Yves Riesel : Nous allons tout d'abord nous protéger puis ensuite nous assurerons le futur. Dans un premier temps, l'objectif est d'avoir des coûts les plus légers possibles. Pour cela, nous allons devoir restructurer l'entreprise et réaliser des licenciements. Nous maintiendrons la qualité de notre service et de nouvelles applications sortiront dans deux mois et demi. Mais en attendant, on va resserrer les rangs.
Dans un second temps, Qobuz va restructurer son capital avec de nouveaux entrants. Leur arrivée va permettre de payer nos dettes et régler notre passif. Nous avons des relations avec des investisseurs. Depuis 6 mois, nous sommes en recherche de fonds mais nos travaux n'ont pas abouti. C'est donc pour nous ce que l'on appelle un incident de financement.
Quels sont les principales barrières que vous rencontrez sur le marché de la musique en ligne ?
Y.R : Le problème réside dans le fait que nous sommes une start-up et que, sur le marché de la musique en ligne, personne n'a encore atteint la rentabilité. C'est pourquoi, j'ai rappelé à tous que nous sommes en recherche constante de fonds.
De même, le marché de musique en France est particulier. Sur le territoire, tous les services sont morts, la Fnac n'est par exemple qu'une marque blanche. Il ne reste donc en face que Deezer. Alors qu'en Allemagne ou en Grande-Bretagne, il y a 5,6,7 services de musique en ligne. Nous ne sommes donc pas sur le même positionnement que nos concurrents, ce qui peut créer des interrogations.
Le fait de devoir posséder un catalogue de titres dont les droits ont été négociés avec des labels est-il un frein à votre activité ?
Y.R : Je le répète, nous n'avons aucun problème de droits. Nous ne sommes pas positionnés sur le terrain de la gratuité (à l'instar des modèles de Deezer et Spotify, ndr), nous n'avons donc aucun souci de ce type. La question est ailleurs.
Y.R : Pourquoi n'avons-nous pas réussi jusqu'à présent à réaliser un chiffre d'affaires supérieur à celui que nous faisons ? C'est parce que nous ne faisons pas suffisamment de marketing. Sur notre activité téléchargement, nous développons notre clientèle mais sur l'économie de l'abonnement, il faut en général « acheter des clients », c'est comme ainsi que cela fonctionne. Mais pour ce faire, nous devons investir.
Quelles sont alors les clés qui permettront à Qobuz de se développer dans le futur ?
Y.R : Nous nous sommes positionnés sur l'écoute de musique de qualité, notamment à la maison. Regardez l'IFA de Berlin l'an dernier, certains produits chez Sony comme des enceintes pour écouter de la musique en haute résolution (ou également des baladeurs de la même marque, ndr) ont été dévoilés. Il y aura cette année encore de nouveaux produits de ce type, ce qui nous amène à penser que nous sommes sur la bonne voie.
J'ajoute que l'intégration de Qobuz dans ces appareils connectés est un moyen d'accélérer notre croissance, c'est là que se situe notre avenir. Mais pour y parvenir nous devons négocier avec de grandes marques et être présents dans plusieurs pays. C'est pourquoi nous ne pouvons pas cantonner notre activité à la France. Dans ce sens, notre stratégie de développement dans d'autres pays d'Europe ne sera pas touchée par les mesures de restructuration.
Qobuz est présent dans 8 pays européens mais pensez-vous partir de France ?
Y.R : Je vais être honnête, la France n'est pas un bon marché pour servir de base de départ, ce n'est pas le plus confortable pour notre secteur. Nous n'avons pas eu davantage de clientèle car le marché est faussé par certains grands concurrents.
Cela fait 10 ans que nous sommes dans la musique en ligne. Si Qobuz disparaît, soit. Mais la nature a horreur du vide et la question est de savoir si le prochain Qobuz sera français ou non.
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