Eric Bredin, Stratasys : "On ne veut pas changer le modèle de Makerbot"

Frédéric Cuvelier
Publié le 21 novembre 2013 à 14h01
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Éric Bredin est le directeur marketing EMEA de Stratasys, société qui conçoit et commercialise des imprimantes à destination des industriels, et plus récemment pour le grand-public, depuis le rachat de Makerbot. Eric Bredin a passé 8 ans chez Hewlett Packard avant d'intégrer Objet, une entreprise israélienne également rachetée par Stratasys.

Clubic - Bonjour Eric Bredin. Pourriez-vous rapidement nous présenter Stratasys ?

Eric Bredin - Stratasys est une société vieille de 25 ans, qui trouve ses origines aux États-Unis, mais qui est désormais aussi israélienne depuis la fusion, l'an dernier, avec la société Objet. Cette année, nous avons également acquis la société Makerbot.

L'objectif de l'entreprise, c'est de d'apporter des solutions 3D qui servent 3 axes majeurs : premièrement, le personnal manufacturing avec de petites imprimantes 3D qui doivent toucher un public de plus en plus large. Pour cela, nous avons Makerbot.

Deuxièmement, des technologies très différentes qui sont le cœur de développement initial de Stratasys et qui touchent le prototypage rapide.

Enfin, un autre élément sur lequel nous travaillons beaucoup, c'est le manufacturing industriel : apporter des solutions et des outils de fabrication de pièces à la demande.

Le rachat de Makerbot a engendré quelques réactions de la part des makers de la première heure, qui reprochait à l'entreprise de vendre son âme : qu'avez-vous à leur répondre ?

EB - Notre philosophie, au travers de l'acquisition de Makerbot, ce n'est pas d'ajouter simplement un portefeuille de technologie à Stratasys, d'ailleurs la technologie employée par Makerbot est déjà très bien connue par Stratasys.

Nous collaborons avec Makerbot, qui conserve sa propre stratégie, son propre go to market, sa propre communauté d'utilisateur et qui nous permet de toucher un public différent. Au-delà de la technologie, cet esprit communautaire est très intéressant, on ne veut pas supprimer ça, car c'est un moyen plus ample de développer les technologies de l'impression 3D auprès des consommateurs tentés par cette technologie. On ne veut pas changer le modèle de Makerbot, mais plutôt profiter de nos deux modèles, qui sont complémentaires.

Croyez-vous que l'imprimante 3D entrera dans les maisons comme a pu le faire l'imprimante « 2D » ?

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EB - L'impression 3D s'adresse à des gens qui savent gérer la 3D avant tout, donc à des semi-professionnels ou des pro-sumers plutôt qu'à des consommateurs. Cela peut être au sein d'un salon dans le cadre d'une entreprise individuelle comme un photographe peut avoir son imprimante professionnelle. De là à dire que tous les foyers vont être équipés, il va se passer un petit peu de temps malgré tout avant que cela arrive.

Ce mouvement sera piloté en grande partie par les fabricants de produits grand-public, qui devront intégrer ce que peut apporter l'impression 3D en termes de commercialisation : des fabricants de smartphones, par exemple, pourraient mettre à disposition des fichiers qui vous permettraient d'imprimer votre coque.

Le logiciel est également un frein à la démocratisation de l'impression 3D : le groupe travaille-t-il dans le domaine ?

EB - Le travail réalisé autour de Makerbot et notamment autour de la plate-forme communautaire Thnigiverse sont des outils qui permettent à un public plus large d'accéder à des gabarits. Évidemment, si l'ambition est la création de A à Z du produit, il faut utiliser un logiciel. Il y a des éditeurs spécialisés comme Autodesk, qui commencent à développer des plates-formes qui sont de plus en plus accessibles. C'est plus leur cœur de métier que le nôtre.

Quels sont selon vous les domaines les plus porteurs pour l'impression 3D ?

EB - Le prototypage rapide, bien sûr, car c'est un métier en pleine croissance. La tendance du marché, ce sont des cycles de vie de plus en plus courts, et on a besoin de faire de l'innovation et du design de plus en plus rapidement. L'impression 3D est un vecteur qui permet aux entreprises, petites, moyennes ou grandes, d'être plus rapides qu'auparavant dans le cycle de développement de leurs produits.

À côté de cela on a aussi l'impression personnelle et le manufacturing industriel pour lequel on a deux axes principaux. La fabrication optimisée tout d'abord, pour laquelle l'impression 3D amène de grands bénéfices, de confort, de rapidité, d'adaptation au niveau de la géométrie des produits que l'on veut assembler... C'est un secteur peu médiatisé, mais en très forte croissance.

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L'autre partie qui se développe aussi beaucoup, c'est l'alternative manufacturing, qui correspond à une fabrication additive qui se substitue aux procédés conventionnels. Cela permet aux industriels de concevoir les produits différemment, d'optimiser certains produits de leurs chaînes de fabrication. On peut vendre des produits plus légers avec des structures en nid d'abeille par exemple, structures qu'il est compliqué de faire en fabrication conventionnelle. Ce sont de champs qui sont amenés à se développer fortement, mais qui nécessitent beaucoup de remise en question et d'adoption.

Pour cela, il y a un vecteur très puissant et très important qu'est celui de l'éducation. Depuis un certain nombre d'années, on place beaucoup de ces machines d'impression 3D au sein de grandes écoles d'ingénierie, et les jeunes qui vont sortir de ces écoles demanderont demain à leurs entreprises « où sont mes imprimantes 3D ? » et cela changera la méthodologie de travail.

À écouter les différents acteurs présents à ce 3D Print Show, chacun semble avoir trouvé sa place et la concurrence est un mot absent des différents discours. Qu'en est-il ?

EB - On collabore en effet tous au développement d'un écosystème où chacun apporte sa propre valeur en fonction des capacités d'investissements et de la capacité de recherche et de développement, qui font le futur de ces technologies.

Avec 16 000 machines installées dans le monde, plus de 60 000 clients, on a un marché qui nous indique quelle voie prendre, là où nous devons faire nos propres développements, tandis que les autres acteurs ont également leurs propres réflexions et aujourd'hui il y a une bonne collaboration de positionnement. Quand vous faites du plastique, vous ne faites pas de métal ou de la céramique : il y a des complémentarités de technologies, d'autant que le marché est en pleine croissance. Sur un marché plus compétitif où les coudes sont un peu plus serrés, il y aura peut-être un peu moins de collaboration. Mais ce n'est pas le cas aujourd'hui.

Justement, que vous inspire l'arrivée d'un acteur comme HP dans le domaine de l'impression 3D ?

EB - On se concentre sur notre développement et notre cœur de compétence et il n'y a pas beaucoup d'acteurs qui peuvent prétendre avoir autant de clients, d'expertise et de technologie en matière d'impression 3D.

Maintenant que d'autres acteurs viennent sur ce marché, c'est normal, et ils vont être de plus en plus nombreux, et c'est tant mieux pour le marché, tant mieux pour le développement de la technologie.

Aujourd'hui, si on devait comparer le nombre d'imprimantes 3D qui sont installées dans le monde, tous fabricants confondus, par rapport aux imprimantes papier, on est à une infime fraction. Donc plus il y aura d'acteurs et de compétences et plus il y aura de développement sur ce marché, meilleur ce sera. En attendant, on continue à développer notre business, avec nos spécialités.

Merci Eric Bredin !
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