Ce 13 janvier, l'inauguration de l'Esrange a eu lieu en grande pompe à Kiruna, en Suède. Responsables européens et têtes couronnées s'y sont félicités pour cette grande première, qui a d'abord consisté à étendre un site historique… Mais la concurrence s'annonce déjà féroce entre les petits spatioports.
Et même le Centre Spatial Guyanais n'a pas dit son dernier mot.
Bienvenue en Suède
Kiruna n'est pas une ville bien touristique. C'est une station minière au nord de la Suède, on y retrouve donc beaucoup d'équipements lourds, de mécaniciens, d'ouvriers, ingénieurs et techniciens qui font des rotations sur place… Et puis, à 40 kilomètres de là, il y a l'Esrange. Un site spatial installé en 1964 et géré depuis les années 70 par la SSC, la Swedish Space Corporation, entreprise publique et étatique. Il est pour l'instant très peu connu en dehors des spécialistes du spatial, car il y a peu de reporters sur place et que ce n'était jusqu'ici pas spectaculaire : un réseau d'antennes pour la réception de données satellitaires, accompagné de complexes de lancement dédiés aux fusées-sondes, c'est-à-dire des lancements suborbitaux. Mais tout cela est appelé à évoluer, car l'Esrange a inauguré ce vendredi son tout nouveau complexe orbital, de quoi entrer des deux pieds sur le marché des « spatioports » européens. L'objectif est simple : avec la nouvelle infrastructure en place, attirer les acteurs du NewSpace pour qu'ils viennent tester leurs moteurs, puis voler régulièrement vers l'espace et l'orbite depuis la Suède.
Venez, venez clients !
Pour l'occasion, Sa Majesté le roi de Suède avait fait le déplacement, mais il n'était pas le seul puisqu'on retrouvait aussi Ursula Von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, Joseph Aschbacher le directeur de l'ESA, ainsi que plusieurs responsables et membres des futures entreprises qui ont déjà des accords pour utiliser le nouveau spatioport. Et les Suédois compteront sur leurs clients allemands des startups des lanceurs pour se faire connaître. Rocket Factory Augsburg y teste des moteurs et des étages, ISAR Aerospace devrait y faire décoller des fusées, Hyimpulse pourrait se décider aussi… L'autre grand nom de cette inauguration était évidemment ArianeGroup, qui avait amené pour l'occasion un prototype (ou une maquette) de son étage Thémis. Subventionné par l'ESA et l'Union européenne, le programme de démonstrateur réutilisable Thémis volera pour la première fois depuis l'Esrange d'ici l'année prochaine, en fonction des résultats de son nouveau moteur fonctionnant au méthane et à l'oxygène liquide, Prometheus (ce dernier est en tests entre France et Allemagne).
De la concurrence à outrance
Derrière une communication qui loue l'esprit d'entreprise européen, avec un besoin issu de véritables demandes des acteurs des lanceurs, se cache une rude compétition entre les différents spatioports naissants. En effet, il leur faut mettre en place des autorisations administratives et des infrastructures pour attirer les clients… Qui ont, en quelques années, découvert qu'ils avaient l'embarras du choix. L'Esrange est en effet un site historique avec une longue expérience des lanceurs, mais malgré cette belle inauguration, il n'est pas facile d'assurer le futur. Il y a le site d'Andøya en Norvège, mais aussi celui de Saxavord au nord de l’Écosse, qui affiche une belle dynamique récemment. Et c'est sans oublier le Centre Spatial Guyanais, qui compte bien ouvrir ses portes au NewSpace avec le site Diamant modifié en pas de tir « multi-utilisateurs » dans les années à venir.