La capsule réutilisable Nyx de The Exploration Company a été sélectionnée © The Exploration Company
La capsule réutilisable Nyx de The Exploration Company a été sélectionnée © The Exploration Company

Une décennie après la fin des cargos ATV, l'Agence spatiale européenne souhaite réagir au dynamisme des activités habitées en orbite basse. La première brique ? Une capsule cargo réutilisable. Après 5 mois d'étude des dossiers, The Exploration Company et Thales Alenia Space ont été sélectionnées.

Le module-laboratoire européen Columbus, les gigantesques cargos ATV, les expériences, les astronautes et leur parcours de formation : l'ESA est impliquée depuis plus de 3 décennies dans le progrès sur les vols habités. Malgré tout, depuis qu'une partie des « paiements en nature » concernant l'ISS sont transférés sur le module de service de la capsule américaine Orion, l'Europe spatiale donne l'impression d'un certain désengagement sur le sujet, au moment même où le secteur privé s'y intéresse le plus, avec l'envoi de « touristes » en missions courtes, la promesse de stations spatiales commerciales ou tout simplement la fin prévue de l'ISS.

Plusieurs nations, la France en tête, demandent depuis quelques années d'accélérer sur la thématique du vol habité. Mais les budgets de l'ESA ne sont pas compatibles avec pour le moment. L'agence a cependant trouvé une parade utile, celle de travailler sur une nouvelle génération de capsules cargos, réutilisables et adaptables, pouvant à terme évoluer en des véhicules habités. C'est dans ce cadre qu'elle a sélectionné The Exploration Company et Thales Alenia Space.

À vos marques, prêts ? Concevez !

Ce contrat est un autre petit tournant, il marque la volonté de l'ESA de tester le modèle américain de contrats de service. Pour cela, les industriels sont en compétition et sont sélectionnés pour fournir leur solution technologique (ici, des capsules cargos) dont ils restent propriétaires, mais pour lesquels l'agence est un client privilégié.

The Exploration Company et Thales Alenia Space ont ainsi remporté cette « phase 1 », pour laquelle 7 dossiers ont été déposés en novembre dernier. Ils reportent chacun 25 millions d'euros pour développer, jusqu'à 2026, tous les détails de conception de leurs véhicules respectifs. À cette date, l'ESA fera une nouvelle sélection de phase 2 pour la réalisation et la livraison de cargos vers et depuis l'ISS, avec l'objectif d'un premier vol pour 2028.

On le sait, l'ISS devrait prendre sa retraite autour de 2030, mais là encore, pas question de développer les capsules pour rien, elles seront compatibles avec les systèmes d'amarrage universels prévus sur les futures stations commerciales comme celles développées par Axiom Space, Vast ou Starlab.

Un démonstrateur pour le projet LCRS de Thales Alenia Space © TAS
Un démonstrateur pour le projet LCRS de Thales Alenia Space © TAS

L'ambition est autorisée

Le choix de l'ESA peut être décrit comme un mélange entre un industriel historique et de référence (Thales Alenia Space, TAS) et une start-up du NewSpace européen (The Exploration Company). La capsule de TAS, qui n'a pas de nom définitif pour le moment et garde l'acronyme LCRS, pour « LEO Cargo Return Service », mesure 4,5 mètres de diamètre. Elle est construite sur un modèle qui la rapproche d'Apollo et de Starliner.

La capsule Nyx de The Exploration Company, de son côté, semble visuellement plus conique. Nous pourrons voir à quoi elle ressemble grâce à différentes expériences que l'entreprise compte mener dans les mois et années à venir avec des démonstrateurs (le premier sera sous la coiffe de l'Ariane 6 inaugurale). La jeune pousse, installée à Bordeaux et près de Munich, ne s'en cache pas : Nyx est un premier pas vers un véhicule habité. De plus, son cargo, avant d'être sélectionné par l'ESA, a déjà un accord avec Axiom Space pour ravitailler sa future station indépendante.

Enfin, signalons que les 5 entreprises perdantes, au rang desquelles on retrouve les Allemands de Rocket Factory Augsburg et leur cargo Argo, ou ArianeGroup avec son concept Susie, ne sont pas définitivement sur le banc. En effet, la décision de mener l'étude complète de conception de leur côté leur appartient, pour peu qu'ils investissent les fonds de leur côté. Certains pourraient en profiter pour revenir dans la compétition lorsque l'ESA fera son choix concernant la phase 2 de cet ambitieux projet européen, qui pourrait aboutir à un résultat d'envergure pour la prochaine décennie.

A découvrir
Le bilan spatial 2023, des fusées et des astronautes à gogo

25 décembre 2023 à 17h00

Décryptage

Source : ESA