Après l'éternel retour annuel (ou presque) de la saga Assassin's Creed le mois dernier, Ubisoft avait gardé un petit dessert pour essayer de conclure 2020 en beauté avec un certain Immortals Fenyx Rising. Annoncé sous l’appellation Gods & Monsters à l'E3 2019, le titre d'Ubisoft Québec a bien changé depuis sa présentation initiale. Pour le meilleur ou pour le pire ? C'est ce que nous allons tenter d'expliquer au fil des lignes de ce test.
Délaissant la partie historique d'Assassin's Creed Odyssey pour se tourner uniquement vers la mythologie grecque, Immortals Fenyx Rising nous entraîne au cœur de l'Île d'Or dans une aventure colorée durant laquelle notre héros (ou héroïne) nommé Fenyx devra venir en aide aux dieux de l'Olympe. En effet, le titan Typhon a emprisonné les pouvoirs des divinités olympiennes qui se tournent alors vers un mortel pour sauver leur royaume. Ce sera donc l'occasion de croiser et d'affronter des créatures mythologiques plus ou moins redoutables. Mais comme nous le constaterons plus tard, le côté action du jeu n'est pas central dans le gameplay.
Coup de foudre sur l'Olympe
Contrairement à la plupart des productions éditées par Ubisoft ces dernières années, Immortals Fenyx Rising aborde son histoire avec un ton assez léger. L'humour pas toujours désopilant (chacun est juge) avancé par les différents personnages apporte un côté sensiblement enfantin au jeu. Les dieux si puissants et respectés dans d'autres licences (God of War en tête) profitent ici d'un traitement drastiquement différent qui les transforme en protagonistes un brin guignolesques. Une facette qui plaira aux plus jeunes mais qui ne sera pas forcément au goût de tous. Le scénario est donc pour le moins classique mais plutôt efficace dans ce qu'il souhaite nous raconter.
Hélas, un premier écueil vient gâcher la fête. Les doublages français sont globalement ratés malgré un casting des plus prestigieux. Car pour promouvoir cette nouvelle franchise dans l'Hexagone, Ubisoft s'était offert les services du comédien Lionnel Astier (Kaamelott) dans le rôle de Zeus. Ce dernier fait office de narrateur tout au long de l'aventure. Sans remettre en cause ses performances d'acteur, force est de constater que la star de cette version française passe totalement à côté sur Immortals. Trop de répliques sonnent faux et le constat est similaire sur pratiquement tous les personnages du jeu. Sans oublier le fait que les dialogues sont bien souvent mal rythmés (car trop longs) et confus.
Un mélange imparfait
Cela ne vous a peut-être pas échappé mais Immortals Fenyx Rising s'est empêtré dans une petite polémique juste avant sa sortie. Des observateurs ont remarqué des similitudes évidentes entre le jeu d'Ubisoft Québec et le cultissime The Legend of Zelda: Breath of the Wild. Il est vrai que nous y retrouvons par exemple la fameuse jauge d'énergie permettant de courir, de nager et d'escalader les parois. La progression organique qui invite le joueur à explorer la carte comme bon lui semble est également d'actualité. Sans oublier une mise en avant importante des énigmes via les cryptes du tartare qui font furieusement penser aux sanctuaires du titre de Nintendo.
Immortals Fenyx Rising emprunte même le système de combat à Assassin's Creed Odyssey sans y apporter le moindre changement. Une gâchette pour un coup faible, une autre pour un coup puissant, une touche pour esquiver, une pour parer... Bref, tout y est, jusqu'aux attaques discrètes depuis un buisson. Mais celles-ci sont vraiment anecdotiques et finalement peu utilisables en jeu. Pour en finir avec les comparaisons, le côté humoristique penche beaucoup vers du Kaamelott édulcoré. La présence de Lionnel Astier n'est sans doute pas étrangère à ce parallèle.
Si s'inspirer d'autres œuvres n'est pas condamnable ou un vrai défaut en soi, il faut bien reconnaître que le jeu de l'éditeur français manque cruellement d'identité. Il se contente de reprendre des bonnes idées chipées un peu partout pour les assembler sans jamais chercher à faire mieux ou à apporter une once d'originalité qui aurait été la bienvenue. Le titre fait donc trop souvent figure de pale copie sans parvenir à égaler les titres dont il s'inspire.
Réfléchir plutôt que se battre
Comme nous l'avons noté précédemment, les puzzles à résoudre sont légion au fil de l'aventure. C'est bien simple, il y a une énigme à résoudre pour presque tout dans le monde de Immortals. Sur l'Île d'Or, les trésors et autres récompenses comme les pièces de Charon (pour débloquer et améliorer les compétences de notre avatar) se déverrouillent par l'intermédiaire de casse-têtes environnementaux. Déplacer des caisses, déclencher des interrupteurs avec une flèche bien placée ou avec un rocher, reproduire de petites fresques... Et que dire de cryptes du tartare qui se terminent presque exclusivement en venant à bout d'une énigme de ce genre avec un niveau de difficulté plus ou moins élevé.
Sur le papier, la recette peut sembler divertissante mais ces puzzles deviennent rapidement interminables voire carrément confus. Il n'est pas rare de tourner en rond pendant plusieurs minutes pour trouver la solution. Fort heureusement, les développeurs ont pensé à intégrer des aides qui peuvent être activées ou désactivées à tout moment. Dommage que ces indices manquent parfois de pertinence. Ainsi, entre deux combats, le rythme de l'épopée de Fenyx est assez lent et certains joueurs pourraient vite être découragés.
Pour ce qui est des combats, la qualité est au rendez-vous avec de bonnes sensations au moment d'infliger des coups ou lors de la réalisation d'une esquive parfaite. Les pouvoirs de notre avatar sont redoutables et assez impressionnants visuellement parlant. Le bestiaire tiré de la mythologie grecque est varié bien que le comportement de l'intelligence artificielle laisse parfois à désirer. En effet, les ennemis ont développé la fâcheuse tendance de se frapper entre eux pas inadvertance. Les affrontements face aux boss assurent eux aussi le spectacle. La plupart du temps, les combats sont assez simples car Fenyx peut se soigner ou récupérer de l'endurance à l'aide potions concoctées à base d'ingrédients récupérés sur l'île. Mais il faut l'admettre, les combats sont efficaces.
Un monde grand ouvert mais une exploration trop limitée
Contrairement aux derniers épisodes de la saga Assassin's Creed qui mettent le paquet sur l'immensité de leur terrain de jeu respectif, Immortals Fenyx Rising se montre plus raisonnable dans ce domaine. La carte est donc plus condensée et se laisse parcourir assez rapidement par les airs ou grâce à notre monture. Pour dénicher les points d'intérêt, il est essentiel de prendre de la hauteur avant de presser longuement le joystick droit pour passer en vue subjective. La manette vibrera lorsque le curseur passera sur un lieu intéressant.
Le système est pratique mais rend aussi la progression bien plus dirigiste. L'Île d'Or affiche un vrai manque de vie puisqu'il n'y a personne à qui parler en dehors de l'histoire principale (tous les habitants étant pétrifiés). Par ailleurs, les quêtes secondaires scénarisées sont les grandes absentes du jeu. Les activités annexes se présentent presque exclusivement sous forme d'objets à ramasser ,comme l'Ambroisie pour augmenter la jauge de vie, ou de défis à accomplir (aller d'un point A à un point B le plus rapidement possible, faire passer une flèche à travers une série d'anneaux...). Rien de bien passionnant hélas...
Au final, et à l'opposé d'un Breath of the Wild dont il s'inspire grandement, le monde d'Immortals Fenyx Rising laisse peu de place aux mystères cachés au détour d'une cascade, aux rencontres inattendues ou à l'expérimentation pour résoudre une énigme. En matière de liberté, les créateurs du jeu se sont contentés d'offrir une map ouverte mais sans chercher à pousser la formule un peu plus loin. Mais une surprise de taille est tout de même de la partie...
Un vrai corps d'Apollon
Ubisoft est souvent critiqué pour ses jeux remplis de bugs et d'imperfections techniques qui viennent parfois ruiner l'immersion (les joueurs de Valhalla en savent quelque chose). Aussi étonnant que cela puisse paraître, cet Immortals est passé entre les mailles du filet de cette malédiction tenace. Les couleurs flashy des décors donnent naissance à des panoramas enchanteurs avec notamment un ciel étoilé somptueux. Et grâce au mode photo accessible facilement, tout le monde est capable de réaliser de superbes captures à partager sur les réseaux sociaux.
La fluidité est également au rendez-vous sur la version Xbox Series X qui nous a été fournie pour réaliser ce test. Le mode dédié aux performances permet au jeu de tourner en 60 images par seconde sans essuyer le moindre ralentissement. Pour ce qui est du mode favorisant la résolution, il n'affiche au final que peu d'améliorations visuelles et nous vous encourageons donc à opter pour un meilleur framerate.
Bien entendu, des écueils doivent être signalés. Les animations des personnages laissent à désirer, quelques rares textures sont assez sales et de nombreux petits temps de chargement gâchent la copie technique (même sur les consoles nouvelle génération). Mais dans l'ensemble, Immortals Fenyx Rising est un bonheur pour les yeux et les oreilles avec une bande originale qui délivre des morceaux plaisants jusque dans les menus.
Immortals Fenyx Rising : l'avis de Clubic
Si une partie des joueurs pourrait apprécier son aspect fourre-tout avec la multiplication des inspirations émanant des meilleurs jeux de ces dernières années, Immortals Fenyx Rising est pour nous un jeu un poil fainéant qui n'apporte vraiment rien de neuf. Le manque de charisme des personnages et les voix françaises totalement ratées n'aident pas à apporter la touche d'originalité qui aurait pu permettre au jeu de briller.
Le titre signé Ubisoft Québec a également trop voulu en faire en matière d'énigmes et se montre trop prévisible dans sa progression qui demeure au final peu intéressante en dehors de sa trame principale (et encore...). Nous pouvons nous réjouir de voir l'aventure ne pas trop s'éterniser puisqu'une vingtaine d'heure, en prenant son temps, est suffisante pour assister à la conclusion.
Mais tout n'est pas noir puisque les combats dynamiques, la fluidité exemplaire et l'esthétique générale du titre relèvent le niveau. Si seulement l'éditeur français avait choisi de mettre en avant ces qualités au moment de promouvoir son jeu... Car en ce qui concerne la performance de Lionnel Astier, il y a de quoi être terriblement déçu !
Test effectué sur Xbox Series X à partir d'un code fourni par l'éditeur