Car c'est bien comme ça que le CEO de Tag Heuer, qui est passé précédemment par Blancpain, Omega et Hublot présente l'arrivée de sa marque sur ce marché. C'est selon lui le mariage de deux vallées : la Watch Valley et la Silicon Valley.
Et pour bien nous faire comprendre les enjeux de cette annonce, l'ambassadeur de Suisse aux Etats-Unis était présent tout comme Bernard Arnault, le propriétaire du groupe LVMH. Tag Heuer veut ainsi clairement revendiquer être le premier horloger suisse à proposer une montre connectée et ainsi signifier au monde que l'industrie qu'il représente a franchi le pas... celui du connecté. Car selon Biver, qui a le sens de la formule, « seuls les morts sont connectés à hier ».
Le luxe se met à l'ère du connecté
Pour sa première montre connectée, une pièce qui se revendique comme un objet de luxe, Tag Heuer, maison Suisse fondée en 1860, voulait une montre qui ne ressemble précisément à aucune montre connectée. C'était la mission principale des équipes en charge du design de cette montre à en croire Jean-Claude Biver. Le résultat est une montre ronde de 46 mm en matériaux nobles : du titane grade 2 pour le boîtier qui rend la montre légère et résistante, alors que le bracelet est en caoutchouc avec une boucle déployante. Le verre est en sapphire et Tag Heuer certifie sa montre connectée pour la norme IP67 ce que nous a confirmé Guy Sémon, l'un de ses principaux hommes à la tête du département R&D de Tag Heuer. De fait, elle résiste aux projections d'eau mais n'est pas conçue pour les immersions ou plongées : normal, il y a notamment un micro sur le côté.Question mode, Tag Heuer prévoit déjà de décliner sa montre avec des bracelets cuir mais aussi des designs un peu plus flashy. Et la montre offre nativement plusieurs cadrans signés Tag Heuer avec toujours trois aiguilles que l'on choisira d'une pression sur l'écran. A noter que le décidément très loquace Jean-Claude Biver a déjà annoncé à d'autres médias l'arrivée de versions or et or rose de sa montre connectée.
Intel à la manoeuvre
Au coeur de cette montre, qui ne peut revendiquer le statut de Swiss Made puisque son mouvement n'a pas été intégralement conçu en Suisse, se contentant de la dénomination « Swiss Engineered », on retrouve une puce Intel... Atom ! Intel qui pourtant promeut depuis plusieurs mois déjà son SoC Curie pour les objets connectés, a donc retenu une puce Intel Atom en version double coeur de la série Z34XX initialement conçue pour les smartphones. Un choix surprenant lorsqu'on sait que la puce en question est gravée en 22 nm et non en 14 nm, le process le plus avancé d'Intel. Du reste, le SoC d'Intel n'embarque pas toutes les fonctions en son sein : certaines sont effectivement sur la puce, d'autres sont déportées alors que certaines manquent à l'appel, nous y reviendrons. On aura quand même le Bluetooth et le Wi-Fi alors que la mémoire de la montre s'élève à 4 Go.Il est intéressant de noter qu'Intel a également participé à la conception de l'écran. Celui-ci est composé de trois couches : le verre en saphir, une couche tactile, et l'écran. Mais ce n'est pas tout. Il y a un miroir sous l'ensemble qui va renvoyer la lumière extérieure : l'idée étant de rendre la montre et son écran lisibles en plein jour. Par défaut, la montre n'éteint d'ailleurs jamais l'affichage de l'écran : celui-ci bascule simplement dans un affichage moins énergivore qui profite de la propriété translucide et permet de voir l'heure sans tapoti ou mouvement du poignet ce que Tag Heuer appelle le mode d'éclairage ambiant. Un mode Deep sleep est activable et éteindra complètement l'écran. Quant à l'autonomie, elle serait comprise entre 18 et 20 heures selon Intel dans son mode par défaut. En revanche, la batterie n'est pas remplaçable par le consommateur. Tag Heuer nous confirme que ses horlogers seront en mesure de la remplacer hors période de garantie.
Selon Jerry Bautista, directeur général du New Devices Group d'Intel, la collaboration avec Tag Heuer sur ce produit aurait duré une année, un cycle finalement assez rapide. Dont on trouvera peut-être l'explication dans les propos de Jean Claude Biver : « Il n'y a pas de grande différence à travailler avec les horlogers suisses ou les gens de la Silicon Valley : quand les gens sont bons ils travaillent tous de la même manière. Ils sont précis, ils savent ce qu'ils disent et ils tiennent leurs engagements ».
Un programme de trade-in contre l'obsolescence
Annoncée à 1 350 euros, la montre de Tag Heuer est vendue avec un programme de trade-in. Biver et les siens savent bien qu'une montre connectée est vouée à obsolescence ce qui n'est pas forcément l'idée que l'on se fait du luxe, puisque toujours selon le représentant de l'horlogerie Suisse : le luxe est éternel. Aussi Tag Heuer propose un programme de remplacement de sa montre, qualifié « d'éternité dans une boîte » lors de la conférence : au bout de deux ans, à l'issue de la garantie, vous pouvez la rapporter en boutique pour obtenir... non pas une nouvelle génération de montre connectée mais une montre mécanique. Il faudra à nouveau débourser 1 350 euros pour obtenir l'équivalent du modèle Carrera de Tag Heuer (vendu aujourd'hui dans les 3 000 euros) et dans les mêmes matériaux (titane grade 2).Autant il est courageux et honnête pour Tag Heuer de reconnaître qu'une montre connectée ne sera pas éternelle, autant nous nous attendions à un programme de mise à jour matériel. Mais Jean-Claude Biver sera bien rapide à démonter ce souhait : « Si demain on rajoute une caméra en façade, ce que je ne vous souhaite pas car je pourrais prendre des photos de vous sans que vous le sachiez, ce ne sera pas possible dans le même boîtier ». La marque s'attend déjà à 10% de trade-in.
Brian Krzanich (Intel), Jean-Claude Biver (Tag Heuer), David Singleton (Google), Bernard Arnault (LVMH)
Quelques lacunes
Parmi les lacunes de ce modèle on notera l'absence de capteur du rythme cardiaque, un choix pour le moins étrange. Ou encore l'absence de GPS embarqué (mais l'on peut se baser sur le GPS du smartphone). Quant à l'avenir, Jerry Bautista d'Intel nous explique qu'il se dessine avec un nombre de capteurs accru : des capteurs d'hydratation par exemple pourraient être embarqué par la prochaine génération de SoC du fondeur.Et si nous avons parlé jusqu'à présent de Tag Heuer et d'Intel, il ne faut pas oublier que cette montre est un mariage à trois. Car Google a effectivement participé au projet, la montre utilisant Android Wear dans une version x86. Ce qui, nous promet-on, sera totalement transparent pour l'utilisateur. C'est particulièrement vrai si les apps de la montre s'exécutent sur le smartphone, peut-être un peu plus compliqué si elles doivent s'exécuter directement sur la montre.
Brian Krzanich (Intel), Jean-Claude Biver (Tag Heuer) et David Singleton (Google)
Tag Heuer a au passage indiqué avoir apporté ses personnalisations à certaines fonctions d'Android Wear avec un mode chronographe alors qu'il a revisité certaines apps et annonce l'arrivée d'app pour vous tenir au courant, via notifications, des résultats sportifs, par exemple.
Un modèle pour femme ?
Avec un boîtier assez large, la montre connectée de Tag Heuer n'est pas du tout pensée pour la gente féminine. Jean Claude Biver nous explique : « On ne peut oublier les femmes : d'ailleurs, le marché est probablement plus important que pour les hommes. On proposera des montres connectées pour femmes. Cependant, Tag Heuer est depuis des années une marque à 70% pour les hommes. Dès que la technologie nous le permettra, nous ferons des montre plus petites, j'espère rapidement, pas dans deux ans ».Jean Claude Biver, CEO de Tag Heuer et président de la division montres de LVMH