenter les principaux éléments et 2/ de donner notre avis. Tout d'abord, il est bon de souligner que cette fois, c'est id Software lui-même qui s'est chargé du développement de cet aspect du jeu. Un aspect qui tourne principalement autour du Battlemode et de son système de combats asymétriques où un joueur incarne le Slayer quand ses deux adversaires prennent le contrôle de vilains démons.Le Slayer, tout le monde le connaît et il n'a rien de très novateur en multijoueur. Il s'agit toujours d'éliminer un maximum de petits démons pour récupérer santé, armure et munitions afin de pouvoir affronter dans les meilleures conditions possibles ses adversaires humains. Eux auront davantage de possibilités puisque cinq démons leur sont proposés : l'Arch-vile est une créature de soutien qui dispose de compétences axées sur le feu, le Doloris est un adversaire volant, le Mancubus est un tank doté de deux canons et deux lance-flammes, le Maraudeur inflige d'impressionnants dégâts et peut invoquer un chien des enfers, le Revenant se montre d'une remarquable agilité.
La partie se joue au meilleur des trois manches et il nous semble pour le moment que le Slayer a tout de même bien moins de chances de l'emporter. Certes, il peut compter sur l'expérience de chacun sur la campagne solo alors que les démons demandent plus de maîtrise et de coordination, mais ils ont aussi beaucoup plus d'occasion de faire des « combos », de prendre le Slayer sous des feux croisés. Pour ne rien arranger, il doit - s'il veut l'emporter - éliminer les deux démons « humains » en moins de vingt secondes. Une tâche loin d'être évidente.
Heureusement, entre chaque manche, le Slayer débloque de nouvelles compétences et parvenir, par exemple, à s'octoyer un BFG. Sans innover particulièrement, le Battlemode vient agréablement relancer le plaisir que l'on a ressenti durant la campagne solo. Les affrontements sont nerveux, particulièrement stressants - pour l'un et l'autre des camps - et relancent la dynamique virevoltante de notre Slayer. Il n'est pour l'heure question que de six cartes pour étancher notre soif de baston et nous n'avons pas vraiment de visibilité sur ce que prévoit id Software. Affaire à suivre...
DOOM Eternal : l'avis de Clubic
Violent, nerveux et terriblement jouissif voilà en trois mots comment résumer DOOM Etenal et à ceux qui nous dirons que ce triptyque aurait aussi pu être employé pour DOOM 2016, nous répondrons par un simple « Oui ». En effet, sur le principe, la recette de ce nouveau titre ne change pratiquement pas de celle du précédent opus. On s'acharne, on transpire, mais quel bonheur de sortir victorieux de chaque escarmouche, de chaque bataille, de chaque niveau. L'adrénaline monte parfois en flèche et le niveau de difficulté peut se montrer particulièrement retord aussi nous invitons les néophytes à se mesurer aux modes les plus simples pour ne pas trop en baver. DOOM Eternal n'est pas parfait et quelques errements sont à signaler sur « l'avant-fin » du parcours de campagne, mais l'ensemble fera un bien fou à tout amateur de FPS qui se respecte. La direction artistique qui peut atteindre des sommets et la bande-son toujours aussi percutante sont d'ailleurs là pour parfaire un tableau assez remarquable. Bravo id Software et merci !Acheter DOOM Eternal
Test réalisé à partir d'un code fourni par l'éditeur