En route pour la conduite autonome, l'automobile traverse définitivement une phase de transition éprouvante. Les faits-divers se multiplient, sans qu'on puisse déterminer avec certitude s'il s'agit de mauvaises manipulations ou de dysfonctionnements.
Plusieurs affaires sont en cours. On recense notamment plusieurs accidents pour lesquels les conducteurs rejettent la faute sur le pilote automatique de Tesla, alors que le constructeur affirme qu'il n'était, selon les journaux de bord, pas enclenché.
Mais un autre constructeur soulève lui aussi des inquiétudes. En un an, trois Renault Espace de dernière génération se sont effectivement accidentés alors que plus personne ne se trouvait au volant.
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Négligence des conducteurs ?
Dans un premier cas, survenu en juillet 2015 à la Plagne, un Espace V s'est remis en route juste après avoir été stationné, tandis qu'une famille en descendait. Dans un dernier, même phénomène alors qu'une famille s'apprêtait à reprendre la route, et qu'un homme aidait sa femme à charger une valise entre deux manœuvres.À première vue, on peut penser à une négligence des conducteurs. Ces voitures sont effectivement équipées de la fonction Stop and Go, avec laquelle le moteur s'éteint automatiquement lors d'un arrêt, pour diminuer la consommation de carburant et les émissions. Un conducteur étourdi pourrait alors penser qu'il a immobilisé sa voiture et en descendre, alors qu'en lâchant le frein, il réenclencherait le moteur et la marche avant.
À la lecture de la dernière déposition, relayée par France Info, c'est une hypothèse crédible, parmi d'autres.
Mais dans le premier cas, le conducteur assure que le frein de stationnement électrique était enclenché, qu'il portait la clé sans contact sur lui, et qu'il avait quitté le véhicule. Alors que sa fille de 8 ans s'extirpait de la 3e rangée de sièges, la voiture s'est remise en marche. La voiture a alors remonté la contrepente sur laquelle elle était stationnée (ce qui signifie que ce n'était pas qu'une question de frein de stationnement), pour dévaler un talus de 20 m de haut, traverser la route en contrebas, et s'arrêter par frottement du bas de caisse contre le talus suivant, en équilibre au dessus d'un second dénivelé de 20 m.
De nouveaux réflexes à prendre
La famille poursuit Renault. Et si en attendant l'audience, programmée pour février prochain, on ne dispose pas d'assez d'éléments pour établir les responsabilités, on peut au moins livrer une certitude : il n'est pas facile de déterminer instinctivement l'état dans lequel se trouve une voiture moderne.Dans une voiture équipée du Stop and Go, de l'assistance automatique de maintien (hold assist), du frein de stationnement automatique et de clés mains-libres, ni le bruit, ni les vibrations du moteur, ni la position des pieds sur les pédales, ne permettent de distinguer une voiture sur le point de redémarrer, d'une voiture stationnée. Dans les deux cas, le moteur est éteint et le véhicule est maintenu immobile sans avoir à poser le pied sur le frein. La seule différence est la position du levier de la boite de vitesse automatique : P ou D (Parking ou Drive, Stationnement ou Marche avant).
Certes, il appartient au conducteur de veiller à passer en P avant de quitter son véhicule. Et à notre connaissance, toutes les voitures émettent un son lorsqu'on ouvre la portière autrement qu'en position P. Mais les voitures récentes émettent tant d'avertissements futiles que certains conducteurs finissent par faire abstraction des plus importants.
Quitte à déresponsabiliser les conducteurs, ces voitures pourraient disposer d'un capteur de présence dans le fauteuil, qui immobiliserait automatiquement la voiture en l'absence de conducteur.
Quoi qu'il en soit, en 10 ans, les gestes qu'on effectuait machinalement à l'arrivée sont devenus obsolètes. Le mouvement servant à s'assurer que le levier d'une boîte de vitesse manuelle est bien au point mort, la sensation du frein à main serré ou encore l'extinction du moteur et le retrait de la clé... Toutes ces habitudes ont disparu. Ceux qui changent de voiture ces temps-ci sont dépaysés. Il faut reprendre le pli.
Pour autant, il n'est pas encore tout à fait exclu que les conducteurs ne soient pas en cause, et que les voitures de Renault aient bel et bien un vice. À suivre !
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