RNT : la radio numérique en détails, pourquoi son avenir est menacé

Romain Heuillard
Publié le 20 juin 2014 à 18h44
C'est finalement aujourd'hui que le radio se met au numérique en France, avec le lancement de la Radio Numérique Terrestre (ou RNT), dans l'indifférence générale.

La RNT est à la radio ce que la TNT est à la télévision... Si ce n'est que la radio numérique est loin de susciter le même engouement. Alors que la TNT s'est ouverte avec toutes les chaines existantes et a définitivement remplacé la télévision analogique en moins de 10 ans, la RNT fait l'objet d'une bataille entre les grands groupes privés et les radios indépendantes qui met à mal sa réussite.

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Un lancement sans les leaders

La radio numérique est boudée par la plupart des principaux acteurs de la radio en France. Ni les groupes Lagardère (Europe 1, RFM, Virgin Radio), NextRadioTV (BFM, RMC), NRJ (Chérie FM, Nostalgie, Rire & Chansons) et RTL (Fun Radio), ni même le service public Radio France, ne participent ainsi au lancement de la RNT.

Regroupant ces quatre groupes privés, le Bureau de la radio se justifie par l'« échec » constaté chez nos voisins européens et préfère miser sur la radio par Internet, qui n'entraine pas les coûts d'une phase de transition. Selon Médiamétrie pourtant, seules 6,3 millions de personnes soit 11,9% des Français écoutent la radio par Internet. Au Royaume-Uni par exemple, la radio numérique représente 30% de l'audience, ce qui est sensiblement supérieur mais reste faible un peu plus de 15 ans après ses débuts en 1998.

Une aubaine pour les indépendantes

C'est que les enjeux sont les mêmes que du temps de la TNT.

Recourant à une nouvelle bande de fréquences et au multiplexage, qui permet de passer d'une seule à dix radios par fréquence, la RNT ouvre effectivement les ondes à de nouvelles radios, et donc à une concurrence accrue. Tout comme TF1 et M6 (maison mère de Clubic) étaient réticents à l'arrivée de 8 nouvelles chaînes, les grandes radios privées s'accommodent très bien de la saturation de la bande FM dans les grandes villes, ce qui limite la dispersion de l'audimat.

Sans surprise ce sont donc les radios indépendantes, regroupées autour du Sirti, qui embrassent la RNT. C'est d'ailleurs sous l'impulsion d'une injonction du syndicat que le CSA avait fini par délivrer les autorisations fin 2012, quatre ans après avoir lancé l'appel à candidatures. Certaines de ces radios sont dès aujourd'hui diffusées dans des villes dans lesquelles elles ne sont pas diffusées en FM.

Mais en boudant la RNT, les grandes radios privées risquent fort de parvenir à la tuer dans l'œuf, en retenant la majorité des éditeurs de s'équiper.

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L'imbroglio technique résolu

Quoi qu'il en soit la RNT ne pose plus de problème sur le plan technique. Ce n'était pourtant pas gagné non plus.

Lors de l'appel à candidatures en 2008, les acteurs puis le CSA s'étaient effectivement déclarés en faveur du T-DMB, une norme de diffusion incompatible avec le DAB+ qui était déjà exploité depuis plusieurs années dans le reste du monde. Bien que cette norme soit plus complète, puisqu'elle prend en charge la vidéo en plus de l'audio, ce choix aurait ralenti l'adoption de la RNT, car il aurait imposé le développement de récepteurs spécifiques à la France ou de récepteur double norme plus onéreux.

Le CSA a finalement offert le choix fin 2013, et la majorité des radios s'est tournée vers le DAB+.

Par rapport à la FM couplée au RDS, la RNT passe donc à une diffusion numérique, avec un format de compression HE-AAC v2 à plus ou moins 80 kb/s en l'occurrence, accompagné de métadonnées plus complètes, pouvant inclure du texte mais aussi de l'image ou des coordonnées GPS destinées au système de guidage d'une voiture par exemple. Sur le plan qualitatif, le numérique apporte une meilleure réponse en fréquence (de 15 000 à 20 000 Hz) mais il réduit ici la dynamique (l'écart entre le son le plus faible et le son le plus fort). Les deux présentent donc des avantages et des inconvénients. Enfin il permet aux radios d'utiliser une seule fréquence à l'échelle nationale, au prix de l'autodiffusion à laquelle le multiplexage a mis fin.

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Comparaison spectrale de la FM et du HE-AACv2 à 56 kb/s. Source : Associated Broadcast Consultants.

La RNT est donc disponible depuis aujourd'hui en France, dans un premier temps à Paris, à Marseille et à Nice. FG, Latina, MFM, Notre Dame, Nova, Ouï FM, Skyrock, Sud Radio, TSF Jazz et Voltage y sont diffusées. Pour les capter, il faut donc un récepteur compatible, comme en proposent toutes sortes de marques vendues chez toutes sortes de cybermarchands. Visiblement c'est en revanche plus compliqué en magasin.

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